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Le silence et le GraalModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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Le silence et le GraalJ'aurais aimé pouvoir placer cette question sur un autre forum mais Â
J'ouvre donc une nouvelle branche au bel arbre de Guillaume  Pourquoi le fait que Perceval n'ait pas posé de question lors de sa vision du cortège du Graal a fait que toute l'aventure a échoué ?  Y a-t-il un rapport avec le geiss (sorts jetés en général par des femmes) et sous quelle forme  Trouve t'on ailleurs dans le "liber celticus" des éléments qui s'en rapprochent  Bref, pourquoi Perceval est resté "spontus" ( pour Sed) Muskull le "brancheux" Â
Le silence et le GraalSpontus sur mon dico qui va bien : effrayant, affreux
Mais il n'a été que muet Perceval, Bah certainement un mauvais dico Disons  que ce fut la grande erreur de Perceval, en fait cette clé signifie : Pour atteindre le Graal, il faut poser des questions Eh Muskull, t'es sur la bonne voie Â
Le silence et le GraalPas mauvais du tout mais c'est celui d'un breton lettré, chez mes antécédents du Pen ar bed, ils utilisaient ce mot pour quelqu'un qui reste   figé devant quelque chose de surprenant ou d'effrayant  Â
Poser des questions, certe, mais laquelle ?  Imagine toi à sa place  ce serait quoi la question des questions ?    Les gambettes des rouquines ?   Â
Le silence et le GraalDeux remarques :
Bhû vient d eposer en public la même question que je tavais posée en privé Le Geis est un interdit plus qu'un sort : c'est le druide qui place des interdits magiques sur les guerriers et le roi, certaines femmes magiciennes ont le même pouvoir. Si Perceval avait tout de suite posé la bonne question, à quoi sert le Graal, le récit s'arrêtait illico, n'est-il pas
Le silence et le GraalAh non sed ! Tu ne vas pas t'en sortir comme ça ! Â
Les romans du Graal n'ont pas été écrits par Agatha Cristie et c'est pas pour ménager le suspense que le p'tiot Perceval est resté coi !  Ou alors tu sous-entends que les auteurs ne savaient que faire de ce fichu Graal et qu'il valait mieux ne pas en parler pour éviter de dire des conneries    Le silence de Perceval, un simple artifice ?  Muskull septique Â
Le silence et le GraalRe,
ce que je veux dire, c'est qu'il y a un lien très étroit entre le fil du récit et sa thématique. Le Graal est un mystère dans tous les sens du terme : peut-on parler d'un mystère ? Il faut le vivre. Perceval ne pose pas la question, est chassé et morigéné par sa cousine selon l'une des versions. Il va mener la quête, longue, car on est déjà dans un univers romanesque qui s'écartera de plus en plus de l'univers celtique. Dans le sens, où la Quête du Graal, devient une quête spirituelle, celle d'un guerrier ou d'un groupe de guerriers, or en mode celtique les guerriers, appartenant à la deuxième fonction, n'ont pas à se préoccuper de spiritualité. C'est là l'originalité des romans du Graal que de superposer La quête spirituelle chrétienne à une quête "païenne" d'un talisman parmi d'autres. Cf, La légende arthurienne et le Graal où Jean Marx a montré que les objets de la quête du Graal étaient l'équivalent ou le prolongement des talismans des Tutha Dé Danann de la mythologie irlandaise.
Le silence et le GraalBonjour à tous Â
Tout à fait d'accord avec toi Sed, il y a aussi cette quête d'objets magiques dans les Mabinogi. Elle est clairement liée à une quête aventureuse du "sens" et de "pouvoirs" perdus...  et à une nostalgie d'un "âge d'or" hypothétique...  Cette quête d'objets magiques peut être un héritage des traditions shamaniques archaiques et j'ai toujours pensé que les Foimorés appartenaient (ou étaient un souvenir) de cette culture...  Pour ce qui est de la christianisation du mythe par la forme de la coupe que l'on rattache trop vite au calice de la Cène, je serais plus prudent  il y a en effet une coupe semblable dans "le livre des rois" de Ferdusi, poète persan du X°S, il avait recollecté toutes les traditions concernant la fondation mythique de la Perse... On y trouve la coupe de Jamshid où ce roi antique pouvait voir le monde (passé et à venir)  Objet magique donc que l'on peut rattacher à tous les mirois magique des contes et à celui de Galadriel  plus récemment... J'ai lu une version (récente) de la quête où après l'échec de Perceval, c'est Galaad qui rapporte le Graal à son peuple et fait revenir l'âge d'or, il faut que je retrouve l'auteur...  Mais ma question portait sur le "silence" de Perceval et s'il existait par ailleurs dans la tradition celtique un "phénomène" similaire   Â
Le silence et le GraalBon, ben on peut pas dire que ça déchaîne les foules Â
Je ne sais plus qui a dit que le silence pouvait être une réponse mais comme je ne vois pas vos mimines je ne sais si c'est un silence catastrophé, dubitatif ou perplexe  Où il est Bodu ? Il saurait bien lui me mettre quelque chose sous la dent  et si tout le monde reste "spontus" comme Perceval, le Graal va retourner dans le sid pour un sacré bout de temps...  J'ai relu le Kulhwch et Olwen des Mabinogi, c'est vraiment, historiquement je veux dire, le prototype des romans Arthuriens ? C'est un texte fabuleux d'une richesse incroyable  et pas seulement pour l'étude symbolique, la "surenchère" d'Yspaddaden (le chef des géants) est incroyable de génie poétique  Sans parler des réponses de Kulhwch imperturbable, qui devant des demandes insensées les trouvent toujours d'une simplicité "enfantine"...  le beau chevalier que voilà !  Muskull et le silence des agneaux... Â
Le silence et le Graalsalut, s'il y a quelque chose d'opposé au silence, c'est bien le cri.
Dans les épopées et les mythes irlandais, il ya des dizaines de sortes de cris magiques avec des conséquences ou des valorisations très différentes. Or dans un roman arthurien, le Roman de Jauffré, si ma mémoire est bonne, le héros, entendant des plaintes terrifiantes pose une question et provoque l'indignation des personnes présentes et échappe de peu au lynchage. Je vais reprendre le texte et confimer ceci ou non, dans les prochains jours.
Le silence et le GraalBonjour Sed Â
SSSHHHTTT ! Je claviote tout doucement  Je ne sais pas s'il y a une relation mais cela me fait penser à Samain, le jour des morts qui ouvre le "miz du" des bretons. Cette nuit là les sids étaient ouverts et les esprits des morts (ainsi que d'autres "bestioles" peu charitables) battaient landes et campagnes  Les vivants se claquemuraient chez eux en essayant de se faire le plus petit possible. Ils laissaient aussi des dons sur leurs seuils pour apaiser les esprits... Tout le monde aura reconnu l'hallowen irlandais. Ecouter les plaintes des morts était dangeureux pour toute la maison. En Irlande il y a aussi les cris de la Banshee qui entraînent "de l'autre côté du miroir"...  Je ne sais s'il y à là une correspondance avec la nuit de walpurgis des nordiques mais sans doute  Toujours est-il que c'est une survivance des croyances shamaniques qui voulaient que l'on coupe la tête des morts pour qu'ils ne reviennent pas hanter les vivants. Il est dans ces traditions anciennes, fait mention de têtes qui parlaient longtemps après la décollation et étaient conservées (momifiées) comme objets magiques de divination ou de protection (la tête de Bran par ex...). Il y a aussi la "pierre qui crie" Fiana Fail, qui reconnaissait les rois qui s'y asseyaient et prototype de l'épée dans la pierre des romans arthuriens... Pour celui de Jauffré, je ne sais pas, j'ai pas grand chose dans ce genre là Â
Le silence et le GraalHeu, Muskull, la fameuse "pierre qui crie", la "pierre du destin", qui se dressait sur la colline de Tara, n'a pas pour nom "Fianna Fail" mais "Lia Fail".
Le "Fianna Fail", lui, est un parti politique actuel de la République d'Irlande, fondé par Eamon De Valera après que celui-ci ait rompu avec le Sinn Féin et l'IRA en 1927...... "Fianna Fail" se prononce "FI-ihn-ah foïle" et signifie "Soldats du Destin".
Le silence et le GraalOups, oups et re-oups
Sacré lapsus heureusement que mon protecteur était là je suis pas une rouquine mais il a pas peur de faire des heures sup...
Le silence et le GraalMuskull , parfois le silence n'est pas signe d'oubli.....
C’EST PAR LE NOM QUE L'ON CONNAIT L’HOMME…….. ! Si c'est « par le nom que l'on connaît l'homme », force est de constater qu'à la manière d'un Shakespeare, Chrétien de Troyes échappe à la reconstitution historique de l'image de l'auteur. Le mystère du nom ne fait alors que renforcer les interrogations sur une Å“uvre et une création littéraire (le Graal) d'autant plus sujettes à questions qu'elles semblent échapper à l'analyse… Du nom d'auteur, source de questionnements, au nom du personnage éponyme qui est à conquérir, en passant par le mystère du Graal, enjeu d'une parole empêchée qui pourrait restaurer la fertilité d'une terre « gaste », il semble bien que la question du nom soit au cÅ“ur de l'Å“uvre et du projet littéraire de Chrétien de Troyes… C'est par la figure emblématique du « nice » que Chrétien va la mettre au centre de son récit. Le récit commence par le motif, le topique de la « reverdie », ce renouveau de la nature au printemps présent dans les Å“uvres lyriques et épiques. Il ouvre ainsi la voie au renouveau pour le héros, personnage sans nom, que l'on va suivre jusqu'au vers 4740. La première scène est pour lui une scène de découverte où sensations auditives et impressions visuelles se mêlent pour témoigner d'un éblouissement : celui de la rencontre avec la chevalerie qui met fin à l'état de nature et d'ignorance dans lequel sa mère l'avait tenu jusqu'alors. Il décide de suivre ceux qu'il prend pour les « anges de Dieu » : les chevaliers. Perceval ou le conte du Graal débute ainsi par une rupture programmatique et une mort symbolique : le héros quitte le monde de son enfance pour partir en quête d'aventures et se retournant à peine sur ce monde déjà mort à lui, c'est sa mère qu'il voit décéder de chagrin sous ses yeux. Le héros va alors passer d'initiations en initiations : après les conseils de la mère qu'il a mal assimilés, c'est Gornemant de Goort qui va lui offrir un enseignement d'abord pratique, avec le maniement de la lance, puis théorique, reprenant et rectifiant l'enseignement maternel dans un sens plus viril. Quittant Gornemant, c'est à un troisième type d'enseignement que Perceval va être confronté : celui de l'amour personnifié par Blanchefleur. Ce n'est qu'au vers 3575 que le héros connaîtra ou plus précisément devinera son nom. Il lui apparaît, après la scène du Graal, lorsqu'une jeune fille (en réalité sa cousine dont il ignorait l'existence) lui demande son nom : "Comant avez vous non, amis ? Et cil qui son nom ne savoit Devine et dit que il avoit Percevax li Galois a non Et ne set s'il dit voir ou non, Et il dit voir, si ne le sot." (Quel est votre nom, mon ami ? Et lui, qui ne connaissait pas son nom, le devine et dit qu'il avait pour nom Perceval le Gallois. Il ne savait pas si ce qu'il disait était vrai ou faux, mais il disait vrai, sans le savoir). Cet épisode fait bien évidemment écho à la scène inaugurale de rencontre avec les chevaliers où Perceval répondait alors : "Mes or te pri que tu m'anseignes Par quel non je t'apelerai. -Sire, fet il, jel vos dirai. J'ai non Biaix Filz. -Biax Filz as ores ? Je cuit bien que tu as ancores Un autre non. -Sire, par foi, J'ai non Biau Frere. -Bien t'an croi. Mes se tu me vials dire voir, Ton droit non voldrai ge savoir. -Sire, fet il, bien vos puis dire Qu'a mon droit non ai non Biau Sire. -Si m'aïst Dex, ci a biau non. As an tu plus ? -Sire, je non, Ne onques certes plus n'an oi. (Mais je te prie que tu m'apprennes par quel nom je dois t'appeler. -Seigneur, dit-il, je vous le dirai bien volontiers. Mon nom est Beau Fils. - Alors, c'est Beau Fils ? Je suis persuadé que tu possèdes encore un autre nom. -Seigneur, ma foi, on m'appelle aussi Beau Frère. -Je te crois sincèrement. Mais si tu veux bien me dire la vérité, c'est ton vrai nom que je voudrais savoir. -Seigneur, dit-il, je veux bien vous le dire ; mon vrai nom est Beau Seigneur. - Par Dieu, voici un beau nom. En as-tu d'autres encore ? -Non, Seigneur, vraiment, je n'en ai jamais eu d'autres.) L'ironie de Chrétien de Troyes joue ainsi à plein dans la scène à la fois comique et métaphysique. Le « nice » n'est pas un homme car il ignore son nom… Il lui faudra le détour par le Château du graal pour que la révélation épiphanique puisse opérer. Là encore, c'est tout le problème de la parole et de la dénomination que Chrétien va ici stigmatiser… Le « nice » qui ignore son identité ne peut percer le mystère de celle du graal. Les signes sont là mais la parole est empêchée pour dire l'être et pour dire le monde. L'être au monde : telle pourrait être la question métaphysique que pose avant l'heure Chrétien de Troyes… Personnage à l'identité trouée, Perceval erre dans un monde de signes qu'il ne comprend pas et dont le langage ne permet pas de donner du sens à ce qui n'en a pas. Perceval est celui dont l'origine est obscure et dont la généalogie ne se dévoile que dans la perte et la brisure. Il ne connaît pas son nom ni ne sait poser les bonnes questions. Identité fragmentée et parole empêchée sont les deux pôles de l'errance physique et symbolique qu'accomplit initiatiquement le héros et qui le mène à la rencontre du Roi Pêcheur. Cet épisode de Perceval ou le conte du Graal doit sa popularité au nombre de « continuateurs » médiévaux qui ont repris cette scène en lui donnant souvent des infléchissements mystiques ou mythiques. Ainsi, de 1200 à 1240, on ne compte pas moins de onze continuations, imitations et élucidations diverses. Ainsi, la Première continuation de Perceval, le Roman de l'Estoire dou Graal de Robert de Boron, etc. sont autant de retours sur l'épisode du graal de Chrétien de Troyes. Pourquoi un tel succès ? Les raisons sont diverses mais l'origine profonde tient certainement à l'opacité qu'offre cette scène rétive à l'interprétation. En effet, chez Chrétien de Troyes - contrairement à la majorité de ses continuateurs qui font du Graal un objet liturgique - laisse planer le doute quant à l'identité, là encore problématique, du graal. Le mot lui-même est porteur de ce mystère. Les interprétations étymologiques ne manquent pas et cela, dès le Moyen Age. Pourtant, le Graal semble échapper à toute tentative de définition. Dans quel contexte apparaît-il ? Perceval, après avoir quitté sa mère, rencontré Gornemant de Goort et ayant délivré Blanchefleur de la menace de Clamadeu, décide de repartir pour retrouver sa mère. C'est à ce moment du récit qu'il rencontre sur une rivière le Roi Pêcheur qu'il retrouve à l'intérieur du château du Graal où il passe la nuit. Après avoir reçu une épée qui semblait lui être destinée, Perceval est invité à partager le repas du Roi Pêcheur. Un étrange cortège fait alors irruption : des jeunes gens et demoiselles passent devant lui en portant une lance qui saigne, d'autres des chandeliers, une demoiselle tient un récipient merveilleux, le Graal, et une autre un tailloir. Le « nice » observe, muet, la scène qui se déroule sous ses yeux, sans poser aucune question. Le repas achevé, chacun part se coucher. Le lendemain matin, le château est désert et lorsque Perceval s'en va à la recherche d'informations, le pont-levis se referme derrière lui. Le héros n'a pas posé la question de l'identité du cortège et le silence est la seule réponse aux questionnements