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Arthur de BretagneModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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Arthur de BretagneJean-Claude avait attiré mon attention, il ya quelques temps sur le destin tragique d'Arthur de Bretagne assassiné à Rouen, au début du XIII° siècle.
Voici ce que je lis dans un vieux livre (1857), d'un érudit rouennais Léon de Duranville : La naissance d'Arthur ayant coincidé avec l'anniversaire de la résurrection du Christ, les Bretons avaient pensé qu'un sauveur temporel leur arrivait le propre jour de Pâques.... Depuis Nantes, jusqu'à St Pol de Léon dit un historien (M.Pitre-Chevalier) toute église fut remplie d'encens, de chants et de prières; toutes chapelles se vit ornée de feuilles et de fleurs; toute vierge des bois, tout patron des saintes fontaines reçut un habit neuf et un cierge. Henir II prétendit infliger son nom au nouveau né : mais tout d'une voix, la Bretagne le nomma Arthur. Les nations sont comme les individus : les illusions de l'enfance les bercent jusque dans l'âge mûr. Le fameux Arthur de la Table Ronde....n'était pas mort disait le peuple avec les Bardes. Guéri par les fées de ses nombreuses blessures, c'était lui qui revenait sous la forme d'un enfant, après des siècles, pour affranchir la Bretagne. Ainsi, plus d'étrangers, plus d'anglais, vive Arthur, duc des Bretons ! En vain le Plantagenet furieux paya les moines de Glastonbury pour déclarer qu'ils avaient trouvé le tombeau d'Arthur, les acclamarions populaires couvrirent la parole des moines comme celle du Roi. On avait vu Arthur, marchant à la tête de 500 cavaliers et de 4000 hommes de pied mettre le siège devant Mirebeau, ce guerrier bouillant et généreux ne comptait que 16 printemps. La trahison le fit tomber entre les mains de son oncle qui donna parole de nelui faire aucun mal. Mais comme Arthur tenait à ses droits et ne voulait pas resigner sa couronne, Jean sans Terre jura sa perte et pour l'avoir entièrement à sa disposition, le fit transférer au château de Rouen où il disparut... On a dit que dans une des premières nuits du mois d'Avril 1203, Jean accompagné d'un écuyer entièrement dévoué à ses ordres vint prendre le jeune prince et le fit monter dans une nacelle...que l'oncle plongea lui même le fer dans le sein de son neveu et livra son cadavre aux flots de la Seine.... Ce récit a plusieurs variantes et notamment celui d'une noyade alors qu'Arthur cherchait à s'évader. Ce qui est certain, c'est que l'année suivante le roi de France, Philippe Auguste prenait Chateau Gaillard et chassait la dynastie Plantagenet de Normandie, mettant fin à l'indépendance du duché normand. Les Bretons semblent d'ailleurs y avoir largement contribué, non ? En tout cas l'histoire du jeune Duc de Bretagne, toute nimbée de merveilleux semble étonnante de par ses références.... Des commentaires sur cet épisode, hem, douloureux pour les relations trans-couenonesques ?
Demat tudoù !
