Alors que la révolte des Trévires éclatait, ou peu après la défaite de Iulius Florus, Iulius Sacrovirus et ses partisans déclenchèrent le soulèvement des Éduens. Soutenus par deux cohortes régulières (1), les conjurés prirent possession d'Augustodunum (Autun). En plus d'être la métropole de leur cité, c'était à Augustodunum que se trouvaient les célèbres scholae menianae, les "écoles méniennes", où les enfants de l'aristocratie gauloise étudiaient les arts libéraux (2). Cette initiative fut particulièrement pertinente puisqu'en faisant de ces étudiants ses otages, les insurgés pouvaient théoriquement attacher à leur cause la noblesse gauloise (ou la contraindre à ne pas s'y opposer).
Une fois la ville sous contrôle, sachant pertinemment que les troupes des légats Caius Visellius Varro et Caius Silius finiraient par venir à leur rencontre, les conjurés armèrent les habitants de la ville avec des armes fabriquées dans la clandestinité ; des épieux, coutelas et autres instruments habituellement destinés à la chasse. Cette indication est riche en informations puisqu'elle implique une véritable préparation du soulèvement, la collaboration de nombreux artisans de la ville, mais également un travail de longue allène habilement dissimulé et réalisé dans la plus parfaite discrétion. A ce stade, d'après Tacite, Iulius Sacrovirus se trouvait à la tête d'une armée de 40000 hommes, dont la majorité n'étaient cependant que des civils impréparés et mal-équipés (3). Enfin, les insurgés mobilisèrent les crupellaires d'Augustodunum, les seuls, avec les soldats des cohortes régulières présents, à avoir une certaine expérience du combat.
(2) Les arts libéraux (liberalibus artibus) étaient les sept disciplines littéraires (triuuium) et scientifiques (quadriuium) enseignées dans les écoles romaines. Le triuuium désignait l'enseignement de la grammaire, de la rhétorique et de la dialectique ; et le quadriuium, celui de l'arithmétique, de la géométrie, de l'astronomie et de la musique.
(3)Tacite (Annales, III, 43) indique qu'un cinquième seulement de l'armée de Iulius Sacrovirus était équipé à la manière de véritables légionnaires, soit 8000 hommes.
Tacite, Annales, III, 43 :"Celle des Éduens fut plus difficile à réprimer, parce que cette nation était plus puissante, et nos forces plus éloignées. Sacrovir, avec des cohortes régulières s'était emparé d'Augustodunum, leur capitale, où les enfants de la noblesse gauloise étudiaient les arts libéraux : c'étaient des otages qui attacheraient à sa fortune leurs familles et leurs proches. Il distribua aux habitants des armes fabriquées en secret. Bientôt il fut à la tête de quarante mille hommes, dont le cinquième était armé comme nos légionnaires : le reste avait des épieux, des coutelas et d'autres instruments de chasse. Il y joignit les esclaves destinés au métier de gladiateur, et que dans ce pays on nomme crupellaires. Une armure de fer les couvre tout entiers, et les rend impénétrables aux coups, si elles les gêne pour frapper eux-mêmes."