Y-a-t-il une autre sagesse,
et les dieux aux mortels ont-ils rien accordé de plus
beau
que de pouvoir écraser de la main
la tête de son ennemi ?
et ce qui est beau nous est précieux.
Les Bacchantes – Euripide (versets 874-879)
Dionysos, rappelons-le, sorte de nouveau prophète, avait traversé le monde pour se faire reconnaître comme dieu. Après s’être fait adorer en Lydie, il revint à Thèbes, sa ville natale, pour y rencontrer sa famille fermement hostile à sa nouvelle religion. Il finit par briser et les uns par les autres, ceux qui niaient ou mettaient en doute sa divinité et ceux qui ne l’acceptaient que par intérêt et prudence.
Dionysos qui aimait sa mère Sélémé, la foudroyée de Zeus, se recueillait à Thèbes près du tertre au saint tombeau où brûlait une flamme immortelle, et où il fit pousser une vigne miraculeuse.
Emprisonné par son cousin Penthée, Dionysos eut le temps de se faire passer par un de ses adorateurs. Il persuada Penthée à se déguiser en femme pour juger de lui-même de la conduite de ces femmes rendues folles et libérées des conventions de conduites morales, célébrant son rite dans la montagne. Là , les femmes plongées dans l’extase, découvrirent Penthée. Basculant dans la folie meurtrière, sauvagement le démembrèrent et le déchirèrent en pièces, croyant avoir tué un jeune lion.
Dans sa frénésie, sa mère Agavé, sœur de Sémélé, porta triomphalement bien haut sa tête aux habitants de Thèbes. C’est seulement lorsqu’elle reprit ses sens qu’elle découvrit qu‘elle avait tué son fils.
~ ° ~
A c’est beau l’amour !
En ceci notamment, m’a-t-on dit, que c’est lui
Qui nous donna la vigne, le remède au chagrin.
Or sans vin, plus d’amour, ni plus rien qui charme les hommes.
Les Bacchantes – Euripide.
On connaît la facilité déconcertante qu’avaient les anciens de sabrer les cols d’amphores aussi bien que les têtes lors des sacrifices ou sur les champs de bataille, et qu’ils n’aimaient quand même pas trop porter « haut les cornes! ».
Pervertissant la réalité et les sens des hommes et des femmes, amour frivole de l’ivresse, ivresse futile de l’amour…, quelques petites histoires celtiques déconcertantes et tétanisantes (toujours selon une traduction de Cougny) et qui nous éloignent de la douceur des contes traditionnels pour enfants et illustrer le thème dionysiaque sur cette passion du dive vin, le remède à toute peine.
Ainsi les curieuses manières qu’avaient les Celto-galates « d’aller faire leurs courses » chez leurs voisins italiens ou ioniens et de régler leurs démêlés amoureux
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Arronte
Denys ou Dionysios d’Halicarnasse en Carie, contemporain d’Auguste, dans ses Antiquités romaines (Discours XIII. Fragments), racontant sur Brennus et l’invasion du Capitole, nous révèle pourquoi se fit l’invasion de l’Italie :
X. Quant à la cause qui amena les Celtes en Italie, la voici : un certain Locomon, chef des Tyrrhènes, sur le point de quitter la vie, remit son fils dans les mains d’un homme de confiance, nommé Arronte (en latin Aruns, Aruntis. Tite Live, V, XXXIII), qui devait être le tuteur de cet enfant.
Le Tyrrhène mort, Arronte, qui avait accepté cette charge, se montra un soigneux et fidèle gardien de la foi jurée, et quand l’enfant fut arrivé à l’âge d’homme, il lui fit connaître la fortune que lui avait laissée son père. Il ne reçut pas du jeune homme une reconnaissance égale à ses services. Il avait une femme jeune et belle, qui jusque-là avait été vertueuse, et rien n’avait pour lui plus de prix que cette union. Le jouvenceau en devint amoureux; il souilla tout ensemble et le corps et l’âme de cette femme, et ce n’était plus même en secret, c’était ostensiblement qu’il cherchait à l’entretenir.
Arronte, affligé de se voir enlever sa femme, irrité des outrages que lui prodiguaient l’amant et la maîtresse, mais ne pouvant tirer vengeance de cette trahison, entreprit un voyage, en donnant pour prétexte qu’il allait faire le commerce. Le jeune homme accueillit avec joie l’idée de ce départ, il fournit au voyageur tout ce dont il avait besoin pour son commerce, et Arronte, ayant chargé des chariots d’une quantité d’outres de vin et d’huile, d’une quantité de paniers de figues, emmena le tout dans la Celtique.