sur le graal. Episode central, le château du Roi Pêcheur semble cristalliser les enjeux narratifs du texte. C'est quelques vers plus loin que Perceval devine son nom. Il apprend que sa mère est morte de douleur à son départ. Il comprend alors que son rôle était de poser la question rituelle qui permettrait de dévoiler la vérité et de rétablir la fécondité d'un pays « gaste », c'est-à -dire stérile, à l'image du Roi Pêcheur. Ainsi, toute la signification du roman semble tourner autour de cet épisode du château du Graal. Scène initiatique, féerique, liturgique, etc., les diverses théories émises sur le Graal révèlent cependant la richesse et le potentiel mythique que le roman de Chrétien de Troyes met en Å“uvre. C'est aussi tout le problème de l'interprétation allégorique qui est ici posé et que les continuateurs ne cesseront de vouloir résoudre en réduisant la polyphonie de la scène à une idéologie chrétienne. Le Graal deviendra la coupe ayant recueilli le sang du Christ, la lance deviendra la lance romaine dont Longin aurait porté le coup de grâce au Christ… Cependant, Perceval ou le conte du Graal ne cesse de dire la difficile adéquation du nom et de l'identité et de révoquer ainsi les interprétations futures qui réduisent une scène, si riche en suggestions symboliques, à un système idéologique. Le graal reste donc bien, malgré toutes les tentatives et les tentations d'explications, un système subtil et signifiant qui diffuse son mystère à l'Å“uvre entière de Chrétien de Troyes. Il semble donc, qu'à la fin d'un parcours herméneutique, la sentence « c'est par le nom qu'on connaît l'homme » ne cesse de jouer en contrepoint avec un récit qui ne cesse de dire la difficulté de l'adéquation du logos avec le cosmos. Perceval ou le conte du Graal serait le roman de la parole empêchée qui témoignerait de la problématique alliance du nom et de l'homme. Parole là encore empêchée : celle de Chrétien de Troyes qui laisse un récit inachevé. Perceval y apprendra son nom mais ne connaîtra pas pour autant l'identité du graal. Le livre s'interrompt sur le silence de l'auteur (en fait, le roman s'interrompt brutalement au vers 9234, sans doute à cause de la mort de son auteur) et ouvre par là même la voie aux autres voix. Auteurs et lecteurs tenteront depuis le XIIe siècle de mettre un nom sur l'homme, de donner de l'identité à ce qui échappe à la connaissance. C'est peut-être cela, le Graal…! Ce silence ne valait-il pas cette longue disgression?  HAGALDAG,chevalier du GRAAL Â
Le silence et le GraalCRI
Il est un seuil où pour entrer on abandonne toute monture, Il est un seuil où pour entrer on laisse là son manteau, Qu'en reste-t-il d'ailleurs tant il est usé aux tempêtes, Déchiré aux épines, dépecé sous les canines des chiens, Qu'en reste-t-il d'ailleurs ? Et là , timide car l'on sait être nu, habillé seulement de ces rides, De ces traces, griffures, ombres et meurtrissures du long voyage, Gagnées à préserver la perle, à protéger l'écrin confié au messager... Timide car que reste-t-il de ce joyau ? Si de ce reste la lumière pouvait être noire ! La pierre du seuil se ploie au pied nu à peine osant, venu, Et elle crie cette pierre,
Le silence et le GraalEn référence à un article publié dans le dictionnaire ésotérique chez PUF, il est interressant de voir (sommairement) ce que ce mot peut contenir
: GRAAL. Les mythes celtes parlent, à qui veut bien les entendre, de façon contemporaine. Ils constituent des chemins de traverse; interrogeant le sens des situations culturelles et sociales observables encore de nos jours, ils s'appuient réellement sur des représentations avec lesquelles ils entrent en dialogue en même temps qu'ils nous racontent les origines des cultures et groupes sociaux. Le mythe du Graal, si j’essaye ici de cerner le contexte d'émergence et les influences qu'il vient en quelque sorte subsumer, est en effet un véritable carrefour sémantique, une matrice culturelle, qui permet de relier ses racines, celtes et indo-européennes et son inscription sociale et culturelle. Pour la thèse celtique (Jean Marx,  in, La légende arthurienne et le Graal, Paris, P.U.F. 1952, , et, Frappier Jean,in, . Le roman Breton, les origines de la Légende Arthurienne, Paris, C.D.U.-Sorbonne, 1963.), le conte du Graal utilise les récits des mythologies et littératures celtiques sur les trésors et talismans de l'autre monde: la lance est une arme divine et royale, lance de feu et rouge de sang, lance du dieu Lug, du dieu Oengus, du roi Arthur capable de tirer du sang du Vent, le chaudron de Dagda . Mais la théorie celte ne fait état que d'éléments épars. Georges Dumézil, in, Mythe et Epopée, Paris, Gallimard, 1986,. a, quant.... à lui, repéré, chez les Scythes, des objets d'or : charrue, joug, hache, coupe, représentant les trois fonctions indo-européennes : - la coupe qui sert au culte, (fonction sacerdotale), - la hache, la flèche et la lance servent à la guerre, (fonction royale), - le joug et la charrue à l'agriculture (fonction nourricière). Or, chez les Tuatha de Dannan, les fils de la déesse Anna, (Irlande), il y avait quatre villes où les Tuatha de Dannan apprirent Science et Magie: - à Failias était la pierre de Fail qui crie quand un roi prend la souveraineté d'Irlande, - Tara la capitale suprême, était symbole de la terre d'Irlande et de fécondité, - à Goirias, était l'épée de Nuada qui blesse à mort, - à Findias, la lance de Lug, qui rend invincible, -à Murias, le chaudron de Dagda, le grand dieu druide symbole d'abondance. Il se trouve que les objets du cortège du Graal du roman médiéval sont: la lance et l'épée, instruments et symboles de la fonction guerrière, le Graal dont la fonction est magico-religieuse, le tailloir d'argent à la fonction nourricière. Le conte du Graal serait ainsi la métamorphose d'un très vieux récit, qui, 4000 ans auparavant, racontait comment un jeune héros prédestiné parvenait, au travers d'un certain nombre d'épreuves, à conquérir les talismans royaux, symboles des trois fonctions sociales dont le groupement et la conservation garantit la prospérité et restaure une royauté déchue, indigne et impuissante dans un pays frappé de stérilité. Le mot Graal est employé pour la première fois en littérature française dans le Conte du Graal ou le Roman de Perceval de Chrestien de Troyes, paru vers 1170, et s'inspirant d'une source perdue. On y voit Perceval témoin, au château du riche roi pêcheur d'un cortège au milieu duquel se trouve le Graal aux vertus fécondantes mais que le silence du bachelier réduit à l'impuissance. Il connaîtra une grande fortune chez un auteur allemand de la fin du XIIème siècle, Wolfram von Eschenbach, dans son roman Parzival qui inspirera Wagner. Chez lui, le Graal est taillé d'une pierre précieuse, l'émeraude tombée du front de Lucifer, lors de la chute des Anges; elle sera emportée plus tard là où l'on situait le paradis terrestre. L'on se souvient que la pierre de la kaaba des musulmans est aussi une pierre taillée apportée du ciel par l'ange Gabriel. On trouve encore cette référence au Graal au XIIIème siècle dans la Vulgate du Lancelot en prose ou corpus Lancelot-Graal, oeuvre anonyme composée vers 1225-1228, premier roman en prose et en langue vulgaire de notre histoire deux des cinq volumes qui la constituent sont consacrés au Graal: le premier à l'Estoire del saint Graal et le quatrième à la Queste del saint Graal. Chez Robert de Boron, premier auteur à avoir composé un cycle complet autour du Graal, lequel fait paraître en 1212, une trilogie, le Roman de l'Estoire dou Graal ou Joseph d'Arimathie en vers, Merlin, Perceval, nous sommes dans un dépassement, sous influence chrétienne des significations du Graal attachée au chaudron d'abondance des Celtes. Chez lui, le