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En Bretagne insulaire, conquise elle aussi par les armées romaines, les druides ont disparu sans postérité. Mais seule la christianisation a été définitive et précoce, comme en Gaule. Le système politique romain, importé plus tardivement, et le latin, moins généralisé, ont laissé des traces durables mais n'ont pas entraîné la disparition des petits royaumes celtiques et de la langue indigène. Les druides se sont effacés devant le clergé chrétien, mais les bardes ont subsisté. Pendant tout le moyen âge, du V° siècle jusqu'à l'annexion anglaise effective, au XVI° siècle, des cours princières se sont maintenues, entretenant une poésie officielle dans une langue savante, restée celle de l'aristocratie, et les anciens bardes ont pu, sans perdre leur emploi ni leur nom, se convertir et adopter l'usage de l'écriture. Mais nous n'avons pas de récit mythologique ou épique gallois parce que ce qui a subsisté grâce aux bardes a été transformé en thèmes littéraires vers les XI° et XII° siècles à la faveur de la conquête normande. Tout cela a été policé par une influence française très forte, qui a produit l'amour courtois, inconnu de l'Irlande.

En Bretagne armoricaine, la décadence des bardes, devenus mimes et jongleurs, a été un obstacle insurmontable à la transmission d'une tradition préchrétienne. D'ailleurs les Bretons immigrés de Grande-Bretagne étaient déjà christianisés depuis très longtemps à leur arrivée dans la péninsule. La mythologie ne survit donc plus qu'à l'état de traces résiduelles, à peine plus fréquentes ou plus riches qu'en Gaule, dans le folklore et les contes populaires.

En Irlande, le christianisme a été introduit plus tardivement, vers le milieu du V° siècle, dans un pays vierge de toute romanisation et de toute trace de paganisme classique. L'Irlande a été christianisée en une seule fois, par un seul personnage, saint Patrick. Celui-ci est allé tout droit à la cour de Tara, en 432, et a converti en premier le roi Loegaire, ses filles, ses guerriers et ses druides. Quelques années plus tard, l'Irlande était chrétienne, sans heurts et sans martyrs. Après quelques miracles, Patrick a revu toute la législation irlandaise, pour la mettre en conformité avec la parole évangélique. Tout ceci a donné une tradition mi-chrétienne mi-celtique originale, et Rome au besoin de trois siècles pour la mettre au pas.