XI. Les Celtes ne connaissaient alors ni le vin de raisin, ni l’huile que l’on tire chez nous de l’olive : au lieu de vin, ils avaient une liqueur faite avec de l’eau, où l’on a fait pourrir de l’orge et qui a une odeur désagréable; au lieu d’huile, de la vieille graisse de porc aussi révoltante pour l’odorat ou le goût. Ayant usé pour la première fois de ces fruits dont ils n’avaient jamais goûté, ils trouvèrent un merveilleux plaisir, et demandèrent à leur hôte comment et chez quels peuples on obtenait chacun de ces produits.
Le Tyrrhène leur dit que la contrée qui portait ces fruits était vaste, excellente, qu’elle n’était guère peuplée, et que, pour les choses de la guerre, les hommes qui les habitaient ne valaient pas mieux que les femmes; il leur suggéra de ne plus se procurer ces denrées en les achetant, mais de chasser du pays ceux qui en étaient les maîtres, et d’en recueillir les fruits comme étant leur propriété. Les Celtes en crurent ses paroles; ils passèrent en Italie, et, parmi les Tyrrhènes, attaquèrent ceux qu’on appelait Clausins, peuple auquel appartenait leur donneur de conseil.
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On retrouvera ainsi dans l’histoire de Chiomara et du romain puis celle contée par Parthénios de Nicée, dans ses Histoires d’amour, VIII (35 histoires d’amour empruntées à différents auteurs et dédiées au poète élégiaque Cornelius Gallus), nous conte l’histoire d’une Milésienne appelée Erippè et dont peut retrouver les texte intégraux en page frontale de l'A-C:
http://www.arbre-celtique.com/approfond ... iomara.php
Alors que les Galates faisaient leurs courses dans l’Iônie (côte ouest de l’Asie Mineure) et en saccageaient les villes, on célébrait à Milet les Thesmophories (fêtes en l’honneur de Déméter, seules les femmes mariées, semble-t-il, pouvaient y assister) et les femmes étaient rassemblées dans le temple qui est à peu de distance de la ville. Un détachement de ces barbares qui passait par la Milèsie, dans cette incursion soudaine, enleva les femmes. On en délivra quelques-unes en donnant pour les ravoir beaucoup d’argent et d’or. Quelques autres, avec qui les barbares s’étaient liés, quittèrent le pays...
… Lorsqu’on fut arrivé aux frontières des Celtes, le barbare dit qu’il voulait offrir un sacrifice avant de se séparer de ses hôtes. La victime amenée, il invite Erippè à la tenir de son côté; quand elle y a porté la main, suivant un usage qu’elle connaissait bien d’ailleurs, levant son épée, il lui en porte un coup qui lui enlève la tête. Alors, il engage Xanthos à ne point regretter cette femme dont il lui raconte les méchants desseins, et lui permet d’emporter tout son or.
Brennos, roi des Galates
Diodore de Sicile dans son livre XXII. IX, nous raconte :
Brennos, roi des Galates, avec quinze myriades d’hommes armés de grands boucliers, dix mille cavaliers, une seconde troupe de vivandiers, de nombreux marchands et deux mille chariots, s’en vint faire la guerre en Macédoine; et dans cette guerre, ayant perdu beaucoup de soldats, au point de se trouver sans forces, il vint plus tard dans l’Hellade et au nantéum de Delphes, avec l’intention de le piller.
Une grande guerre s’ensuivit, et Brennos, ayant perdu des myriades de soldats, fut atteint de trois blessures. Affaissé jusqu’à la mort, il rassembla son peuple, et s’entretenant avec les Galates, il leur conseilla de le tuer, lui et tous les blessés, d’incendier leurs chariots et de retourner, ainsi débarrassés, dans leurs foyers, après s’être donné pour roi Cichôrios. Or Brennos, ayant absorbé force vin pur, s’égorgea lui-même.
Cichôrios l’enseveli, puis ayant fait mourir les blessés et ceux, au nombre d’environ vingt mille, que l’hiver et la faim avaient fatigués, il s’achemina avec le reste par la même route pour rentrer dans son pays.
L’histoire ne dit pas comment Brennos se fit enterrer, mais l’aristocratie guerrière de l’époque aimait à se faire inhumer avec char et service à vin importé.
ejds