Alcool gaulois

[Muskull]

Bonjour,
A défaut de la légende associée au musée, inutile de battre la campagne. Un breuvage psychotrope aurait été bu à la même coupe et l'objet principal du "set" a un bec verseur. Il est aussi signalé une coupe unique qui circulait dans certains banquets et qui ne devait jamais être vide.
Pourquoi pas une "dînette" cuite par un potier pour son enfant ?
Même si l'on n’habillait pas encore les filles en rose et les garçons en bleu, l'on a retrouvé des traces de jouets dès le paléolithique.
La divinité humaine cornue au cornes de cerf est gallo-romaine. Les représentations cornues laténiennes sont diverses...

[Séléné.C]

Qui dit "dinette" dit coutume de repas en commun suffisament ancrés pour que cela devienne l'objet d'un jeu...


La divinité romaine aux cornes de cerf = je ne parle, sur l'autre sujet, que du cornu du chaudron de Gundestrup, Muskull... A l'exception de toute représentation gallo-romaine qu'elle soit à cornes de taureau, de bélier ou de cerf. Ledit chaudron porte bien un "cornu-cerf", non ?
(d'ailleurs c'est sur l'autre sujet qu'on parlait de dieu-cerf, pas ici... J'avais peur en ajoutant la question sur les ivresses "hors-banquet" de disperser le fil, je me vois dépassée !)

[Alexandre]

Qui dit "dinette" dit coutume de repas en commun suffisamment ancrés pour que cela devienne l'objet d'un jeu...

Les repas en commun sont aussi vieux que la chasse. Un gibier un tant soit peu conséquent ne se chasse pas seul, en tout cas quand on tient à la vie.

[Séléné.C]

Très juste... Mais il peut se partager et qu'ensuite chacun bouffe sa viande séchée dans son coin, en chacun le lapin de garenne jusqu'à la prochaine expédition de chasse au cerf...

Par contre, il peut être plus sécurisant d'être en groupe pour se défendre contre les ours, les loups et autres bestiaux éventuellement dangereux.
Mais jouer à la dinette, ça peut se faire aussi bien avec des ustensile tout à fait improvisés et (sorry c'est l'écrivaine qui laisse son imagination se mettre en route peut-être?) à la préhistoire, j'imagine plutôt les enfants employer des bouts de bois comme morceau de viande et des feuilles comme gobelets (quand j'y pense, c'est ce que je faisais quand j'étais môme, pour jouer dans le jardin, ça... Avec des pierres comme assiette.)

Concernant cette photo, on ne saura rien, je crois. On n'a aucune idée des analyses qui ont été faites sur ces objets, ni rien.
Si on revenait aux boissons antiques ?

[ejds]

Distillation alambiquée, macération, fermentation… mais quel pourrait donc être ce probable breuvage et pris en quelles circonstances ?

Michel Le Goffic résume en quelques lignes la découverte dans un catalogue du Musée Breton de Quimper, de cet ensemble de service composé de six pièces dans un souterrain d’un oppidum ossisme d'une vingtaine d'hectares de l'Age du Fer de Tréglonou, à Kerellen en Aber-Benoît (Finistère Nord) :

C'est dans le remplissage du puits d'accès que furent découverts, parmi le lot habituel de tessons de poteries, de broyons, fragments de meules, fusaïoles et autres rebuts de l'époque, un gobelet cylindrique associé à cinq petits godets cylindriques très frustres et constituant un véritable service ayant pu être utilisé pour les libations.

Michel Le Goffic,
Archéologue départemental.

Puis en menu détail illustré dans un article paru dans le Bulletin de la Société préhistorique française, volume 82 :

Le site de l'Age du Fer et les perles d'or de Tréglonou (Finistère),
Michel Le Goffic, Christiane Éluère, Alain-René Duval, 1985, pp. 510-533, p. 515 :

— « Manifestement ces petits godets ont été conçus pour un même usage, pourquoi pas des libations ? Telle est l'hypothèse émise par J. Déchelette au sujet de petits vases découverts dans des nécropoles hallstattiennes. »

[Séléné.C]

Le gobelet a effectivement des parois beaucoup plus fines que les mini-gobelets, et son fond également...

Et donc, c'est à dater de l'Age du fer, au final...

Libations = donc un service à offrandes ? Pourquoi pas... Mais que devient le contenu du gobelet ?
Ejds avait posté cette photo à propos de la question de "petits contenant pour substance potentiellement dangereuse si excès". Dans l'hypothèse où le contenu des gobelets est répandu ou laissé évaporer, on s'éloigne de la consommation humaine.

[Alexandre]

Une libation consiste à répandre le produit par terre. Ça résout toutes les questions quant à savoir ce que devient le contenu du gobelet, non ?

[Séléné.C]

C'est exactement ce que je dis.
On sort des questions de consommation humaine et des éventuels dangers d'une liqueur psychotrope.

Mais l'idée d'un service de vases à offrandes, en soi, ne me dérange pas... En Asie, il y a des siècles de petits services de 4 gobelets ayant chacun un rôle différent (mais l'offrande consiste à les remplir, non à les vider).
Au passage : le fait de laisser un vase rempli d'un liquide à disposition d'être immatériels ou du moins invisibles se retrouve dans certaines vieilles légendes de Bretagne (et sûrement d'autres régions).
Et le chiffre 5, celtiquement parlant, m'évoque illico le nombre des "points cardinaux celtes" (les 4 directions plus le centre). S'il y avait 11 petits gobelets, ou même juste 6 je me gratterais sûrement plus la tête.

