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comprendre le celtisme, opinion pour un programmeModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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comprendre le celtisme, opinion pour un programmeComprendre le celtisme aujourd'hui.
"Ceux qui savent les sources sont avec nous dans cet exil". Saint-John Perse. La civilisation des celtes rencontre aujourd'hui d'autant plus d'intérêt que les travaux érudits au premier rang desquels nous mettons les ouvrages irremplaçables de Françoise Leroux et Christian-J Guyonvar'ch, sont venus, depuis une trentaine d'années, porter à la connaissance du grand public un domaine jusqu'à eux abandonné aux approximations et aux supputations les plus diverses, si ce n'est aux divagations. Le "celtomane" y trouvait alors facilement son compte de même que l'amateur de mystères, plus occultiste que véritablement ésotérologue, furieux du moindre dévoilement. Ceci ne veut pas d'ailleurs pas dire que l'ésotériste (au sens d'Antoine Faivre) ne puisse, à un autre niveau de connaissance, trouver dans la matière celtique parvenue jusqu'à nous à travers de multiples avatars -et la Légende Arthurienne y tient sans conteste une place considérable -, lieu à "invention" permanente des rites et traditions pratiqués dans la religion des celtes. Cette invention culmine dans les récits de la Quête du Graal, héritière du Chaudron de Dagda, enrichie et revisitée par les contacts des celtes, aux grandes époques, avec les cultures orientales et la civilisation de l'Occident médiéval. . Les ésotérologues (à ne pas confondre avec les ésotéristes et moins encore avec les occultistes) s'y trouvent confrontés sans doute aux difficultés épistémologiques aggravées par le caractère particulier d'une matière. efflorescente d'images qui s'imposent à nous, d'une matière qui ne fut, de tous temps, accessible qu'aux initiés de la religion druidique. Nous y sommes de nos jours aidés par une conviction, considérant cet atout majeur de la pensée symbolique-mythique qui consiste à pouvoir, dans l’ordre du spéculatif, combiner les éléments qu’elle accumule en leur donnant une suite significative. " Croire aux Images est le secret du dynamisme psychologique" écrivait Gaston Bachelard. C'est en effet le fait des mythes que d'être activés sans cesse par l'imagination. . Ceci permet de comprendre que l’expérience du mythe et du symbole se distingue de la pure production d’images quand elle met au jour une logique générale qui dépasse les ethnocentrismes. L'homme est un cosmos vivant relié à tous les autres cosmos vivants qui l’entourent. Ils lui révèlent sa propre existence et son propre destin. Pour travailler le système celtique, lui-même complètement référé à un espace très largement, mais pas seulement, européen, il faut l'aborder dans une dimension critique tenant compte de l'irruption dans le social de notre époque, des symboles que des siècles d'ignorance, de mépris ou de volonté d'occultation avaient tenus soigneusement cachés. Cette entreprise témoigne en tout cas de la prodigieuse vitalité d'une matière cachée, la religion des celtes étant par nature et par destination une religion ésotérique. C'est peut-être d'ailleurs pour cela que ses symboles et ses mythes ne cessent depuis maintenant trois millénaires, d'habiter notre imaginaire dans ses deux voies: le radical, celui qui tient à nos racines et le social, celui qui propose de nouvelles formes figures à la revivification du corps social. Les mythes appartiennent au logos socioculturel, sont des documents littéraires et culturels exprimant l’état de la société à un moment donné. Ils doivent être distingués des autres signes profanes puisqu’ils constituent, par excellence, une langue sacrée, reconnue comme la langue des dieux. Ils ne peuvent donc, être interprétés qu’à partir des expériences religieuses et initiatiques des celtes ainsi que des traditions qui leur sont liées. Y tient une large place la question de l'âme celte et des vecteurs de la sagesse qu'étaient les druides, ces hommes très savants, serviteurs de figures divines dont ils ont entretenu la mémoire en la réservant. De ce point de vue, l'ésotérisme des celtes semble bien avoir accompli un parcours exemplaire, dans ses périodes de grande diffusion, sur une aire de géographique qui va du cours supérieur du Rhin et du Danube aux îles occidentales. à l'extrême pointe de l'Europe, il a tour à tour visité des sites et des sociétés locales qu'il a fécondées de sa métaphysique. On s'en rend compte en étudiant des formations symboliques et théologiques aussi importantes que, pour prendre deux exemples très opposés, la théologie chrétienne trinitaire médiévale, et l'astrophysique contemporaine, sans parler de l'irremplaçable nostalgie de l'être qui continue d'inspirer nombre de nos poètes contemporains, de Saint-John Perse à Guillevic ou Glen Mor... via les surréalistes, et l'on se rappelle l'intérêt particulier porté par André Breton aux mythes et lieux des celtes. Une telle démarche passe, sous peine d'inefficacité, par