Un peu lyrique, le sieur Leon de Duranville, non ? Voici quelques notes tirées d'un article de Yannick Hillion, paru dans les Annales de Bretagne en 1985 : "A la naissance d’Arthur 1er (1187), celui-ci est le seul petit-fils d’Henri II, de lignée masculine. Ce n’est donc plus seulement la domination Plantagenêt sur la Bretagne qui est en jeu, mais aussi la succession de tout l’empire Plantagenêt qui est posée. En appelant l’enfant Arthur, Constance va faire de son fils, plus l’espoir et le futur chef des Bretons que l’héritier des Plantagenêts. C’est aussi un défi à Henri II, qui voulait donner son nom à son petit-fils. Henri II réagit en imposant à Constance un nouveau mari : Ranulph de Chester. (note : Geoffroi II Plantagenêt, fils d'Henri et premier mari de Constance, est mort en 1186, dans un accident de tournoi) Jusqu’à la mort d’Henri II en 1189, la politique de Contance sera faite de patience et de respect de la légitimité. En échange, elle gardera auprès d’elle son fils Arthur. Pendant la croisade (1190-1196) à laquelle participe Richard Cœur de Lion et le roi de France, Constance aura sept années de calme et de sérénité pour gouverner le duché. Aliénor est fortement opposée aux droits de succession d’Arthur, et elle s’active à marier son fils Richard pour qu’il ait un héritier. Elle exclut la perspective de voir son petit-fils Arthur, encore enfant, devenir roi sous l’autorité de sa mère Constance à laquelle elle voue une vive animosité. Mais elle se méfie aussi de Jean sans Terre. Constance, de son côté, ne se fie qu’à ses Bretons et a toujours marqué une grande défiance à l’égard de la maison Plantagenêt. Aliénor nomme son autre petit-fils, Othon de Brunswick, fils de Mathilde de Saxe, comme comte de Poitou et duc d’Aquitaine, pour barrer la route à Arthur. Mais Othon sera bientôt couronné empereur d’Allemagne, abandonnant ses prétentions au trône d’Angleterre. En 1196, Richard, revenu de croisade, fait emprisonner Constance et envahit ensuite la Bretagne. Son intervention aboutit à précipiter Arthur dans les bras de Philippe Auguste. Richard fait pression sur les barons bretons de l’Est, tous possessionnés en Normandie ou en Angleterre et les menace de les priver de leurs fiefs pour les maintenir à sa botte. Constance est délivrée à la condition de suivre les avis de Richard. En 1198, Arthur doit quitter le roi de France pour rejoindre Richard, qui a repris le contrôle du duché. La mort de Richard (6 avril 1199) ouvre la crise redoutée de sa succession, où vont s’affronter Aliénor et le roi de France. D’emblée, Arthur est écarté au profit de Jean sans Terre. Jean est couronné roi d’Angleterre sans difficultés, puis duc d’Aquitaine grâce à l’influence énergique d’Aliénor sur les barons poitevins. Mais il n’en est pas de même pour les trois comtés angevins dont Constance et Arthur se sont emparés dès Avril 1199. Les principaux seigneurs de l’Anjou, de Touraine et du Maine prêtent serment à Arthur comme à leur seigneur légitime. En 1199, Constance épouse Guy de Thouars, dont elle a une fille, Alix. (Note : Guy de Thouars est un seigneur poitevin proche de Philippe-Auguste, ce qui renforce les liens de la Bretagne avec les Capétiens) Par le traité du Goulet (1200), Philippe Auguste se réserve la tutelle d’Arthur, mais ce dernier doit rendre hommage à Jean sans Terre pour le duché de Bretagne (fief de la Normandie) et donc renoncer tacitement à ses droits sur l’Anjou , le Maine et la Touraine. Mais en 1202, la situation de Jean a changé vis-à -vis du roi de France : celui-ci l’a déclaré déchu des ses possessions sur le continent et les a transférées à Arthur, qu’il décide de marier à sa fille Marie, âgée de cinq ans. A gournay, Arthur prête l’hommage-lige au roi de France pour la Bretagne, l’Anjou, le Maine, la Touraine et le Poitou. Arthur, en allant prendre possession du Poitou en 1202, assiège Aliénor à Mirebeau et se fait ensuite capturer par Jean sans Terre. Nul ne le reverra jamais. Conclusion : Constance voulait éviter à son duché toute domination étrangère, celle