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Homosexualité celtique ?

Déposez vos questions/remarques sur ce forum consacré aux connaissances actuelles concernant les Celtes...

Modérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice

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113 messages • Page 1 sur 8 • 1, 2, 3, 4, 5 ... 8

Homosexualité celtique ?

Messagede Fergus » Lun 15 Nov, 2004 14:57

Je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous un petit article de H. d'Arbois de Jubainville, paru en appendice à la fin de son traité sur la Famille Celtique (voir fil sur d'Arbois). On y apprend autant (sinon plus) sur la mentalité de la fin du XIX°, que sur celle de "nos ancêtres les Gaulois"...


LES CELTES ETAIENT-ILS PEDERASTES ?

Appendice à "La famille celtique"
par H. d'Arbois de Jubainville


Il s'agit d'une accusation formulée contre eux, d'abord avant notre ère, par Aristote au IV° siècle et par Diodore de Sicile au Ier, puis après notre ère par Strabon au Ier siècle, par Claude Ptolémée au II°, par Athénée au III°.
Aristote, ami des Celtes, dont son élève Alexandre le grand était l'allié, nous les présente comme des pédérastes et à ses yeux c'est un éloge. Grâce à cette habitude, ils échappent à la domination des femmes qui est le fléau des Etats (1).
Un peu plus tard, Diodore de Sicile admet l'existence de la pédérastie celtique, mais l'apprécie autrement. "Les Gaulois", dit-il, "ont de jolies femmes, mais ils approchent d'elles très rarement ; ils ont une préférence pasisonnée pour les embrassements immoraux des mâles. Chose incompréhensible ! Sans aucun respect pour leur dignité, ils livrent sans résistance leurs beaux corps à d'autres hommes ; ils ne considèrent pas cette faiblesse comme honteuse ; ils offrent même leurs faveurs, et, quand on ne les accepte pas, ils considèrent le refus comme une injure" (2).
Strabon exprime la même idée d'une façon plus brève : "Chez les Celtes", dit-il, "on ne considère pas comme honteuse pour les jeunes gens le fait qu'ils laissent un autre homme abuser de la fleur de leur âge" (3). Athénée reproduit d'une façon plus complète la doctrine de Diodore : "Quoique les Celtes, un des peuples barbares", dit-il, "aient de très belles femmes, ils leur préfèrent les petits garçons" (3). Claude Ptolémée, acceptant comme certain ce phénomène immoral, l'avait expliqué par l'influence des astres (4).
Dans le De bello gallico, Jules César ne dit pas un mot de ce vice attribué aux Gaulois par les auteurs grecs que nous venons de citer. Peut-être avait-il pour garder le silence une raison personnelle. On sait que Suétone raconte les relations que le futur conquérant de la Gaule avait, dit-on, l'an 81 avant notre ère, à l'âge de dix-neuf ans, avec Nicomède III, roi de Bithynie, monté sur le trône dix ans plus tôt. Les mauvaises langues de Rome qualifiaient durement ces relations : on disait qu'il avait été la rivale de la reine, le matelas de la litière royale, la reine de Bithynie. Un jour, à Rome, un certain Octavius qui, étant un peu fou, se croyait le droit de tout dire, s'adressé en public à Pompée en lui donnant le titre de roi, puis, saluant Jules césar, l'appela reine. Une autre fois, Jules César, plaidant au Sénat la cause Nysa, fille de Nicomédie III, parla des bienfaits qu'il avait reçus de ce prince. Cicéron l'interrompit : "N'en dis pas davantage, je te prie", s'écria le grand orateur, "on sait et ce que tu as reçu de lui et ce que tu lui as donné".
Ces faits étaient si notoires que, cinq ans après la rédaction du De Bello Gallico, c'est-à-dire en 46 avant notre ère, pendant la marche triomphale par laquelle Jules César, se rndant au Capitole, célèbra sa conquête de la Gaule, les soldats du cortège chantaient des vers satyriques sur ls impudiques relations de leur général avec le roi de Bithynie.