une double exigence: - une revue des sources existantes: partant de nos connaissances sur la métaphysique traditionnelle des celtes, mettre en évidence les conditions d'émergence, puis de transmission (voire de transmigration) de leur doctrine, telle qu’elle a pu être révélée dans tous les lieux de l’immense domaine celte, dans leur cosmologie, les sciences traditionnelles, les diverses voies symboliques empruntées (initiation, supports concrets, traditions et coutumes, littératures, etc.) jusqu’aux modalités et conditions de réception observables aux diverses époques, et les travaux contemporains devraient, à notre sens, refléter cette diversité. - une perspective comparative, en convoquant autour de cette entreprise les apports certes souchés sur un tronc commun, d'ailleurs indo-européen, mais suffisamment divers pour être mentionnés: de la brumeuse Irlande aux celto-galates et aux traces laissées dans le grand espace celtique par les voies empruntées par les initiés de la religion des druides, d'hier à aujourd'hui. Nous savons aussi qu'elles empruntent une voie inversée par rapport à la plupart des quêtes ésotériques anciennes et actuelles, soit, pour ce qui nous concerne, d'Orient en Occident. Druides et druidisme, de fait, n'ont pas fini de nous fasciner. En témoignent non seulement la place que la bande dessinée et le roman leur accordent désormais, mais encore le fait sociologique contemporain d'une résurgence des mouvements néo-druidiques, lequel interroge la modernité. Aujourd’hui, en effet, le néo-celtisme contemporain est un des lieux d'actualisation de ces thèmes et de ces mythes, dans une visée dont il appartient à des études encore à mener de vérifier ce qui ressort du fantasme de maîtrise de la nature et de la véritable quête spirituelle. Le mythe est là aussi à l’œuvre, dans des formes qui sont souvent très éloignées de la théologie des druides de l’Antiquité, du moins pour ce que nous pouvons en savoir. Au service de cette myriade néo-tribale, ce ne sont pas moins de 81 revues et périodiques divers qui diffusent de nos jours, avec des fortunes diverses, la pensée celte sous des formes variées, de la société savante classique ou du mouvement traditionaliste aux groupements idéologiquement engagés, voire, pour d'aucuns, sectaires. Cela forme un vaste réseau dont le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il inscrit dans la réalité sociale et culturelle du vingtième et unième siècle s'ouvrant, une prodigieuse vitalité des mythes celtes. Sur la façon dont ils sont revisités, il y aurait bien des choses à dire, dans un aller et retour sans faille entre les figures animales héritées de la tradition, la science des nombres et les mouvements néodruidiques et néobardiques accourus des quatre coins de l’Europe en terre d’Armorique, souvent relayés par des medias en quête de sensationnel. Leurs manifestes laissent le plus souvent dans l'ombre une sagesse tri-millénaire, celle-là même dont nous devons explorer les arcanes. Cette tentative peut être résumée en sept points, et l'on sait que le sept est, dans la tradition celtique, symbole de l'achèvement d'un cycle. 1 L'accès au divin par mode de connaissance des mystères cachés : la religion des druides, dont les principes ne furent jamais écrits mais transmis par voie orale se prête à merveille à cette de démarche. Elle éclaire les chemins des passages entre le monde d'en deçà et celui d'au-delà , d'un Sid auquel tendent aujourd'hui ceux pour lesquels le "Temps devient théâtre grâce auquel les hommes se représentent les actes divins dont ils tirent la nécessité des rituels festifs" (Paul Verdier). * 2 Le refus d’inféoder sa recherche à un dogme contraignant : la tradition celtique laisse de ce point de vue de grandes libertés à ses fidèles, témoin la prolifération des voies actuelles et dont la multiplicité comme la convergence ne manque pas de frapper l'observateur: des métiers aux origine du compagnonnage jusque dans l'architecture romane et à la sculpture de saint Benoît sur Loire . En Bretagne la petite , comme à Glastonbury, le christianisme a sacralisé les lieux de la tradition en même temps qu'il se les appropriait. * 3 Le sentiment prégnant d’un englobant : la tradition celtique est tout entière marquée par la présence continuelle d’un ailleurs, le SID, paradis celte des îles lointaines, dont il faut aller chercher trace aux sources les plus anciennes, celles des traditions et littératures irlandaises, dans les figures sacrées du panthéon irlandais. * Pour accéder à leur connaissance, il existe un certain nombre de ponts, de passages, en des lieux marqués par le calendrier celtique qui assurent une communication constante avec les immortels. C'est l'apport puisé aux sources mêmes des terroirs bretons dans ce rapport tout à fait particulier que les celtes entretenaient avec les eaux, les sources, les fontaines et les lavoirs, et encore les travaux sur la maison bretonne. Pour aider les populations à fixer les caractères sacrés de ce complexe religieux initiatique, il faudrait également