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SITES ARCHEOLOGIQUESModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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SITES ARCHEOLOGIQUESFESQUES (Seine Maritime)
A ce jour, et en dépit d'une fouille partielle le site de Fesques est le mieux étudié en Haute-Normandie. Situé dans le Nord-Est du département de Seine Maritime, non loin de Neufchâtel en Bray, il est implanté sur un éperon naturel à proximité des territoires Ambien, Bellovaque, Calète et Véliocasse.... Il s'agit en fait d'une colline entourée d'une double enceinte fossoyée dégageant un espace de douze hectares qui paraît avoir accueilli certainement temporairement mais à plusieurs reprises des foules importantes comme en témoignent les milliers d'ossements de boeufs rejetés dans le fossé, provenant tous d'animaux jeunes et de choix. Outre les reliefs de repas, extrêmement importants, signes de véritables agapes, on a retrouvé sur ce site un mobiler important tant du point de vue de la vaiselle que des élements d'armement. Au centre du sanctuaire, se présente une association de temples successifs à pièce simple (cella) et fosse centrale et ce, à l'intérieur d'un péribole fossoyé. Placé entre l'enceinte fossoyée extérieure et le coeur du sanctuaire lui même donc, délimité par une fosse....une série de fosses peu profondes contenant des paires de pieds, ultimes vestiges de corps humains exposés et tournés vers le centre de l'éperon.(26 ensembles d'os ont été regroupés mais on pense qu'il y a eu une centaine d'individus exposés). A proximité, des trous de poteaux font penser à la présence de portiques ou potences individuelles... Pour Jean Louis BRUNAUX qui a beaucoup étudié ce lieu qu'il évoque tant dans "Les religions Gauloises" que "Guerre et religion en Gaule" il s'agirait d'un lieu de rassemblement d'une communauté importante sous l'égide d'une divinité que signale l'autel central mais il s'agit avant tout d'une assemblée qui préside à l'avenir de l'entité etnique (les peuples Belges précités ?) S'agirait il d'un exemple de l'assemblée des hommes en arme telle qu'évoquée par César dans la guerre des Gaules....? Il s'agirait en tout cas d'un lieu de justice; pour Brunaux, il y a peu de doute, il s'agirait du premier exemple que l'archéologie nous a donné d'un tribunal Gaulois offert par la nature et légèrement aménagé par l'homme. Les expositions et manipulations de corps humains associés à des dépôts d'objets ainsi que les banquets et libations sont datés par les archéologues des III° et II° siècles av JC. Au delà le site continue à être fréquenté mais les rites semblent modifiés (dépôts de numéraire et de parures) A l'époque de la conquête le "péribole fossoyé" est remplacé par un portique quasi rectangulaire d'une soixantaine de poteaux; dès lors les activités vont se limiter au coeur du sanctuaire. Sa fréquentation se poursuit après la conquête mais prend fin dans le courant du II° siècle après JC, s'il ya eu romanisation, elle n'est pas ici clairement perceptible... Pour approfondir : - Au temps des Gaulois - catalogue du musée départemental des antiquités de Seine Maritime - Juin 2001 - Les religions Gauloises - Jean Louis BRUNAUX - Guerre et religion en Gaule - Jean Luis BRUNAUX
GOURNAY SUR ARONDE.
Ce site est tout simplement exceptionnel. Il l'est en soi, pour le "matériel" qu'il a livré; il l'est aussi parce que c'est un site gaulois qui a été entièrement fouillé et auquel on a attribué plus d'intérêt qu'un simple sauvetage partiel dans l'urgence. Non seulement le site est exceptionnel mais tout le coin, l'est.... Nous sommes chez les Bellovaques, une des plus puissantes et des plus populeuses tribus du Nord de la Gaule, pas très loin de chez les non mois fameux Ambiens, à deux pas des Viromanduens; les Suessions ne sont pas très loin non plus... A trois kilomètres de Gournay, on trouve la résidence aristocratique de Montmartin et à six kilomètres le site d'Estrées Saint Denis, nous sommes très manifestement au coeur d'une zone "celtico-sensible". Les fouilles minutieuses, suivies d'un travail d'analyse des armes et des dépouilles retrouvées ont permis de reconstituer de façon surprenante l'histoire de ce sanctuaire et on se prend à rêver en se disant qu'il ne s'agissait pourtant là "que" d'un sanctuaire de pagus....... Le travail d'analyse nous a été livré essentiellement par Jean Louis BRUNAUX dans deux ouvrages déjà souvent cités - LES RELIGIONS GAULOISES - Errance - 2000; GUERRE et RELIGION EN GAULE - Errance 2004. Je ne ferais ici qu'un petit résumé en évitant le travail d'interprétation de l'auteur....On pourra également se reporter au Dictionnaire de Venceslas KRUTA (Les CELTES - Histoire et dictionnaire - Robert Laffont, collection Bouquins - 2000) et à l'ouvrage de Barry CUNLIFFE (Les Celtes - Errance 2001). En tout état de cause, quiconque se prétend, même simplement amateur d'histoire antique concernant les Celtes, ne peut faire l'impasse d'une connaissance de ce site, jugez en plutôt..... Gournay est situé à quelques kilomètre au NO de Compiègne sur un grand axe Nord-Sud (N17) d'ailleurs parallèle à l'autoroute A1...