[Tri_Canauos]

Ici , localement il existe de petits hydromels artisanaux... Je ne sais ce que pouvaient être les vins Italiens de l'antiquité, mais je puis vous affirmer qu'ils tapent beaucoup plus fort qu'un vin Rhénan. Surtout s'ils ont vieillit un an ou deux.

[Séléné.C]

Remonte en début de fil... Il en a été question

[ejds]

Nouvelle visite au Musée où les choses n’ont pas bougé.

Le modeste service à gobelets de Tréglonou est toujours à la même place. Placé dedans ou près d'une urne funéraire, aurait-t-il pu servir à contenir de l'eau, du lait, de la bière, de la cervoise, du vin, un mélange herbal, une espèce d'eau-de-vie... comme accompagnement dans l’Autre-Monde ? Car il était de coutume, de laisser au défunt (qu’il soit en bas âge, adolescent fille ou garçon, adulte homme ou femme), selon son importance, son mérite, les circonstances de son décès… , la panoplie préférée de ce qu’il aimait durant son vivant ou faisait comme hobby ou métier : ses jouets, ses instruments de musique, ses plus beaux vêtements, ses bijoux, ses armes, sa nourriture ou boisson...



Pour reprendre la légende du service de gobelets du Musée Départemental Breton à Quimper :

LA PROTOHISTOIRE
L'AGE DU FER

LA DÉCOUVERTE DE TRÉGLONOU

A l'Âge du Fer, l'ouest de l'Armorique se distingue par deux particularismes : la réalisation de stèles en granit et le creusement de souterrains à proximité de lieux habités. Cette pratique a duré du Ve au IIe siècle. Ce collier et ce service à libations (?) furent découverts par le Service Départemental d'Archéologie dans un souterrain du Ve siècle à Tréglonou. Le collier d'or reste à ce jour sans équivalent en France.

Collier
Or
Inv. 889.1.1.

Service à libations (?)
Terre cuite
Inv. 986.18.2.

Voici en compendium, quelques précisions, interprétations et illustrations dans l'ouvrage de Joseph Déchelette, Manuel d’archéologie préhistorique celtique et gallo-romaine, deuxième partie, premier âge du fer ou époque de Hallstatt, Librairie Alphonse Picard et fils, 1913, 910 pages, pp. 810-12 (errata concernant les illustrations fig. 304 et 305 : lire fig. 324 et 325) :

— « Une particularité commune à la plupart des trouvailles céramiques du premier âge du fer, c’est la présence de petits vases, coupes ou tasses de dimensions parfois minuscules associés aux urnes funéraires. Il arrive fréquemment qu’ils sont placés à l’intérieur des urnes, lorsque celles-ci contiennent des cendres.
Ce cas est fréquent dans les tumulus d’Unter-Lunkhofen, canton d’Argovie (fig. 304). On retrouve ce rite à la même époque, sur une zone très étendue, par exemple en Bavière, en Lorraine, en Belgique, et dans les Basses-Pyrénées [...]. »

— « Le Comte Goblet d'Alviella a émis l'hypothèse que les petits vases auraient reçu les cendres de nouveaux-nés, brûlés en même temps que la mère, sans doute à la suite d'immolation rituelle.
Nous croyons que ces coupes en terre correspondent aux coupes de métal pour libations que renferment souvent les tombes hallstattiennes [...] » :

Dans le même ouvrage, illustration 254, plus étonnante est la découverte faite dans une sépulture ; et qui, d’après l’armement (épée, lance…), tordu au feu du bûcher, et enroulé autour de l’urne funéraire, correspond à l'évidence à celle d’un guerrier :



1. D’après E. Piette et G. Sacaze, Les tumulus d'Avezac-Prat (Hautes-Pyrénées), Mat., 1879, p. 499, pl. X.

[Séléné.C]

Ouille... Y-z-ont dû avoir du mal à la mettre en place sans amocher l'urne, cette lance !

Dans tout ça, on avance vraiment pas beaucoup sur les alcools... Les gobelets étant peut-être des jouets ou ayant un nombre peut-être seulement honorifique et une taille rituelle .

Mais c'est sympa de nous avoir mis des idées nettes sur l'etiquette du musée (et pas que)

[Muskull]

Une recherche très intéressante ejds !
Il est effectivement possible de voir une analogie entre ces vases à cupules et les cupules du musée de Quimper.
Pour ma part je n'ai jamais vu d'analyse de semblables objets funéraires. Mais on peut aussi les rapprocher des "services à boisson" (cratères et gobelets) en taille réelle qui se trouvaient dans les tombes des princes du Hallstat pour les festins de l'autre monde.
Une représentation symbolique pour des chefferies moins riches ?

[Séléné.C]

Ou tout symplement un "petit format" pour les sépultures à incinération pour lesquelles on a creusé un petite fosse...

[ejds]

Au moins, les petits princes et princesses de l’aristocratie armoricaine de la Côte des Légendes en pays des Abers semblent nous rappeler qu'on peut trinquer, et qu’ici bas ou dans l’au-delà, l'adage, la panacée pour une longue et heureuse existence : "L'abus d'alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération".