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Etymologie de TancarvilleModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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Je t'entends bien Patrice mais comment savoir que l'appellation médiévale ne recouvre pas une appellation antérieure ?
Je pense à un exemple caractéristique, Caudebec en Caux.... Très curieux, on y trouve le -bec, indéniablement scandinave et le Cau - de l'appellation de l'antique oppidum du CALEDV, clairement attesté sur des monnaies et que l'on peut rattacher certainement aux Calètes Cet exemple montre que la dénomination scandinave, que la dénomination médiévale peut faire son lit dans le souvenir celte, non ? Où et quand ?
Je dirais plus exactement que les dénominations scandinaves ont été adaptées par les locuteurs celtiques préexistants.
Sans quoi, les villages normands auraient des noms qui se prononceraient carrément à la scandinave...
Salut Thierry,
Ton exemple est sans rapport car il s'agit d'un toponyme à base topographique: Caudebec = "ruisseau (*bekkr) du Caledu. Ce genre de composé est bien avéré et j'en ai fait une nouvelle fois la démonstration au sujet de Rouen où l'on a le Robec (ruisseau des tanneurs) = *Ruðabekkr "ruisseau de Rouen". Avec les composés en -ville c'est plus délicat car il s'agit de domaines, pour lesquels on attend évidemment un anthroponyme (à la différence de -acus qui lui désigne simplement l'appartenance du lieu). A+ Patrice Pi d'avri vaut fout' d'berbis
Salut,
Eh bien non, justement. La thèse récemment soutenue par Elisabeth Ridel montre bien que dans certains cas, on a conservation de la prononciation. Ils sont rares certes, mais quand même. L'exemple du Robec, que je citais ci-dessus en est un. Logiquement, on devrait dire *Roubec, depuis le XIIIe siècle. Or ça n'a jamais été le cas. Sinon, effectivement, la prononciation des mots scandinaves importés est adaptée non pas par des locuteurs celtiques (qui n'existent plus depuis longtemps dans ce secteur) mais par des locuteurs français (ou romans si tu préfères). A+ Patrice Pi d'avri vaut fout' d'berbis
Intéressant....
Revenons à quelques exemples du terrain, situés entre Harfleur et ND Gravenchon pour lesquels je ferais les propositions suivantes : TanCar + Ville <= Tan Carn (sous la roche, ie sous la Pierre Gante) Sandou + Ville <= Sen Dun (vieil {oppi} dum ) ce qui est vraiment le cas (Marais) Vernier <= Verna (Gwern) Telhuet (rivière du) <= Tal Huet (front du bois) effectivement dont la source partant du Bois du Parc à ND Gravenchon Nous en sommes à quatre.... à confirmer par les spécialistes du celtique ancien, et je ne reciterai pas Roger + Ville ni La Cerlangue, par souci d'objectivité. En amzer ma oan e-barzh ar bed, me oa gant an holl enoret.
Personnellement, je reste en réserve, car si Falc'hun a démontré les origines celtiques de nombreux thèmes toponymiques en France ( = pour ne pas dire la Gaule), ce qui lui a valu d'être aussi mal compris du côté 'français' que du côté 'breton' de son époque, il ne nous faut pas pour autant tomber dans le "Brigandisme", à savoir que si on peut tout expliquer par le breton (*), ce n'est pas pour autant que c'est du breton, ni du gaulois, ni du celtique.