Le sanctuaire est situé dans la vallée de l'Aronde à proximité d'un marais et sur un chemin qui était (déjà ) la principale route traversant le pagus.
A proximité du sanctuaire on a découvert une enceinte fortifiée de 3 ha, occupée à la Tène Ancienne mais abandonnée au III° siècle av JC. On ne retrouvera pas, dans le secteur, d'agglomérations, meme de faible importance, avant le milieu du Ier siècle av JC. A coté du sanctuaire on a également découvert une fosse contenant une vingtaine de vases, datés du IV° siècle av JC. Il s'agit probablement de traces d'un petit lieu de culte préalable à la construction du grand sanctuaire. A l'emplacement du site proprement dit, on a trouvé la trace du tout premier fossé de la Tène Ancienne ce qui démontre que ce sanctuaire à une origine antérieure à l'installation des Belges sur ce territoire vers 280 - 260 av JC. A suivre....
Le sanctuaire de Gournay se caractérise avant tout comme un "morceau de terre" découpé au sol d'une superficie d'environ 1500 m2.
Il s'agit d'un rectangle aux angles arrondis matérialisé par un fossé de 2,50 m de largeur pour 2 m de profondeur. Le fossé, lui même, est entouré d'une palissade très soignée aux poteaux joints et qui fut édifiée ultérieurement. Le fossé, le morceau de terre du dieu est lui même englobé et masqué de l'extérieur. L'ensemble de ces travaux sont datés de la première partie du III° siècle et sont cette fois-ci contemporain de l'installation Belge. Autour de la palissade, un nouveau fossé extérieur est creusé. Au centre de l'enclos, on trouve un complexe de 9 fosses de dimension réduite ( 1,20 m de largeur pour 1,40 m de profondeur) entourant une fosse importante de 3x4 m et de 2m de profondeur. Les petites fosses sont groupées par 3 au N, au S et à l'O de la grande fosse qui est donc "ouverte" sur le levant. Un espace d'environ 1,50 m permet la déambulation autour de la fosse principale.... Au Nord de ce complexe se trouve une surface boisée d'environ 400 m2... Les structures en fosse ont été remplies, vidées et nettoyées à plusieurs reprises et les déchets essentiellement animaux ont été retrouvés dans le fossé intérieur ( 45 bovidés, une centaine d'agneaux, une quarantaine de porcelets ). On a retrouvé une chaîne de fourreau d'épée dans l'une des petites fosses qui pouvaient donc aussi servir de réceptacles aux armes. Les restes de boeufs retrouvés ne présentent pas de découpe; ils étaient donc livrés entiers dans la grande fosse pour y pourir naturellement puis on récupérait les restes que l'on redéposait ensuite dans le fossé. L'autel creux central est donc interprété comme un vase d'alimentation, une bouche divine. Cette fosse avait des parois recouvertes de bois, comme un tonneau et était fréquemment entretenue après le séjour de chaque victime. Les petites fosses semblent avoir également connu des opérations de remplissage et nettoyage, même si elles semblent avoir eu pour principale fonction de marquer les contours de l'autel et de sa périphérie; elles serviront d'ailleurs ensuite de bases aux poteaux de soutainement de l'édifice qui abritera l'autel dès la seconde moitié du III° siècle av JC... Dans le courant du II° siècle, la sanctuaire fait l'objet de réaménagements : reconstruction de la palissade, du porche d'entrée, de l'édifice de protection de l'autel, réajustement du batîment dans un axe quasi parfait avec la porte d'entrée.... Justement, le porche d'entrée dont on connaît bien la configuration à cette époque est l'un des éléments essentiels de Gournay. C'est un rectangle à étage qui occupe la passage de l'entrée et qui vient couvrir le fossé extérieur ( 8 m de long pour 5 m de large ). Il se présente comme une véritable porte d'oppidum très richement ornée. On a découvert à proximité 2 à 300 éléments de chaque type d'armes (boucliers, épées, fourreaux et chaînes...) L'idée de JL BRUNAUX est en fait de la présence de panoplies complétes offertes au dieu de l'endroit. On trouvait également en décoration des cranes de bovidés et des crânes humains ce qui devait donner à l'ensemble du porche un esthétisme assez particulier..... A suivre
Pour ajouter à la description du site à l'époque de son "âge d'or", il importe de souligner qu'au II° siècle l'abri de l'autel en creux s'est trouvé pourvu de murs en torchis commençant à donner ainsi au centre du sanctuaire l'aspect d'un temple au sens classique....