des Plantagenêts, comme celle de la France, mais tandis que la suzeraineté des Plantagenêts s’effondrait en même temps que leur empire continental, celle du roi de France s’affirmait." La Bretagne s'est donc trouvée prise entre deux ennemis plus puissants qu'elle. Malgré la volonté d'indépendance de la duchesse Constance, elle a besoin des Capétiens pour contrebalancer l'influnce des Plantagenêts. A noter qu'après la mort de Richard Coeur-de-Lion, on a affaire à une lutte entre deux femmes de fort tempérament qui ne peuvent pas s'encadrer : Constance et la vieille Aliénor, agée de 77 ans en 1199. Cette lutte va être arbitrée par Philippe Auguste, qui tire finalement les marrons du feu : en 1212, il décide de marier Alix, héritière du duché de Bretagne, à un prince Capétien : Pierre de Dreux. Sinon, la mort d'Arthur 1er a été relatée par Guillaume le Breton, chapelain de Philippe-Auguste : "Jean a appelé secrètement auprès de lui ses serviteurs les plus dévoués; il les excite, en leur promettant force présents, à chercher quelque moyen de faire périr son neveu. Tous refusent de se charger d'un si grand crime. Alors il quitte brusquement sa cour et ses fidèles, s'absente pendant trois jours et se retire dans un vallon boisé...De là , quand la quatrième nuit est arrivée, Jean monte, au milieu des ténèbres, dans une petite barque et traverse le fleuve. Il aborde à Rouen, devant la poterne qui conduit à la grosse tour, sur le port que la Seine, deux fois par jour, inonde de marée. Debout sur le haut de la barque, il demande que son neveu lui soit amené par un page; puis il le prend avec lui dans le bateua, s'éloigne un peu et enfin, s'écarte tout à fait de la rive. Le malheureux enfant, comprenant que sa dernière heure est arrivée, se jette aux genoux du roi en criant : "Mon oncle, aie pitié de ton jeune neveu..." Vaines lamentations. Le tyran le saisit par les cheveux, lui enfonce son épée...Le meurtre consommé, il s'éloigne et jette ce corps sans vie dans les flots qui roulent devant lui." Le témoignage de Guillaume le Breton est à considérer avec précautions : il est Breton, au service du roi de France, deux bonnes raisons de détester Jean sans Terre et de le charger au maximum. Les historiens ne sont pas sûrs que Jean ait tué Arthur de ses propres mains, mais il ne fait aucun doute que c'est lui qui est responsable de sa mort. L'annonce de cette mort en Bretagne va conduire les évêques et barons bretons à rejeter les prétentions de Jean sans Terre sur la Bretagne et à affirmer leur fidélité à Guy de Thouars. L'assassinat d'Arthur était inutile. "Pire qu'un crime, c'est une faute" (qui a dit ça déjà , j'ai la flemme de chercher ?), une faute politique de Jean sans Terre, bien piètre souverain. En fait, je ne suis pas sûr que les Bretons aient eu un rôle très important dans le démantèlement de l'empire Plantagenêt sur le continent, au profit de Philippe-Auguste. C'est plutôt l'incompétence politique de Jean sans Terre qui en est la cause, à mon avis. Et on peut se prendre à rêver : si Jean sans Terre était mort avant Arthur 1er, celui-ci demeurait le seul héritier de l'empire Plantagenêt. Les deux Bretagnes se seraient trouvées à nouveau réunies, sous un roi nommé Arthur. La prédiction était réalisée, l'espoir breton exaucé... Les Bretons sont plus grands et mieux proportionnés que les Celtes. Ils ont les cheveux moins blonds, mais le corps beaucoup plus spongieux.
Hippocrate
Et un à -côté persistant de cette triste histoire : la localisation d'Avalon à Glastonbury. Une opération d'intox tellement réussie qu'elle a encore des adeptes huit siècles plus tard !
Président de l'Institut Fomoire
:ogam-a::ogam-n::ogam-a::ogam-sp::ogam-e::ogam-n::ogam-sp::ogam-s::ogam-h::ogam-o::ogam-r::ogam-t: !
Politiquement, la "découverte" de Glastonbury avait aussi un autre but : mettre un terme, sur l'île de Bretagne même, à l'espoir breton du retour d'Arthur, encore bien vivant chez les Gallois, qui sont encore indépendants à cette époque, surtout au nord (le pays de Galles ne sera maté qu'en 1284).