Graal est le vase dans lequel Jésus but pendant la Cène, qu'il utilisa pour dire la première messe et où Joseph d'Arimathie recueillit le sang de ses plaies après son supplice. Transporté en Occident, il repose dans l'île d'Avalon, lieu mystique identifiée, dans l'entourage des Plantagenêt, à l'abbaye cistercienne de Glastonbury. La lignée de Joseph d'Arimathie, celle des gardiens du Graal, dont Lancelot est un descendant, assure sa protection. Le propre fils de Lancelot, Galaad, achèvera la Quête et le cycle pourra alors se renouveler. La légende arthurienne accomplit le lien entre les traditions celtes et la spiritualité cistercienne. Les spécialistes s'accordent en effet pour souligner d'importants liens entre les romans gallois (Kulwch et Owen, les Mabinogion) dont le héros est Perceval et le cycle courtois français et les progrès de la littérature et de la mythologie comparées nous permettent désormais de mieux y percevoir les influences latines, orientales, germaniques, nordiques et occidentales, notamment courtoises et chrétiennes, sans parler des traditions ésotériques ni du folklore. On passe en quelques décennies d'un Graal-chaudron symbolisant les cultes de fécondité de l'Europe chrétienne, via le Graal féminin, vase d'élection, dans le jeu complémentaire du principe mâle et du féminin où le Graal est assimilé à la dame, lieu de toutes les aspirations courtoises, à la coupe de souveraineté, (gradalis). Puis dans une mystique influencée par les croisades et leurs prédicateurs, le Graal (ou graduel) prend la figure de la sagesse, dont rend compte une Quête mystique sous double influence: cistercienne et trinitaire. La quête du Graal permettra le passage des chevaleries terrestres aux chevaleries célestes. Le Graal est ici maître du temps dont il tient ensemble les liens tissés comme son ancêtre d'osier. Ainsi, en 1537, lorsqu'il publie Pantagruel, Rabelais fait référence au Graal en nommant son héros "Panta/Gruel", à cause dit-il "de la sécheresse qui sévissait, car "panta" en grec vaut autant à dire comme tout et "gruel" en langue Hagaréne vaut  autant comme altéré voulant inférer que à l'heure de sa nativité le monde estoit tout altéré, et voyant en esprit de prophétie qu'il seroit quelque jour dominateur des altérez". On voit  ici la fonction fécondante et d'abondance du graal. L’œuvre de Rabelais, entièrement pétrie de culture populaire, est d'ailleurs organisée comme une véritable quête du Graal par les compagnons de Pantagruel partis à la recherche de la "dive bouteille", fontaine d'abondance et de sagesse. Si l’on s’en réfère Gilbert Durand, in, Les structures anthropologiques de l'Imaginaire, Paris, Dunod, 1985, 10ème éd. et Beaux-Arts et Archétypes, Paris, PUF, 1989., on comprend pourquoi de cette idée de contenant, lié à l’oralité, (grasal, grasale, gresel),présent dans les récits celtiques (le chaudron) on soit passé, dans les romans arthuriens du Moyen-Age, au Saint Graal, vase mystique. Il semble en effet qu’il y ait attirance entre les schèmes de l’intimité de la nutrition (celtes) et ceux de la mystique (chrétienne). Une autre interprétation fait ressortir la parenté entre Graal et Calx, la pierre blanche, chaux, ou pierre brûlante, épurante, liée à la pureté, ou encore au calx, le talon. René Guenon propose aussi Gradale: livre ou graduale (graduel). C'est le sens de la Parole perdue, de la parole originelle à retrouver, d'où la nécessité d'une Queste. Graduel, c'est aussi le Grand Livre de la Nature des Alchimistes, le Liber Mundi, révélation du Monde. Dans l'Apocalypse de Jean, il s'identifie à L'Arbre de Vie. Partant de la signification que lui donne Wolfram von Eschenbach, (pierre d'émeraude tombée du front de Lucifer dans laquelle fut taillé le Graal), l'herméneutique rapproche les verbes latins caelere = orner et caedere = tomber, immoler. Caedes prend le sens de sang versé. En français en dérive césure (= taille de pierre). Les pierres taillées cultuelles renvoient ainsi au mythe du Grand Architecte et il faut se rappeler que les Tables de la Loi étaient des pierres taillées. Le Graal est encore château voué à l’inaccessibilité. La problématique se pose donc dans un contexte lié au ciel et à ses projections terrestres, architecturales. D'où l'importance du burin, le ciseau du graveur. Le caelator est le ciseleur et aussi l'architecte. La Pierre-Table-Livre est aussi La Table d'Emeraude des Alchimistes que les Hermétistes désignaient volontiers comme la véritable pierre philosophale et comme la véritable Pierre d’Angle. En même temps, le contenant Graal est, d'une manière mystérieuse identifié à son contenu, à la figure de l'aqua permanens, le Mercure, véritable vase caché, jardin philosophique où notre soleil naît et se lève. La référence indo-européenne renvoie l'origine du Graal à la racine KERT- soit tordre, tresser, car l'on peut penser que les premiers objets contenants étaient confectionnés en tresses (corbeilles). Curieusement, cette idée de claie, qui figure aussi dans la légende de la cathédrale d’osier de l’abbaye de Glastonbury, refuge supposé du Graal, est aussi celle du lien, de l'attache (cratis), et l'on voit bien en quoi le Graal est le lien qui unit les chevaliers d'Arthur dans leur Quête. Elle a, en même temps, donné Hort, hourt (palissade) et behort (tournoi), en espagnol bohordo (petite lance), images qui sont loin d'échapper à l'univers arthurien. C'est sans doute pour cela que les fêtes allemandes du Moyen-Age étaient appelées des Graals. La racine KER signifie Coeur, cette image est aussi proche de la symbolique développée dans les romans arthuriens. Le Graal comme contenant du sang du Christ, ou Saint Graal signifierait aussi Sang Réel (Sangrail), l'évolution du mot est ici liée au développement à l'époque des croisades du culte du Précieux Sang, et mutatis mutandis, du Sacré Cœur etc. Le mot connaît ensuite une fortune considérable, du plat à barbe du Don Quichotte de Cervantés à Jean d'Auton, lequel, dans son Lacurne, publié par les Annales de Louis XII, au XVIIème siècle, cite "celuy plat qu'on appelle le saint graal". La filiation entre ce mythe d'origine celte et l'ésotérisme contemporain est également patente dans un écrit de la loge de Saint Louis des Amis Réunis à Calais, laquelle indique que l'on donnait autrefois le grade de Chevalier de la Table Ronde du Roi Arthur dans un rituel primitif de cette loge. Plus surprenant, en 1785, lors du convent de Paris, le baron Gleichen déclarait, citant des sources Rose-Croix, que les maçons "seraient venus en Angleterre sous le roi Arthur", ce qui expliquerait que l'usage d'une Table Ronde est indispensable à certains travaux des hauts grades du Rite Ecossais Ancien et Accepté. La Quête du Graal procède d'une aspiration profonde, la réflexion sur la richesse et la complexité du thème, véritable « pot-pourri » culturel, nous incite à accueillir avec prudence les tentatives type New Age qui tendraient par projection abusive à en faire un objet de consommation courante. La lecture du mythe invite à prendre en compte le Graal dans une constellation. Il apparaît en effet toujours, dans les sources celtes, dans une interdépendance avec d'autres objets sacrés: la pierre de souveraineté, la lance, l'épée, la table ronde qui vient harmoniser les contraires. Cette interaction constante, que révèle l'analyse textuelle et dont le Graal est à la fois le pivot et la source ne peut que nous inciter à une réactualisation sans cesse renouvelée de nos connaissances. Car une telle quête ne saurait en effet revêtir qu'une figure, celle de l’inachèvement car "si on n'a vu et connu toute chose, le Gwenved demeure inaccessible" (Le Barddas). Vôtre dévoué HAGALDAG du Lac
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