Il existe en outre une autre espèce d'oeuf en grand renom dans les Gaules et dont les Grecs n'ont pas parlé. Des serpents s'entrelacent en grand nombre ; avec leur bave et l'écume de leur corps ils façonnent une sorte de boule appelée urinum. Les druides disent que cette façon d'oeuf est projetée en l'air par le sifflement des serpents, et qu'il faut la rattraper dans un manteau sans lui laisser toucher terre ; que celui qui s'en est emparé doit s'enfuir à cheval, car les serpents le poursuivent jusqu'à ce qu'il soit arrêté par l'obstacle d'une rivière ; l'épreuve qui fait reconnaître cet oeuf est qu'il flotte contre le courant, même s'il est attaché avec de l'or.
De plus, avec cette ingéniosité qu'ils ont à envelopper de mystères leurs mensonges, les Mages prétendent qu'il faut les prendre pendant une certaine lune, comme s'il dépendait de la volonté humaine de faire coïncider avec cette lune l'opération des serpents. J'ai vu du reste cet oeuf : il était de la grosseur d'une pomme ronde moyenne, et sur sa coque se remarquait de nombreuses cupules cartilagineuses semblables à celles dont sont munis les bras des poulpes. Les druides vantent fort son merveilleux pouvoir pour faire gagner des procès et pour faciliter l'accès auprès des souverains, mais c'est une si grande imposture qu'un chevalier romain du pays des Voconces qui, au cours d'un procès, en portait un sur son sein, fut mis à mort par l'empereur Claude sans aucun autre motif que je sache.
Sources
• Pline, Histoire Naturelle, XXIX, 52-54, Trad: A. Ernout, 1962, Paris, Les Belles Lettres.