Inventer le tombeau d'Arthur à Glastonbury et détruire le mythe de son retour, c'est en définive capter son héritage et placer les Plantagenêts comme successeurs légitimes des rois Bretons et d'Arthur. Dans cette optique, le fait qu'un Plantagenêt, héritier possible de l'empire, soit baptisé Arthur (car Arthur 1er est avant tout un Plantagenêt avant d'être breton) ne pouvait qu'aller dans le sens de cette légitimation. Du coup, on comprend mal pourquoi Henri II s'est offusqué du choix de ce prénom. Peut-être que l'attitude indépendante de Constance et de certains barons bretons l'a fait réfléchir ? La rivalité Aliénor-Constance a joué aussi. Aliénor a préféré donner la préférence à Jean, qu'elle n'aimait pas (elle a même essayer de placer sur le trône son autre petit-fils, Othon, au détriment de Jean), plutôt que de voir Constance diriger l'empire Plantagenêt à travers son fils. Enfin, lorsque Jean sans Terre décide de supprimer Arthur 1er, ce n'est pas parce que celui-ci représente l'espoir breton, mais parce qu'il est un rival pour la conquête du pouvoir, pouvoir sur lequel il lorgnait depuis très longtemps. En tout cas, la feinte d'Henri II a fait long feu : en croyant s'accaparer l'héritage d'Arthur, il n'a fait que raviver la volonté d'indépendance des Bretons. On peut aussi s'interroger sur la force et la durée de cette volonté d'indépendance, surtout de la part des seigneurs Bretons : en 1198, il suffit que Richard Coeur-de-Lion les menace de les priver de leurs fiefs anglais et normands pour que tout rentre dans l'ordre. Les Bretons sont plus grands et mieux proportionnés que les Celtes. Ils ont les cheveux moins blonds, mais le corps beaucoup plus spongieux.
Hippocrate
Que voilà une belle page d'histoire, Messire TALIESIN !
... à laquelle j'adhère sur tous points. C'est comme ça que moi j'aime l'Histoire : avec un grand = H, c'est à dire sans dissimulation, mais simplement pour dire la Vérité, de quelque bord qu'elle soit. Jean-Claude Even "Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
Ben, j'ai pas fait grand-chose, simplement donner un aperçu de travaux assez récents sur la question.
Les Bretons sont plus grands et mieux proportionnés que les Celtes. Ils ont les cheveux moins blonds, mais le corps beaucoup plus spongieux.
Hippocrate
Peu importe, du moment que ce soit bon, honnête, et objectif !
C'est du boulot, aussi, que d'être à jour, et de le transmettre. JC Even "Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
Merci TALIESIN effectivement pour ton compte rendu très complet qui a le mérite de recadrer l'imagerie lyrique du XIX° siècle et qui m'apprend beaucoup sur cette page d'histoire dans une période que je connais très mal....
Ce qui est bien sur ce site, c'est que les connaissances des uns et des autres se complètent, ce qui fait qu'on à toujours à apprendre des autres (je n'y connais rien en archéologie, par exemple, et très peu en mythologie)
Tiens, pendant que j'y suis, je vois que vous écrivez tous mon pseudo en majuscules, mais bon, quand je l'ai rentré ce n'était pas volontaire de ma part de l'écrire ainsi, et je n'ai jamais réussi à le modifier depuis. Les Bretons sont plus grands et mieux proportionnés que les Celtes. Ils ont les cheveux moins blonds, mais le corps beaucoup plus spongieux.
Hippocrate
Tu veux que je le change en Taliesin? Guillaume
j'veux bien, je passerais inaperçu comme ça
Les Bretons sont plus grands et mieux proportionnés que les Celtes. Ils ont les cheveux moins blonds, mais le corps beaucoup plus spongieux.
Hippocrate
La question d'Arthur Ier de Bretagne entre en droite ligne dans la vaste histoire de famille des Plantagenêts, et autour du lit d'Aliénor d'Aquitaine, féconde en plusieurs aspects du terme.
Le "peuple breton" n'a pas grand chose à voir là -dedans. De toute façon, s'il n'avait été assassiné par son oncle Jean-sans-Terre, alors qu'il était l'héritier désigné de Richard Coeur de Lion, aux moeurs ne lui permettant pas d'avoir d'enfants, Arthur Ier de Bretagne serait devenu roi d'Angleterre, et se serait probablement contrefichu d'avoir été duc de (Petite) Bretagne auparavant. Le prénom donné à cet enfant est exactement de la même période et de la même veine que la mise en place de la mystification du Saint Graal et de toutes les manipulations autour du thème du Roi Arthur. Il suffit de relire le tableau chronologique tournant autour de la 3ème croisade pour s'en convaincre. JCE Dernière édition par Marc'heg an Avel le Jeu 28 Avr, 2005 11:20, édité 1 fois.
"Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
Complément d'information, extrait de : Emgann Karaez / Bataille de Carohaise :
http://marikavel.org/carohaise/carohaise-chap9-8-personnes-histoire2.htm JCE "Apprends tout et tu verras que rien n'est superflu".
Hugues de Saint-Victor.
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