JCE ---------- LE BRIGAND. 1720-1804. "Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
Salut,
Ouh là là ... Ca c'est de la phonétique historique de rien du tout. Pour Tancarville, je n'ai pu consulter le Dictionaire topographique car il est emprunté à la BU de Caen. Je me suis rabattu sur François de Beaurepaire, Les noms de communes et d'anciennes paroisses de la Seine-Maritime, 1979, Paris, Picard. Il donne pour Tancarville: 1103, Tancarvilla (forme déjà française); 1114, Tancardi villae (forme latine conservée). Ca ne laisse plus guère de doute sur le caractère germanique du nom. De toute façon, si ça avait été du gaulois, le "c" aurait du s'amuir à la fin de l'Antiquité. Ca n'est pas le cas. Pour Sandouville: tous les toponymes normands en -ouville dérivent d'un anthroponyme terminant par *-ulf "loup". Je n'en connais pas d'exception. Je sais bien qu'en Normandie, on a trop souvent fait du "nos ancêtres les Vikings" (de préférence grands, blonds, aux yeux bleux), mais il ne faudrait pas tomber dans l'excès inverse et rechercher du gaulois là où il n'y en a plus. A+ Patrice Pi d'avri vaut fout' d'berbis
Re: Etymologie de TancarvilleUn rapprochement est-il possible avec le dolmen de la Gante, dans le Tarn ? Dans son dictionnaire étymologique des noms de lieux, Dauzat, à l'entrée Gan (Pyrénées-atlantiques), nous sort de son chapeau un pré-latin ganda, terrain rocailleux, et donne Guan en 1358 et Gant en 1385 ; il rapproche de ce toponyme Ganties (Haute-Garonne). Dernière édition par Jacques le Dim 10 Fév, 2008 12:06, édité 1 fois.
Ou éventuellement un ethnonyme : Franconville (95), Francourville (28 ) < francorum villa.
Pour revenir à Gante : il me semble que la Pierre Gante a été aussi associée , comme d'autres sites remarquables, à Gargantua dont je ne connais pas l'etymologie...
En amzer ma oan e-barzh ar bed, me oa gant an holl enoret.
Re: Etymologie de TancarvilleJ'arrive un peu après la discussion, mais le sujet m'intéresse.
Je rejoins le point de vue de Patrice pour l'essentiel et me permet quelques remarques : 1/ selon la plupart des spécialistes, les cas de réinterprétation d'un toponyme antérieur sont rares : s'ils sont menés à disparaitre, ils disparaissent corps et biens. Par exemple, lors de l'organisation de la Gaule en cités, au moins la moitié d'entre elle a perdu son nom celtique pour celui du peuple. Pourtant, on parle encore le gaulois à l'époque. A fortiori, quand une langue différente s'installe dans la région. Il existe bien en Normandie un exemple douteux, cité par F. de Beaurepaire : Tonneville (Seine-Maritime, Taunacum villa 702 - 704 ?), c'est possible phonétiquement mais pas certain *Toniville > Tonneville. 2/ On note que c'est le plus vieux nom en -ville daté en Normandie, conjointement à Bourville (Bodardi villa 715). Or, on a pléthore de documents mentionnant des toponymes antérieurs dès le IIIe / IVe siècle, on devrait donc trouver des mentions concernant des noms précédents les -ville ou des noms en -ville : il n'en est rien. On possède cependant un topo certainement plus ancien : le hameau de Cloville dans la Manche (sans date), mais qu'on peut mettre en relation avec Clouay (Cloeio 1254) à côté, semblable à Cloué (Vienne, Clodoacus) du nom d'homme Claudius > Clodius et qui appartient aux noms en -acum les plus récents qui semblent tous être composés avec un nom de personnage, selon les spécialistes. On le voit, le nom de Clouay n'a pas disparu, malgré la présence de Cloville et on note en revanche la transition entre les noms en -acum et les noms en -ville vraisemblablement vers la fin du VIe siècle. A l'époque où le gaulois était vraisemblablement éteint selon les spécialistes (cf. Pierre-Yves Lambert), pour être remplacé par le roman. 3/ La carte des noms en -ville nous montre qu'il n'y en a quasiment qu'en Lorraine, un peu en Picardie, en Normandie (Maxi), dans la Beauce et dans le sud ouest : ce qui semble signifier la reprise en main de la région par les Francs, après la défaite wisigothique. Par contre, il n'y en a quasiment aucun en pays Gallo, en Anjou et dans l'Avranchin normand, dans le Centre, etc. On observe la diffusion des noms en -ville au nord, quasiment uniquement, là ou on observe celle des noms en -court, -mont, -mesnil, etc..C'est à dire un renouvellement de la toponymie, par le roman et dans une moindre mesure le germanique. Ce mode de composition déterminant-déterminé n'est général que sur un tiers nord de la France actuelle, par conséquent, ça ne peut pas être lié au gaulois, de plus, ce dernier a vraisemblablement subi la même évolution que le celtique insulaire sur le plan syntaxique et que le latin. Il s'agit donc d'une influence germanique. 