interroger les modalités et rituels de l'initiation celte comme les lieux sacrés où elle s'est toujours incarnée, les lieux souterrains, ces boves, qui de l'Asie Mineure au Pays d'Auge, font se rencontrer des parentés significatives au plan symbolique. * Dans la partie orientale de ce qui s'appelait alors Brocéliande en Paimpont, le pays des fées, on trouve encore de semblables références dans les solitudes boisées du Passais, autre haut lieu des rencontres de la religion des druides avec les premiers apôtres chrétiens, à mi-chemin des forêts du Perche et de celles de Paimpont, dont "bretons nous disent maintes fables", écrivait Robert Wace, au XIIème siècle. * 4 La nostalgie de l’unité perdue : elle concerne celle de la nation celte, dont le Roi Arthur est le symbole : "rex arturus rex futurus", et nous avons observé la tension entre les forces d’universalité présentes dans la référence à la tradition celtique universelle et les tendances à la mise en évidence de particularités rituelles, inscrites, par exemple dans les contes populaires. La tradition celto-chrétienne dont on sait la fortune qu'elle a subie au Moyen-Age, n'a jamais cessé pour autant d'entretenir le souvenir de l'Ile aux Fées et de ses vergers sacrés de Pommiers d'Or, comme des paysages lacustres irlandais hantés par la figure archétypale du serpent-dragon, gardien des eaux primordiales. * 5 La négation de l’histoire : nous sommes ici dans un espace-temps régi par des impératifs qui visent à réintroduire les celtes dans le Grand Temps, défini par le mécanisme de la précession des équinoxes et dont le calendrier celte est le marqueur. Les fêtes celtes, aux quatre portes de l’année (1er Février : Imbolc, 1er Mai : Beltaine, 1er Août : Lugnasad, 1er Novembre : Samain) inscrivent dans une cyclicité la certitude du retour des choses à leur place attendue dans l’ordre cosmique et astronomique. Les rituels employés, dans des espaces forestiers censés représenter la nature sauvage, comme les symboles qui s'y rattachent, renforcent cette immersion au creux de l’immanence. Les rituels festifs rendent sensibles en même temps qu'ils les socialisent ces quatre tournants de l'année réfèrés aux sources irlandaises eux-mêmes en rapport avec les divinités celtiques.. * 6 La nature et ses rythmes jettent ainsi un défi que les druides comme les mouvements ésotériques contemporains ont toujours à cœur de relever à l'encontre d'une technostructure englobante coupant les individus de leurs racines. La civilisation gallo-romaine ne participait-elle pas ainsi du même combat que nos modernes étranges lucarnes à l'encontre d'une civilisation ? . Ici l'imaginaire l'emporte largement sur les réalités historiques. Cette résurgence celtique originée d'un courant culturel et symbolique auquel ont appartenu à d'autres époques également la mystique franciscaine et le romantisme, pour être ténue et souvent peu perceptible n'en constitue pas moins un fondement, une matrice de significations. Elle peut et doit être questionnée dans les perspectives de l'anthropologie symbolique. , par exemple à quel point le symbole sacré de la tête coupée est-il présent dans de multiples aspects de la mythologie celtique comme dans les littératures médiévales? C'est le mystère de la vie, de la mort et de la régénération de l'être, au cœur de la question de l'âme celte? * 7 Une expression réservée pour un imaginaire instaurateur: il s'agit d'une religion qui ne s'est transmise, chez les druides, que par tradition orale dans un rapport de maître à disciple extrêmement coûteux en temps et en efforts intellectuels (l'apprentissage des druides ne durait pas moins de vingt ans), ce qui, entre parenthèses, disqualifie ceux qui ne voient dans la voie ésotérique qu'une facilité de l'esprit. Le celtisme trouve encore à s'exprimer dans les langues des celtes, dans une variété d'écriture, l'ogam, à vrai dire moins utilisé pour transmettre des traditions sacrées que pour participer aux présages, dans les langages populaires: rituels, coutumes, contes, légendes et jusqu'aux marques de tâcherons de l'architecture vernaculaire celte. Les uns et les autres nous enseignent le rapport entretenu par les celtes aux lieux qu'ils investissaient, et l'on voit qu'à côté des grands textes, près des savantes combinaisons des théologiens soucieux de ne pas laisser s'évanouir cette sagesse, ces hommes obscurs qui s'appelaient milliers, et que l'on nomme le peuple, ont toujours su, dans leurs accomplissements pratiques, préserver l'essentiel en constituant un réservoir d'images traditionnelles qui ont nom fées, sirènes, entrelacs, triskele. .ls nous permettent d'actualiser l'aphorisme de Marc Bloch, estimant que les peuples de haute civilisation, lorsqu'ils étaient vaincus matériellement et militairement, parvenaient toujours à subjuguer spirituellement ceux qui les avaient vaincus. L’analyse du contenu de l'imaginaire des celtes, auquel le site de l'Arbre Celtique participe révèle ainsi un ordre cohérent de liaisons et de valeurs métaphysiques constitutif de ce qu’il y a de plus profond dans