Les éditions Gallimard viennent de publier, dans la prestigieuse « Bibliothèque de la Pléiade », le premier de deux volumes intitulés « Le Livre du Graal ».
Ce recueil regroupe des textes parus entre 1215 et 1240, soit 20 à 50 ans après Chrétien de Troyes, à savoir, pour le premier tome : « Joseph d’Arimathie », « Merlin » et « Les premiers faits du rois Arthur ». Le second tome proposera « Lancelot », « La Quête du Saint-Graal » et « La mort du roi Arthur ».
Ces récits en prose montrent comment les histoires du Graal synthétisent des éléments de l’ancienne tradition orale celtique – principalement galloise - et des structures chrétiennes, pour former l’un des thèmes les plus prolifiques de la littérature et de l’imaginaire occidental. Ils témoignent de la volonté consciente, dans cette première moitié du XIII° siècle, de la part de l’Eglise, et en particulier du courant cistercien, de dé-paganiser les poèmes en vers en les réécrivant en prose. « Ils craignaient, à juste titre sans doute, qu’il n’y eut dans la musique des vers quelque chose qui subsiste de la transe païenne et de la possession démoniaque. (…) Même si les aventures du Graal, de Merlin et des chevaliers de la Table ronde continuent à être dites et entendues, même si le merveilleux y poursuit son œuvre, la prose introduit une écoute critique, le merveilleux se change en mystère, il se rationalise, se christianise, se métaphorise : il devient le signe d’une vérité que la lecture découvre. Le chant du monde laisse place à son explication » (Pierre Lepape, in Le Monde, 22 juin 2001).
Si ces textes pourront parfois paraître lourdement missionnaires et indigestes pour les modernes que nous sommes devenus, ils attestent de l’influence profonde de la tradition celtique sur notre imaginaire, malgré le christianisme, ou même en lui et grâce à lui.
Le Livre du Graal
tome 1
édition préparée par Daniel Poirion et dirigée par Philippe Walter,
Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade »
2000 p., 399 f jusqu’au 31 août, puis 450 f.
Boduogenos