4/ Se baser sur des critères topographiques pour une explication toponymique n'est pas pertinent. C'est tout juste si elle peut confirmer une explication de type linguistique (corpus de formes anciennes et phonétique historique), en aucun cas l'infirmer. Ainsi, de par les formes anciennes jamais antérieures au VIIIe siècle pour les noms en -ville, on identifie aisément des anthroponymes germaniques (et anglo-scandinaves en Normandie), d'autant plus que le germanique est bien connu et qu'il s'agit d'une couche toponymique récente. Tancarville vient bien du nom germanique Tankrad (nom rare, mais celui d'un abbé du monastère de Prűm) latinisé en Tancradus et qui est répandu dans la Normandie ducale sous la forme semi-savante Tancrède, puis en Italie Tancredo. Ce qui est intéressant, c'est que la répartition du nom de famille Tanqueray, qui en est issu, était encore, jusque la première guerre mondiale, fréquent uniquement en Normandie, dont autour de Tancarville. Quant à Caudebec-en-Caux (Caldebec XIe siècle), certes, il ressemble phonétiquement à Calidu cependant on devrait trouver *Calidubec, indémontrable sans forme ancienne. De plus, il faut mettre en parallèle Caudebec-les-Elbeuf (Caldebec XIe siècle), également au bord de la Seine, qui correspond probablement à l'ancienne Uggade celtique ! (cf. F. de Beaurepaire)
Re:
La toponymie c'est le "cimetière des langues". Les toponymes anglo-scandinaves de normandie sont le reflet d'un certain bilinguisme roman / germanique sur 2 ou 3 générations. Après la disparition de l'anglo-norrois au profit du roman, les appellatifs de cette origine et les anthroponymes transmis par la tradition orale ont évolué conformément aux lois de la phonétique romane.
Re: Etymologie de TancarvilleHello,
J'ai assisté l'année dernière à une conférence donnée lors d'une "fête gauloise" les 25 et 26 Juin 2011 au pied du mur de l'oppidum de Sandouville. Et l'archéologue a affirmé que l'oppidum existait avant l'arrivée des celtes, et était abandonné me semble-t'il. Donc ceux-ci ont réoccupé un oppidum ancien => Sen Dun ...? En amzer ma oan e-barzh ar bed, me oa gant an holl enoret.
Re: Etymologie de Tancarville
Bonjour kiltie. Je ferai la même remarque que précédemment. Les noms en -ville sont des formations toponymiques médiévales (sauf exception qui apparaît alors clairement dans la nature des attestations anciennes du toponyme). Or les formes anciennes de Sandouville sont de type Sandovilla. Il s'agit du nom de personne germanique [continental] (ou scandinave, voire anglo-saxon) Sandolf, voire *Sandulf, cité par M. T. Morlet dans Les Noms de personnes de l'ancienne Gaule. La chute du [f] devant le [v] est liée à la similarité de ces deux consonnes, la première ayant été assimiliée à la seconde. Elle s'observe dans Trouville à Bois-d'Ennebourg (Seine-Maritime, Turulfi villa vers 1025) par exemple. En outre, le O graphique note souvent un OU au moyen-âge, lui-même parfois issu de l'évolution du groupe OL devant consonne. *Sendonvilla aurait été possible, mais les formes anciennes n'en conserve pas trace, donc il ne s'agit que d'une hypothèse sans fondement documentaire. Quant à vouloir relier à tout prix des faits historiques réels ou supposés à des toponymes, ça relève d'une très mauvaise méthode. Les toponymes disparaissent au même titre que les villes (et les oppidum), en outre, ils ne tiennent pas forcément compte de ce qui, de notre point vue, représente une particularité un <<vieil oppidum>> s'appelait peut-être la <<forteresse des chênes>>, on en sait strictement rien. Elisabeth Zadora-Rio a écrit un intéressant article sur le divorce toponymie / archéologie, deux matières différentes par leurs méthodes et leurs conclusions. Bref, ce brave Sandolf n'a pas laissé sa trace dans l'histoire, pas davantage que le propriétaire de la <<Ferme Martin>> (sauf exception) laissera la sienne Bonne journée.
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