Les armes retrouvées à Gournay en grand nombre ont fait l'objet d'analyses très fines qui ont permis de réaliser que les chercheurs étaient confrontés à un ensemble de panoplies étalées dans le temps, apportées dans le sanctuaire par paquets de plusieurs dizaines. IL ne s'agissait pas d'armes neuves car celles-ci portaient généralement des traces de combat. L'hypothèse la plus vraisemblable est celle de prises de guerre. L'étude de la datation des fourreaux a notamment permis de réaliser que les guerriers Bellovaques de Gournay ont d'abord fait beaucoup de prises, puis de moins en moins et ce, sur une période qui court entre 280 et 200 av JC. A bientôt, Thierry
GOURNAY SUR ARONDE (SUITE)
Au total, l'aspect monumental du site ne tient pas tant à son autel central ou au bois sacré mais bel et bien à l'enclos lui-même dans son ensemble avec sa palissade très soignée et surtout son porche d'entrée emblématique. Il importe de préciser que ce dernier reposait sur une dizaine de poteaux pour une longueur de huit mètres et une largeur de cinq; qu'il avait un étage et devait se présenter comme une porte d'oppidum telle qu'on la représente aujourd'hui dans nos figurations reconstituées. Cette porte était chargée d'offrandes, armes surtout mais aussi fragments de chars, têtes humaines et animales.... Les offrandes demeuraient accrochées au porche, souvent à l'étage, jusqu'à oxydation ou pourrissement et les armes tombées à terre étaient pliées et jetées dans le fossé. PLutôt qu'un sacrifice des armes, Brunaux voit dans cette opération, une opération de désacralisation après une suspension en l'air bénéfique et bienfaitrice, l'arme tombée au sol perd sa dimension d'offrande et est repoussée dans le fossé..... Sur les os humains, on peut penser qu'ils sont révélateurs de pratiques sacrificielles également... Il s'agit en effet principalement d'adultes (sauf 1) de petite taille (sauf 1) Sur une douzaine de cadavres exposés on trouve donc un adolescent et un guerrier (vraisemblablement) et sans doute des femmes. L'hypothèse de guerriers tués au combat s'effacent au profit de sacrifices sur place.... Certains cadavres étaient exposés affublés de panoplies complétes, semblent ils... Les rituels guerriers de Gournay vont s'effacer et s'assagir avec le temps au cours du II° siècle av JC, jusqu'à ce que le sanctuaire soit consciencieusement fermé entre 125 et 100 av JC pour....être réouvert au début de la romanisation. Les bâtiments cultuels ont été brulés délibérément lors du premier abandon contemporain de la création du sanctuaire d'Estrée St Denis, contemporain également de la désertion de l'habitat aristocratique de Mont martin situé à trois kilométres de là ...... (Effet de la jonction des Cimbres et Teutons précisément dans cette zone "Sud Belgium" en 103 av JC ? Changements sociaux et politiques -fin d'une prédominante aristocratie guerrière ? les deux...?)