l’espèce humaine. Il rend visible les données d'une révolution anthropologique occultée. Comme l'écrit Gilbert Durand, "les impératifs imaginaux qui envoûtent la conscience, l’investissent d’un sens vécu, des épiphanies numineuses qui font de la valeur qu’éprouve ou que manifeste la psyché individuelle ou collective, une réalité plus profonde que les faits ou les idées que constate l’entendement". Dans cette tâche collective, nous devons conserver ouvert, comme heuristique, l’abîme de la contradiction, tant la matière ici travaillée nous a permis de retrouver un modèle triadique, entre nature, imaginaire et symbole, au mépris des rationalités les mieux établies dans leur traitement de l'apparence car " ce qui fait que l’homme est l’homme, nous enseignait Cornélius Castoriadis, n’est pas qu’il est raisonnable ou rationnel, car il n’y a pas d’être plus fou que l’homme". Au cœur du sens caché de la matière celtique, cette incursion nous mettra toujours sur le chemin de l'éblouissement que procure l'accès aux choses sacrées dont nous voyons qu'elles n'étaient jamais coupées, dans la sagesse des celtes, des images du quotidien. Elle nous a ainsi fait participer d'un combat, sans doute un des seuls qui vaille encore d'être aujourd'hui mené, nous amenant à contribuer à ce que Gilbert Durand nomme une anthropologie fondamentale, soit, "une science des dieux, lesquels nous renseignent seuls sur nous-mêmes." Sagremor le Desréé.
"l'homme est l'ambiguîté paradigmatique, la multiplicité antagoniste, le paradoxe créateur". G Durand.
Hello
Une telle approche des éléments d’analyse de la matière celtique est certes séduisante, elle se heurte à quelques aléas, dont le premier, et de taille : le « je ». La constitution du « je » s’articule sur un langage à trois niveaux : (Ici le « je » est le « je » énonçant sa réflexion sur le monde celtique) - Celui du Réel : Le réel de nos connaissances : les sources sont souvent partielles et partiales. Interprétation romaine interprétation gauloise, interprétation occidentale moderne sur un passé depuis longtemps révolu. Le réel de la structure socio-culturelle dans laquelle ces éléments sont interprétés. Inutile de disserter sur une société dont la vision de la nature s’éloigne (phénomène actif) de celle de Spinoza. - Celui de l’Imaginaire Gilbert Durant déplorait la dévaluation de l’imaginaire (ainsi que de la rhétorique) dans notre société. Implicitement, l’imaginaire individuel est conduit à suppléer aux carences de l’imaginaire collectif. Quelle aubaine que ce monde celtique : tout est fourni. Mais l'étude de la matière celtique est le parangon de ce qu’est l’étude des civilisations anciennes : une étude difficile, mais se doit de rester stricte et argumentée. En aucun cas on ne peut affirmer : Aujourd’hui, en effet, le néo-celtisme contemporain est un des lieux d'actualisation de ces thèmes et de ces mythes. Je ne nie pas un imaginaire néo-celtique, je nie un néo-imaginaire celtique. - Celui du Symbolique Carnéade énonçait : « la représentation non compréhensible est liée inéluctablement à d’autres représentations non compréhensibles, et constitue avec elles une chaîne ». Cette notion, bien plus tard devenue lacanienne, que le sujet véhicule une représentation sans que cette représentation s’adresse à lui, est celle du signifiant. Le symbole s’articule dans l’analogie entre le signifiant et le signifié, ce à quoi renvoie le signifiant, mais qui, dans l’inconscient, est inarticulable. L’indistinction (sens lacanien du terme) entre les représentations symboliques individuelles et des représentations communes, que l’on qualifierait plutôt de synthèmiques que de symboliques, permet certes l’énonciation d’un nouveau langage, mais ne permet pas de restituer un langage disparu. Cette chaîne de représentations est rompue, et si l’on peut tenter d’analyser l’ésotérisme, la parole de l’ésotériste (d’emblée faussée… par contamination !) ne peut s’exprimer. Ces pistes d’analyse sont bien évidemment à prendre en considération : anthropologie de l’imaginaire, analyse de l’ample tissu symbolique, tentative d’analyse ethno-psychiatrique…. Plusieurs angles de vue. Mais seule la confrontation aux éléments objectifs dont on dispose, en tentant de pas être dupe de ce qui nous aliène, peut nous permettre d’avancer. Pierre Bayle l’écrivait en 1682 dans Pensées sur la comète : Les gens d’étude, qui devraient être la lumière des autres, suivent beaucoup plutôt ce torrent là (celui de juger de tout sur les premières impressions des sens et des passions, sans attendre un examen plus exact, mais aussi un peu trop pénible) qu’ils ne le détournent dans le chemin des véritables savants. A+ Lopi gnon
la confrontation aux éléments objectifs!Merci de cette réflexion très pertinente, mais..: "L'homme est fait de mystères, pour les mystères et la vision, la réalité, c'est le surnaturel." écrivait Arthur Machen, et plus près de nous Michel Maffesoli :" l'existence est éclatée, polysémique, constituée d'ombres et de lumières, en un mot faite par un homme à la fois sapiens et demens".
