• Le testament du Lingon, Traduction de : Jean-Jacques Hatt, in La tombe gallo-romaine, Paris, Picard
Texte:
Je veux que le tombeau que j'ai fait édifier soit achevé suivant les plans que j'ai fixés, en forme d'exèdre, et qu'y soit placée une statue assise, du meilleur marbre, d'au delà des mers, ou en feuilles de bronze de la meilleur qualité, haute d'au moins cinq pieds. Que sous l'exèdre soit placée une litière, et, sur les côtés, deux sièges en marbre d'au delà des mers. Que, pour s'y étendre aux jours où la tombe sera ouverte, l'on y voit deux couvertures, une paire de coussins de repas, deux manteaux et une tunique. Que devant le monument soit placé un autel, du meilleur marbre de Carrare, sculpté du mieux qu'il se pourra, dans lequel seront placées mes cendres. Que cet édifice soit fermé par une clôture en marbre de Carrare, de façon à pouvoir être facilement ouvert puis refermé.
Que cet édifice, ce verger et ce bassin soient entretenus par les soins de mes affranchis Philadelphus et Verus, et que les dépenses nécessaires y soient faites en vue des réfections et des reconstructions, en cas de dommage ou de destruction. Que l'ensemble soit entretenu par trois jardiniers et leurs apprentis, et dans le cas de décès ou d'absence, qu'il soit pourvu à leur remplacement. Que chacun des trois reçoive par an soixante boisseaux de blé, et, pour les vêtements, vingt deniers. Que mon petit-fils Aquila et ses héritiers soient chargés de ces prestations. Que sur le monument soit inscrits à l'extérieur les noms des magistrats qui auront vu le début de la construction, et le nombre d'années de mon existence.
Si l'on incinère, ou ensevelit quelqu'un, dans ce verger ou dans ces lieux tels que j'ai ordonné qu'ils fussent entretenus et plantés et tels que je les ai fait enclore d'un mur, en bordure du bassin, si l'on contrevient, à proximité de ce verger, aux prescriptions ci-dessus, mes héritiers en seront tenus pour responsables. Les stipulations relatives à cet emplacement sont valables pour l'éternité, et personne après moi n'en pourra disposer, sauf pour améliorer l'entretien, la plantation et le conditionnement de l'ensemble. Que tous ceux qui s'y rendront pour l'entretenir, à pied ou en voiture, aient un droit de passage vers le monument.
Si l'on incinère ou ensevelit quelqu'un, si l'on a construit un monument funéraire à proximité, si l'on fait quoi que ce soit dans ce verger, cet emplacement et cet enclos, qui soit contraire à ce qui a été écrit ci-dessus, S. Julius Aquila, fils de S. Julius Aquilinus, son héritier et leurs héritiers, s'il est contrevenu aux stipulations ci-dessus, ou s'ils n'exigent pas de leurs héritiers qu'elles soient respectées, seront condamnés à payer cent mille sesterces au trésor de la cité des Lingons. Cette amende devra menacer pour toujours tous les propriétaires du domaine.
Que tous ceux que j'ai affranchis de mon vivant, ou par testament apportent annuellement et individuellement une quote part d'un sesterce. Que mon petit-fils Aquila et son héritier fournissent chaque année la somme de <lacune> pour que chacun prépare des aliments et des boissons destinés à être exposés en-dessous, et sur le devant du tombeau qui est du domaine de Litavis [Litavicrari, dans le texte], qu'ils consomment là, et qu'ils y demeurent jusqu' à ce qu'ils aient consommé l'ensemble. Qu'ils nomment à cet office des curateurs, qui soient chargés chaque année de la chose, et qui aient le pouvoir d'exiger d'eux la somme. Je confie ce soin à Priscus Phoebus et à Philadelphus Verus, qu'après ma mort les curateurs nommés de la sorte accomplissent chaque année les cérémonies sur l'autel ci-dessus mentionné aux Kalendes d'avril, de mai, de juin, d'août et d'octobre.
Je confie la charge de mes funérailles et de mes obsèques, de tous les détails, des édifices et des monuments à Sextus Julius Aquila, mon petit-fils, et à Macrinus fils de Reginus, et à Sabinus fils de Dumnedorix, et à Priscus mon affranchi, et procurateur, et je les prie de prendre soin des cérémonies que je désire après ma mort.
Je veux que tout mon attirail pour chasser et prendre les oiseaux soit brûlé avec moi, avec mes épieux, mes glaives, mes coutelas, mes filets, mes pièges, mes lacets, mes flèches, mes tentes, mes épouvantails, mes litières de bain, ma chaise à porteurs, et tous les ingrédients et l'attirail afférents à cette occupation, et mon canot léger en vannerie, sans que rien de tout cela ne soit soustrait, et tout ce que je laisserai en fait d'étoffes damassées et brodées et toutes les étoiles en corne d'élan.