RIBEMONT SUR ANCRE
Derrière le nom de cette petite commune des environs d'AMIENS, se trouve l'une des plus stupéfiantes découvertes archéologiques jamais effectuée en FRANCE; elle concerne les Celtes et plus particulièrement l'arrivée et l'installation des peuples dits Belges; ce site extrêmement étendu a fait l'objet de fouilles depuis 1982 et a révélé : - le site d'une bataille importante entre une armée belge et une armée probablement armoricaine ayant fait environ un millier de tués, (ce qui témoigne de la présence d'armées extrêmement importantes) - l'élévation d'un trophée avec les dépouilles des vaincus (plusieurs centaines), toutes décapitées... - l'élévation d'un trophée consacré aux vainqueurs révélant des rites extraordinaires, puis la consécration de stèles vénérées pendant des siècles après la bataille... - la continuation et l'expansion du dite révélant une vénération sur des siècles bien après la conquête romaine... Les Picards, ou en tout cas les Amienois peuvent être des gens heureux, bien plus qu'une légende de fondation, ils ont la trace très nette de leur histoire depuis 280 av JC, ce qui est rarement le cas dans nos contrées... J'entrerai plus dans les détails dans les prochains jours, ceci étant, je vous indique que Guillaume a mis en lien dans la partie "ressources" le site de ce site et il est très bien fait....
Avant que d'aborder plus franchement ce site (ça risque d'être un peu long) je vous rappelle que vous pouvez chercher le lien direct avec Ribemont sur Ancre en partie ressources de l'Arbre :
http://www.arbre-celtique.com/ressources/liens-celtes/liens-celtes.php#generaux Ca vaut le détour....
Scrogneugneu Pierre, c'était pour montrer que Guillaume avait déjà bien fait son travail et permettre aux intéressés de découvrir que la partie ressources était riche et pas seulement du lien vers Ribemont
Je commence par la fin, mais la dernière découverte sur le site protohistorique de Ribemont (2001 alors que le site était fouillé depuis 1982) est l'une des plus saisissantes.
Il s'agit du second enclos polygonal qui a été consécré au traitement des "héros" Ambiens, les vainqueurs de la bataille... Les archéologues ont découvert que les Ambiens ont dressé après la bataille un mur de torchis peint relativement impressionnant (on suppose qu'il faisait cinq mètres de haut) pour faire de ce polygone un lieu quasi parfaitement fermé avec le ciel pour seul échapattoire... Là une soixantaine de corps ont été entreposés, à même un sol parfaitement arasé.... Le "traitement" de ces cadavres a duré quelques mois, quelques années, deux ou trois pas plus.... Les murs ont été abattus et on a alors dressé autant de stèles de grès pour les héros. Ce lieu consacré a longtemps été vénéré puisqu'on y trouve des traces de banquet jusque sous le bas-empire... A l'époque augustéenne, des soldats ambiens de l'armée romaine y ont élevé un portique. D'après Jean Louis BRUNAUX, il s'agirait d'un traitement funéraire très particulier destiné à des individus héroisés dont les corps ne peuvent rester sur terre, d'où ce luxe et l'édification d'une espèce de tour de manière à ce que seuls des oiseaux charognards peuvent emporter les dépouilles vers les cieux... On trouve sur ce lieu particulier, un autel en creux et des restes de sacrifices animaux, une manière, d'après BRUNAUX de contenter le DISPATER infernal auquel des individus heroisés vont échapper...Ce n'est bien sûr qu'une interprétation..... A suivre....
Pour info,
Un livre sur le site de Fesques: Voir: http://docmontreuil.free.fr/Nord_Ouest_8x.html De l'archéologie pure et brute, mais c'est hyper intéressant ![]() @+Pierre
Merci Pierre
![]() J'avais loupé ce fil de juillet mais je trouve l'interprétation de Brunaux tout à fait cohérente. Mais là je m'interroge, les Belges (en dehors de l'amour immodéré des moules et de la bière) semblent avoir des pratiques cultuelles bien différentes de celles des gaulois "sous seiniens" plus influencés par des cultes méditerranéens. C'est cette différence qui intrigue et rend "mystérieuses" les pratiques nordiques, plus "jeunes", des celtes ou des "celtisés"... Celà pose aussi la question : Le druidisme, méditerranéen ou nordique ? Mine de rien, c'est important... ![]() Muskull / Thomas Colin
Comme l'eau modèle la terre, la pensée modèle le possible. http://muskull.arbre-celtique.com/ http://thomascolin.fr
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