Vous aurez compris que je ne crois pas à l'objectivité, pas plus sur la matière celte que sur d'autres sujets : toute recherche est datée, liée à son contexte de production, produite par les représentations des sujets cherchant, leur idéologie, le taux d'indexicalité qui préside à leur expression, leurs savoirs et leurs fantasmes intimement mêlés... La position positiviste n'est pas moins imaginaire que celle des néo celtisants ou même des celtomanes. Ce qui m'intéresse c'est justement, sur un thème comme le nôtre, de confronter ces imaginaires à l'oeuvre (celui de la rationalité en actes et celui de la vision poètique de l'univers) dans leur émission et aussi les conditions de réception d'une matière dont, je vous l'accorde bien volontiers nous ne savons que très peu de choses . Ce qui est passionnnant dans la matière celte, à bien des égards, c'est qu'elle constitue une transversalité où se confrontent, le su et le joué, le dit et le non dit, le social et le psychologique, le culturel et le mythique...; Mais pourquoi reprend elle de nos jous à ce point force et vigueur? ![]() ![]() Sagremor le Desréé.
"l'homme est l'ambiguîté paradigmatique, la multiplicité antagoniste, le paradoxe créateur". G Durand.
C'est vrai. Il y a peut-être dans l'ambition de connaitre scientifiquement la civilisation celtique, et plus encore l'imaginaire celtique, comme une contradiction dans les termes.
La connaissance scientifique, dont se réclament beaucoup de gens de l'Arbre celtique, relève d'une mentalité particulière à notre civilisation moderne, héritée du "miracle grec", du juridisme romain et du judéo-christianisme. Cette mentalité, qui nous semble la seule juste parce que nous sommes immergés dedans, est en réalité comme une "anomalie" par rapport à la mentalité traditionnelle (aux mentalités traditionnelles) dont relèvent toutes les autres civilisations. Pour toutes ces civilisations, l' "Autre Monde", le monde du sacré, est une réalité, bien plus vraie que le monde de la matière, souvent qualifié d'illusion. Prétendre à l' "objectivité" dans la connaissance du monde celtique, c'est déjà s'illusionner, puisque l'observateur est empreint de ses propres préjugés et idées reçues. Tout au plus aura-t-on connaissance des aspects matériels et concrets de cette civilisation, et c'est d'ailleurs ce qui explique l'importance de l'archéologie dans les études celtiques, et le refus de la plupart des archéologues (pour ne pas dire la totalité), d'envisager autre chose. Ceci dit, Sagremor, relativiser l'objectivisme moderne ne doit pas conduire à abdiquer tout sens critique, et à accepter toute dérive sectaire, paranoiaque ou illusoire. Dans la mentalité traditionnelle, certaines forces aspirent vers le haut, le divin et le non-manifesté, quand d'autres attirent vers le bas, l'animalité et les Enfers... Fergus
-------------- - Ceist, a gillai forcetail, cia doaisiu mac ? - Ni ansa : macsa Dana, DÃ n mac Osmenta, (...) Ergna mac Ecnai, Ecna mac na tri nDea nDÃ na Extrait du Dialogue des Deux Sages
Par exemple la linguistique et l'étude des textes irlandais. Guyonvarc'h (et d'autres) répètent que les textes irlandais, même "tardifs" (manuscrit du XVIIe siècle pour au moins l'un d'eux) reflètent des traits de civilisation et de comportements très anciens, proches du début de notre ère. La lecture de la Razzia des vaches de Cooley ou le Dialogue des deux sages (Guyonvarc'h) sont de bons exemples de cet archaïsme. mikhail
Très bonne question ! Les réponses sont probablement multiples : desserrement du carcan culturel version XIXe et XXe siècles, effacement de l'importance de la "politique politicienne" en deux grands blocs antagonistes, mondialisation culturelle qui nous montre la diversité possible, résurgence de nos racines culturelles indo-européennes et des mythes médiévaux de Chrétien de Troyes.... A propos de la "dépolitisation" des Français, un éditorial récent d'Ouest France disait que cette "politique" n'intéressait plus les gens, mais qu'il la pratiquaient véritablement au niveau le plus élémentaire : associations, ville. Continuez la liste des réponses possibles ! Je n'ai pas cité l'effacement progressif des grandes religions, dont les fidèles ont tendance à ne garder que ce qui les arrange et non plus tout ce que décrète l'infaillibilité papale... Il s'agit là , comme pour la politique, de sujets hautement polémiques. ![]() mikhail
Hello
« Tout sentiment d’un individu diffère du sentiment d’un autre autant que l’essence de l’un diffère de l’essence de l’autre » Spinoza Ethique, III, prop. LVII Le mode de représentation des faits observables dépend bien entendu de la philosophie globale véhiculée dans le système plus général socio-culturel dans lequel il est ancré. L’étude scientifique (quelque soit ce que l’on met dans ce terme science, et ce terme et son contenu ont une histoire..…) a ses propres règles, ces règles qui permettent aux sentiments d’être mis à mis à l’écart. Dans notre schéma actuel (inspiré des grecs et réintroduit en Europe occidentale par l'intermédiaire des traducteurs et commentateurs arabes des textes anciens), plusieurs modes de représentations scientifiques s’offrent à nous. Sagremor semble être plutôt adepte des théories épistémiques selon Michael Devitt (Oxford 1991) ou d’un réalisme théorique selon Ian Hacking (Cambridge, 1983). Ces voies d’abord sont assez périlleuses, et il faut être vigilant pour ne pas déraper... Et si Alain affirmait qu’on se fatigue à être platonicien, il faut rallumer la lumière pour faire des études… L’imaginaire néo-celtique peut certainement être étudié, et pour ne pas créer de confusion, il faudrait créer un autre terme… Quant à l'imaginaire tout court, qu'elle place lui fait-on aujourd'hui? A+ Lopi
"... … Quant à l'imaginaire tout court, qu'elle place lui fait-on aujourd'hui ".
Il suffit de regarder les enfants : - l'un pousse les nuages du doigt, - l'autre tend la main aux bateaux qui passent à l'horizon, etc ... C'est de l'imaginaire pur parce que nul ne leur a dit que c'était de l'Imaginaire. L'Imaginaire des adultes n'est souvent que convenances à des modes ou à des idéologies enseignées. Ce n'est donc plus de l'Imaginaire. JC Even ![]() "Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
Hello,
Certaines idéologies ou ce qu'on veut laissent plus de place que d'autres à l'imaginaire, à l'homme tout simplement. Restons en là dessus, ne parlons même pas du désir.... A croire que seulement quelques créateurs reconnus ont le droit de s'exprimer ainsi! Quant aux autres qu'ils restent un... C'est où le diplôme de créateur? Bonsoir. Lopi
"....Je bondis..." ![]() Qui prétend à l'objectivité ? ![]() Il suffit de lire la plupart des spécialistes de la Protohistoire pour convenir d'une extraordinaire prudence liée aux incertitudes de la matière. La plupart des scientifiques sont conscients des limites de leurs recherches et précisément de cette part d'influence subjective liée à la position particulière de l'observateur. Le domaine de l'histoire des Celtes est d'autant plus sensible que l'on est bien conscient désormais des manipulations historiques (du moins celles du XIX° siècle). La méthode, la rigueur, l'exposé complet des sources n'autorise certes pas à la prétention de la détention de la vérité mais ça aide quand même à la découverte et à la compréhension et pas seulement du seul matériel, et je ne crois pas que la démarche scientifique soit un pur produit uniquement issu de la très corrompue civilisation greco-latine, (celle-ci étant très étrangère et sans aucun rapport,comme chacun sait, avec la mystérieuse civilisation celtique - le vase de Vix n'est pas grec, les Statères ne sont pas de Philippe et les inscriptions ne sont pas en alphabet grec, étrusque ou latin ) La place de l'archéologie dans le études celtiques ? trop ? Ca c'est sûr, il ya tellement de sources écrites contemporaines.....; d'ailleurs comme il n'y a pas de budget, pas de projet, aucune volonté politique, rassures toi, si on a pu faire quelques découvertes ces dernières années, elles ne seront que de brillantes exceptions.... La phase "materialis horribilus" prend fin rassures-toi et les archéologues se réservent pour l'Egypte au mieux, la Romanité au pire Enfin, la cerise sur le gâteau, le refus des archéologues, allez disons plutôt des prétentieux matérialistes d'envisager autre chose..... Autre chose ? la littérature irlandaise, beaucoup de protohistoriens y font référence et annonce une certaine défiance à l'idée de calquer des éléments de la société irlandaise du haut moyen âge sur l'antiquité continentale, c'est vrai. Il s'agit souvent d'une remarque de prudence liée au décalage historique. Certains se privent de façon évidente parfois brutalement et injustement de pistes de réflexion et d'interprétation mais celà ne doit pas condamner pour autant et à priori l'intérêt qui peut s'attacher à leurs découvertes... Et surtout j'aimerais, quant à moi, lire chez les plus lumineux des linguistes ou "historiens des religions" ou autres spécilistes celtologues en études celtiques quelques questionnements un tant soit peu historique, une ligne, parfois de référence à une découverte. Trouver de temps en temps une démarche un peu interrogative, reconnaître de temps à autre la faiblesse d'un argument liée à une démarche comparative laborieuse..... Finalement le meilleur moyen d'avoir sa vérité ultime et lumineuse, c'est de ne pas être contredit et surtout d'aborder les choses de son seul point de vue, donc chacun dans son domaine et les vaches seront bien gardés... Les Celtes n'ont pas fini d'être mystérieux, tiens, tu me diras ça fait marcher le commerce babacoolique-new age, m'est avis qu'Hollywood tient là son nouveau far-west.....
Tu n'as pas lu Dumézil ? Rassure-toi, personne ne le lis : c'est trop touffu, trop ardu, et personne n'a le temps. Je t'informe donc qu'il a passé toute sa carrière à remettre en cause ses propres interprétations, découvertes, théories, hypothèses, à reconnaître parfois s'être trompé. Je note les guillemets autour des "historiens des religions", cette "science" étant bien entendu suspecte par nature... Jamais de référence à une découverte... archéologique, je suppose ? Pas assez, sans doute, tout comme les références aux textes chez les archéos. C'est bien dommage.
C'est justement contre quoi je m'élève. Il n'y a plus, aujourd'hui, de véritable esprit transdisciplinaire. Moi le premier, j'ai du mal à m'intéresser aux domaines archéologique ou historique pur. Et quel archéologue a lu (et prend en compte) les travaux de Dumézil, d'Eliade, de Benveniste, et autres ? Fergus
-------------- - Ceist, a gillai forcetail, cia doaisiu mac ? - Ni ansa : macsa Dana, DÃ n mac Osmenta, (...) Ergna mac Ecnai, Ecna mac na tri nDea nDÃ na Extrait du Dialogue des Deux Sages
Voilà qui est bien exprimé, Fergus, en tous cas c'est l'impression, le gêne presque, que peut ressentir un visiteur quasi néophyte comme moi. La transdisciplinarité semble effectivement une direction souhaitable de progrès dans la matière qui nous concerne ici. Sagremor, Tu écris bien avec beaucoup de citations et un vocabulaire plaisant. Il me semble cependant que ton exposé devrait et pourrait se résumer pour faciliter les argumentations. Les auteurs que tu cites ne se reconnaitraient pas toujours dans ton contexte. Quelques points : - Invoquer la positivisme pour caricaturer l'attitude rationnelle, n'est pas convaincant. Si nous nous comprenons bien, je crois qu'ici personne ne se réfère au positivisme, n'est-ce pas Mikaïl ? Personne ! L'attitude scientifique, à laquelle j'adhère complètement, est tout de même plus élaborée. - Aujourd'hui la rationalité scientifique se définie à partir d'axiomes qui expriment les plus grandes évidences que l'esprit humain conçoit et accepte, par exemple l'idée d'ensemble et les manipulations qu'on y associe. La combinaison de ces "postulats" permet de construire des modèles puis des théories. Vient ensuite la confrontation avec le réel et là la question devient difficile pour notre propos. J'ai cru comprendre que pour toi le réel est aussi fait ou est "surtout" fait, des produits de la pensée. Moi j'accepte l'idée que la réalité n'est pas qu'un produirt de la pensée mais que ce "produit" en est un constituant seulement. Le monde n'est pas qu'un rêve. Par ailleurs la pensée est cet attribut donné à l'homme, disons par la nature, pour l'adapter à la vie en approchant plus ou moins la réalité de la nature, en se représentant , plus ou moins bien, la réalité de la nature. C'est là que je n'adhère pas à ton discours. Toutes les représentation du monde n'ont pas la même validité. L'approche scientifique montre son efficacité, en effet elle est vérifiable, elle est consensuelle, elle est "prédictive". Ce dernier point est essentiel pour valider, certes toujours provisoirement, un modèle ou une théorie scientifique. Une théorie scientifique est d'autant plus valide qu'elle permet d'expliquer, de prédire et de "construire". La prédiction dont il s'agit ici se doit d'être vérifiable comme l'aparition d'une comète ou la tripartition dans une société (?) L'attitude ésotérique, celle qui consiste à admettre comme valide les sens cachés d'une doctrine, est tout à fait contraire n'est-ce-pas ? Les productions de l'esprit en ses rêveries, ses intuitions, si elles ne sont pas confrontées au réel, si elles ne s'insèrent pas dans une théorie, si elles ne subissent pas des confrontations expérimentales, alors que valent-elles ??? Ces productions de l'esprit peuvent-elles, doivent-elles, structurer les êtres humains pour guider leur vie? L'Histoire répond, je crois. Le rêve, la poésie, les arts, ont d'autres vertues., à mon avis. Cordialement
J'ai parcouru quelques-uns de ses 60 livres, parmi les derniers remaniés, et aussi un peu des milliers d'articles qu'il a rédigés. Il écrivait pour ses confrères, non pour des lecteurs non spécialistes comme moi. C'est pourtant lui qui a exhumé "l'idéologie trifonctionnelle des indo-européens" et il faut bien lire au moins "Mythe et épopée", voire aussi "Loki" faute de quoi, à mon avis, on ne peut pas comprendre le fonctionnement des sociétés antiques celte, romaine, germanique, et partiellement grecque. Je veux dire par là qu'on risque de plaquer le fonctionnement de la société actuelle sur ces sociétés antiques, ce qui biaise immédiatement le débat sur ce forum... Qui n'a pas lu les livres de Le Roux et Guyonvarc'h, au minimum "Les Druides" ne mérite pas non plus d'intervenir valablement sur ce forum. La lecture --et la méditation-- de René Guénon, ou de Coomaraswamy est également très fortement conseillée. Il est vrai que la spiritualité est bien déchue de nos jours. Cela n'exclut pas la lecture des linguistes, des historiens ni celle des archéologues. Tout ceci pour un minimum de transdisciplinarité et pour une perception la plus large de ce qu'étaitent --vraiment !-- les sociétés antiques. Au lieu de plaquer ce que l'on croit savoir sur les Celtes. mikhail
Bonjour
![]() Il y a quand même un problème en la matière : Lorsque Bruneaux tente quelques interprétations il se prend une volée de bois vert de la part de ses pairs, c'est tout juste si on ne le traite pas de fantaisiste. ![]() Pourtant une véritable attitude scientifique est d'émettre des hypothèses, de les confronter, de les infirmer ou confirmer. Si l'on ne commence jamais il ne s'agit plus que d'un travail d'archiviste, exact certes en ce domaine, mais peu fertile. Nous nous retrouvons alors à la merci de "scoop" venant de la transdiciplinarité comme celui de Renfrew et l'on se met alors à fouiller dans les archives de manière émotionnelle pour tenter d'infirmer ou de confirmer (rarement), la nouvelle théorie. De plus ce même problème se retrouve à l'intérieur de la discipline archéologique. Un archéologue rencontré cet été et qui travaillait un site depuis plus de trois ans ; à ma question : - Avez-vous publié des résultats sur papier ou sur le net ? M'a répondu : - Oh là là ! J'attends d'être sûr de chez sûr, sinon je me fais descendre ! La vie universitaire n'est pas un long fleuve tranquille... ![]()
Tectosage, Tu sembles parler des religions et de leurs dogmes, mais il existe autre chose dans le domaine de l'esprit où ce que tu nommes "esprit scientifique" est appliqué. D'ailleurs, à l'origine de la recherche expérimentale qui a donné les sciences et techniques modernes, n'y a t-il pas quelques spagyristes (Newton par exemple) ? Ils avaient choisi d'expérimenter dans le domaine naturel et physique ce que les alchimistes médiévaux expérimentaient "in spirito" et "dans" le monde. L'occident a choisi Avéroes plutôt qu'Avicenne, l'on peut penser que le "matérialisme" moderne vient de ce choix, prélude au conflit auquel nous assistons encore une fois entre deux interprétations du Livre. Caïn va-t-il tuer son frèrel encore une fois ? ![]() Pourquoi mettre les arts dans un domaine particulier, un ailleurs ? Vinci est une figure emblématique de l'alliance entre la recherche spirituelle, les arts et la recherche scientifique et il n'est pas l'exception qui confirme la règle... ![]() Muskull, touche à tout et bon à rien ! ![]() Muskull / Thomas Colin
Comme l'eau modèle la terre, la pensée modèle le possible. http://muskull.arbre-celtique.com/ http://thomascolin.fr
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