"César a mis sous lui la Gaule, Nicomède a mis sous lui César.
Voyez, César triomphe aujourd'hui parce qu'il a mis suis lui la Gaule.
Nicomède ne triomphe pas, bien qu'il ait mis sous lui César".

Gallias Caesar subegit, Nicomedes Caesarem ;
Ecce nunc Caesar triumphat, qui subegit Gallias ;
Nicomedes non triumphat, qui subegit Caesarem
(5)

Jules César n'aurait pu décemment parler d'actes de pédérastie qui en Gaule, à sa connaissance, auraient été commis même sans sa participation. Par conséquent, de son silence il n'y a pas lieu de conclure que les Gaulois ne fussent point coutumier de cette honteuse pratique. Cependant, nous n'avons aucune raison de croire que sur ce point ils aient été plus immoraux que ne l'étaient dans l'antiquité les Grecs et les Romains. La vingt-troisième idylle de Théocrite (6), composée par un Grec de Sicile au III° siècle avant J.-C., le second églogue du romain Virgile (7), écrite un peu plus de deux siècles après Théocrite, sont des hymnes en l'honneur de la pédérastie. Platon, dans son célèbre "banquet", ne fait pas l'éloge de cet acte contre nature, mais il ocnstate que des hommes pervers s'y livrent, et ce n'est pas des Gaulois qu'il parle, c'est évidemment de ses compatriotes qu'il s'agit ; cela dans Athènes, au IV° siècle avant notre ère, à l'époque la plus brillante de la civilisation grecque (8 ).
Dans cette société raffinée, l'acte immoral dont nous parlons était en vain interdit sous des peines sévères par des lois qu'Eschine cite dans sa plaidoirie contre Timarque (9) ; il était assez fréquent pour apparaître comme chose toute naturelle dans un passage du dialogue que Platon a intitulé Politeia et où il traite du gouvernement des cités. Un des interlocuteurs s'adresse à Socrate, le grand philosophe, émet l'hypothèse qu'un homme tombe amoureux, soit d'un mâle, soit d'une femelle (10), et Socrate ne proteste pas.
Mais quittant l'antiquité classique, les Grecs et les Romains, revenons à notre sujet d'étude. Quoiqu'en aient dit les historiens grecs dont nous parlions tout à l'heure, il n'y a pas de motif sérieux pour penser qu'il y eût chez les Gaulois une plus grande proportion de pédérastes qu'à Rome au temps où écrivait Virgile et que chez les Grecs de Sicile au III° siècle avant notre ère, ou que dans la république athénienne parmi les contemporains de Platon.
Il ne faut pas toujours accepter sans réserve ce que les historiens grecs racontent d'après des récits de voyageurs.
(…) [longue digression sur la prostitution sacrée chez les peuples sémitiques]
Jamais la sodomie n'a pris chez les Européens le caractère d'une institution religieuse. Elle n'a toujours été qu'une exception. On n'en trouve pas d'exemple dans les textes irlandais paîens où l'on voit apparaître sans voile l'adultère et l'inceste.
La reine Medb accompagne à la guerre son mri le roi Ailill, l'armée traverse une forêt. Medb en profite pour se cacher derrière un arbre et là, en plein air, profitant de l'éloignement de son mari, elle se livre à Fergus, son amant, un des guerriers qui accompagnent Ailill. Aujourd'hui les officiers qui vont au bal déposent dans l'antichambre et accrochent à un porte-manteau le ceinturon auquel est suspendu le fourreau qui contient leur épée. De même Fergus, pour être plus à l'aise, s'était désarmé. Un espion envoyé par le roi s'empara de son épée, et, quand Fergus voulut rerprendre ses armes, il fut réduit à remplacer dans le fourreau son épée métallique par une épée de bois taillée dans une branche d'arbre (11). Voilà pour l'adultère. Quant à l'inceste, on peut citer Clothru, fille de roi ; après avoir été simulténément la femme de ses trois frères, en avoir eu un fils, le roi Lugaid, elle aurait épousé ce fils, et lui aurait donné un fils qui fut roi comme son père et comme son bisaïeul (12).
Mais dans la vieille littérature irlandaise, à côté de l'adultère et de l'inceste, aucune trace de pédérastie. Quand les néo-Celtes ont voulu traduire le mot hébreu que saint Jérôme rend par effeminati, ils ont dû emprunter à la Vulgate, Genèse, chap. xiii, verset 13, le mot latin de la langue ecclésiastique, sodomita (13).
Aristote, qui a le premier mis en circulation l'accusation de pédérastie, portée en masse contre les Gaulois, a évidemment généralisé un fait isolé qu'un voyageur grec avait observé.
Je suis sur ce point beaucoup plus affirmatif qu'Amédée Thierry lorsqu'il a écrit ce qui suit :
"Les femmes de la Gaule étaient généralement blanches, d'une taille élégante et élevée ; leur beauté était célèbre chez les anciens. Cependant ces mêmes anciens, soit à tort, soit à raison, accusent les Gaulois d'un vice honteux que produit trop souvent, dans cet état de société, la grossièreté des mœurs unie à la séquestration des femmes" (14).
Je dis que l'acusation dont il s'agit a été à tort portée contre les Gaulois ; et pour avoir expliqué la pédérastie par la grossièreté des mœurs et par la séquestration des femmes, il faut qu'Amédée Thierry ait bien mal connu le monde gréco-romain. Enfin où a-t-il vu queles Gaulois séquestrassent leurs femmes plus qu'on ne le faisait en Grèce et à Rome ?
Suivant Aristote, la pédérastie, habituelle chez les Celtes si nous l'en croyons, était le résultat de ce qu'il y avait chez eux un sens politique supérieur à celui de leurs contemporains. Les écrivains postérieurs, qui dans l'antiquité ont reproduit l'assertion d'Aristote, en en tirant non un éloge, mais une accusation d'immoralité, ont prétendu par là masquer une des turpitudes de la société grecque en faisant croire à leurs lecteurs que les plus immoraux étaient les barbares.


NOTES :
(1) Politique, 1, II, c. VI, § 6 ; édition Didot, t. I, p. 511, l. 42-43
(2) Diodore de Sicile, l. V, c. 32, § 7 ; édition Didot, t. I, p. 274, l. 3-11.
(3) Athénée, l. XIII, c. 90 ; édition Teubner, t. III, p. 86, l. 7-9.
(4) Bouché-Leclercq, L'astrologique grecque, p. 340-341.
(5) Suétone, Diuus Julius, c. 49.
(6) "Un homme fort passionné aimait un cruel adolescent", etc…
(7) Formosum pastor Corydon ardebat Alexin, etc…
(8 ) c. ix, édition Didot, t. I, p. 665.
(9) § 16, 21, Didot, Oratores Attici, t. II, p. 32-33 ; cf. Samuel Petit, Leges Atticae, p. 472-473.
(10) livre V, p. 468 ; édition Didot, t. II, p. 95, l. 46-47.
(11) Lebor na hUidre, p. 65, col. 2, l. 31 et suivantes.
(12) Livre de Leinster, p. 23, col. 2, l. 1-4. Keating, Forus Feasa, édition de 1811, p. 406 ; traduction O'Mahony, p. 287-288. La légende de Fergus et Medb, et celle de Clothru semblent avoir été connues de Strabon. ainsi s'expliquerait le passage où, livre IV, chap. v, § 4, parlant des Irlandais, il a écrit qu'ils trouvent bien de : phaneros misgesthai tais te allais gunaixi kai metrasi kai adelphais (en caractères grecs dans le texte).
(13) L'auteur de la traduction bretonne de la bible publiée par la trinitarian Bible Society de Londres a évité cette explession exotique en faisant un contresens, en la remplaçant par gast "femme de mauvaise vie", au pluriel gisti.
(14) Histoire des Gaulois, t. IV, c. i.
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Messagede Patrice » Lun 15 Nov, 2004 15:25

Salut,

Sur ce sujet, il y a un passage sur l'homosexualité initiatique chez les Celtes par Dumézil dans Heurs et malheurs du guerrier (au sujet de Gwyddion et de son frère, notamment).

Et Bernard Sergent à écrit tout un ouvrage aussi sur l'homosexualité dans la mythologie grecque, en 1986, je crois.

A+

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Messagede lopi » Lun 15 Nov, 2004 15:28

Bernard Sergent Homosexualité et initiation chez les peuples indo-européens Payot
Bien
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Messagede Patrice » Lun 15 Nov, 2004 15:29

Merci Lopi, de clarifier le contenu de ma pauvre cervelle encombrée de références...
:lol:

A+

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Messagede lopi » Lun 15 Nov, 2004 15:34

St Thomas d'Aquin disait : Je crains l'homme d'un seul livre Tu ne seras pas celui-là donc.
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Messagede Lilou » Lun 15 Nov, 2004 17:02

Me voici très impatiente de lire vos analyses Messieurs :wink:
Car j'espère qu'elles vont suivre, ce sujet fait bavasser trop de gens, il est temps de savoir si oui ou non les Celtes étaient "des Grecs" ( :twisted: )

ou plus exactement , en redevenant sérieuse, les Guerriers pratiquaient -ils la sodomie en rite ? :shock:

(oui oui on garde les questions sexuelles :roll: )
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Messagede Muskull » Lun 15 Nov, 2004 17:22

Ce n'est pas une réponse mais une question. :D

Dans la Razzia, nous voyons Cuchulain résister vaillamment et avec aides (combien de chaudrons pour l'éteindre ? :lol: ) aux attraits féminins...
N'y avait-il pas pour la classe guerrière un interdit en "période claire" sur une relation "approfondie" avec le féminin pour ne pas "émousser son fer". :wink:

Ceci pourrait expliquer celà, c'étaient de vaillants jeunes hommes ! :roll:

Mais ouf, nous avons passé Samain, sage Fergus, sage ! :lol: :lol: :lol:
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Messagede Fergus » Lun 15 Nov, 2004 17:45

Voici le passage cité par Patrice, extrait de Heur et malheur du guerrier, de G. Dumézil :

… Les Celtes connaissaient aussi de telles traditions. Le Mabinogi de Math, fils de Mathonwy, en donne une variante d'autant plus intéressante qu'elle s'insère dans une plus vaste structure. Les principaux héros, dérivés de figures mythiques, en sont le groupe désigné sous le nom collectif d' "Enfants de Don" qui se distribuent sur les trois fonctions indo-européennes d'une façon plus complète que les chefs des "Tribus de la Déesse Dana" irlandaises, auxquels ils correspondent. Les mâles sont Gwydion, Eveidd, Gilvathwy, Govannon, Amaethon, auxquels est jointe une sœur unique, Aranrhod, mère elle-même de l'illustre Lleu – le Lug irlandais, le Lugus des Gaulois. Les "fonctions" du premier et des deux derniers des cinq frères sont claires : en toute circonstance, dans ce Mabinogi et ailleurs, Gwydion est un grand sorcier, tandis que Govannon et Amaethon, conformément à leurs noms (1), sont le Forgeron et le Laboureur. D'Eveidd il n'est dit qu'une chose : en compagnie de Gilvathwy, c'est ui qui remplace le roi Math dans les visites à travers le pays que comporte le rang royal, ce qui donne à ces deux personnages, entre le sorcier d'une part, l'artisan et l'agriculteur d'autre part, un rôle noble, plus proche de la royauté dans ses tâches temporelles. De Gilvathwy nous savons davantage. Le roi Math devait toujours, sauf en temps de guerre, avoir les pieds posés dans le giron d'une fille pucelle. Gilvathwy tomba un jour amoureux fou de la jeune fille pour lors en service. Son frère Gwydion, le sorcier, le voyant dépérir, suscita par fantasmagorie une guerre cruelle avec un pays voisin ; laissant la pucelle dans son palais, le roi partit avec l'armée et Gilvathwy put satisfaire sa passion avant de l'y rejoindre. Informé de l'attentat dès son retour, le roi Math, lui-même sorcier, imposa aux deux complices un châtiment remarquable : de deux coups de sa baguette magique (hudlath), il transforma Gilvathwy en biche, Gwydion en cerf, et les condamna à vivre en couple dans les bois pendant un an. Au bout de ce temps, les deux bêtes revinrent à la cour en compagnie de d'un faon vigoureux. Deux nouveaux coups de baguette transformèrent la biche en sanglier, le cerf en laie, tandis que Math donnait au faon la forme humaine et le faisait baptiser sous le nom de Hyddwn (dérivé de hydd, "cerf"). Au terme de l'année, le couple reparut avec un marcassin dont le roi fit un garçon qu'il nomma Hychtwn (dérivé de hwch "porc"), et le sanglier fut transformé en louve, la laie en loup. Après un an de vie sauvage, les deux animaux revinrent avec un beau louveteau. Cette fois, non seulement le petit fut fait homme sous le nom de Bleiddwn (dérivé de blaidd "loup"), mais ses père et mère, "suffisamment punis, selon le roi, par la grande honte d'avoir eu des enfants l'un de l'autre", se retrouvèrent Gwydion et Gilvathwy comme trois ans auparavant. Un tercet inséré dans le Mabinogi révèle la finalité de cette triple naissance :

Tri meib Gilvaethwy en(n)wir,
tri chenrysseddad kywir,
Bleiddwn, Hyddwn, Hychtwn hir.


Trois fils du pervers Gilvathwy :
trois vrais guerriers éminents
Bleiddwn, Hyddwn, Hychtwn le long.

L'hapax cenryssaddat (cynrhysseddad) est traditionnellement traduit "combattants" (lady Guest), "champions" (Ellis-Lloyd), "guerriers éminents" (Loth), "Krieger" (Buber, Mülhausen), et, bien que l'étymologie en soit obscure, il n'y a pas de raison de récuser ce sens. Ainsi, dans le groupe des Enfants de Don, la fonction guerrière est assurée, à travers Gilvathwy (car c'est lui, et non Gwydion, qui est à l'origine des méfaits, et, dans le tercet, Bleiddwn, Hyddwn et Hychtwn sont dits ses fils, et non ceux de Gwydion) par ces trois vigoureux jeunes gens dont les affinités animales ne sont pas métaphoriques, mais congénitales. On remarquera que deux des types de quadrupèdes compromis dans cette aventure rappellent plusieurs des incarnations de Verethragna (héros iranien avestique, note de Fergus), notamment la plus fameuse (sanglier, bouc et bélier sauvage), et que la troisième évoque le nom des Scandinaves úlfhednar "hommes à peau de loup". On soupçonne aussi, dans ces accouplements qui sont inhabituels même dans les légendes, le souvenir de liaisons homosexuelles comme en connaissent souvent les sociétés de guerriers ; qu'on pense non seulement aux pratiques d'éducation dorienne, crétoises, mais aussi, dans le monde germanique, à ce qu'Ammien Marcellin, XXXI, 9, 5, dit des Taifali, avec une indignation qui l'empêche sans doute de comprendre la vraie valeur de l'usage dont il parle : chez ce peuple guerrier, les jeunes gens déjà pubères servent au plaisir des guerriers, apparemment sans autre limite que la durée de leurs charmes – aetatis uiriditatem in eorum pollutis usibus consumptori – "sauf celui qui, tout seul, capture un sanglier ou tue un ours énorme et qui se trouve alors affranchi de cette souillure, conluuione liberatur". Ammien interprète les faits dans la perspective morale des vertueux hypocrites de son temps, mais on peut penser, d'après la généralité de la pratique et l'épreuve qui y met fin, que, dans ces couples de mâles, l'un récupérait en protection et en formation ce qu'il donnait en plaisir et que l'autre, sous sa responsabilité, préparait son jeune partenaire à rencontrer dignement aprum ou ursum immanem. Les sociétés d'hommes germaniques et celtiques devaient parfois comporter ainsi un élément sexuel que les convenances n'ont pas permis aux auteurs chrétiens d'exprimer, mais qu'on est tenté de restituer sous certaines camaraderies, sous certaines liaisons généreuses d'aînés et de cadets.


NOTES :
(1) Amaeth "laboureur", gov (pl. govaint) "forgeron" (govaniaerth "art du forgeron"), encore en gallois moderne (orthographié gof, etc.). Les noms des autres enfants de Don n'ont pas d'étymologie certaine. Gilvathwy (variantes Gilvaethwy, Cilv-) contient peut-être un premier terme apparenté à irl. gilla "garçon, knight". Il existe d'autres listes, postérieures et visiblement altérées, des Enfants de Don. Sur ce groupe, v. Alwyn et Brinley Rees, Celtic Heritage, p. 50-53.


(G. Dumézil, in Heur et malheur du guerrier, Flammarion, pp. 211-214)
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Messagede lopi » Dim 01 Mai, 2005 7:06

400 espèces de mammifères minimum ont des comportements homosexuels. Pourquoi pas les Cletes?
Quant est-il du plus grand héros celtique : Cuchulainn et de son ami Ferdead : nous dormions dans le même lit... chacun s'approcha de l'autre et lui donne trois baisers...) Un pendant à Hercule et Hilas?
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Messagede lopi » Ven 20 Mai, 2005 9:01

Et Galehot et Lancelot finalement? N'est-ce pas une histoire - pas que ça bien sûr - homosexuelle?
Dans le Banquet, Aristophane disait que l'amour n'était rien d'autre que le désir de retrouver cette unité primordiale de l'Hermaphrodite, séparé par Zeus lui-même, cette quête de l'Un en qq sorte. Le Un-individu-homosexuel-autonome : le guerrier parfait???


Pour se faire une idée de l'homosexualité antique, petite bibliographie :

Boswell J., Les unions du même sexe dans l'Europe antique et médiévale, Paris, Fayard, 1996, 540 p.
Brisson L., Le sexe incertain. Androgynie et hermaphrodisme dans l'Antiquité gréco-romaine, Paris, 1997, 172 p. (Vérité des mythes).
E Buffière, Éros adolescent.La pédérastie dans la Grèce antique, Paris, Les Belles Lettres, 1980.
Calame Cl., L'Eros dans la Grèce antique, Paris, 1996
Cantarella E., Selon la nature, l'usage et la loi. La bisexualité dans le monde antique, Paris, 1991, 342 p.
K. J. Dover, Homosexualité grecque, Grenoble, La Pensée sauvage, 1982.
Flacelière R., L'amour en Grèce, Paris, 1971, 234 p.
Grimal P., L'amour à Rome, Paris, 1979, 347 p. (Confluents).
H.-I. Marron, Histoire de l'éducation dans l'antiquité, Paris, Le Seuil, 1948, rééd. « Points-Histoire », 1981.
Meier M.H.E., De Pogey-Castries L.-R., Histoire de l'amour grec dans l'antiquité, Paris, 1980, 316 p
Robert, J.-N., Eros romain. Sexe et morale dans l'ancienne Rome, Paris, 1997, 392 p.
Schnapp A., Le chasseur et la cité. Chasse et érotique dans la Grèce ancienne, Paris, 1997
B. Sergent, Homosexualité et initiation chez les peuples indo-européens, Paris, 1996, Payot.
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Messagede Adcanaunos » Ven 20 Mai, 2005 10:02

Question : le Celte est-il bien un mammifère ? :roll:
Site Internet : http://luern.free.fr
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Messagede Adcanaunos » Ven 20 Mai, 2005 10:05

:idea: Réponse dans le De Bello Gallico, Livre VII, 47...
Site Internet : http://luern.free.fr
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Messagede lopi » Ven 20 Mai, 2005 11:38

j'suis pas spécialiste de l'archéologie, mais le Celte est bien de la famille de mamie fer.
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Messagede Orgenomeskos » Mar 26 Juin, 2007 19:34

Salut,

Je viens de publier une nouvelle fiche sur l’encyclo consacrée à l’homosexualité chez les Celtes de l’antiquité. Cette fiche est axée autour de deux aspects distincts qui ressortent au travers des sources antiques :

- Un amour viril entre guerriers.
- Une forme d’homosexualité « initiatique » ?

http://www.arbre-celtique.com/encyclopedie/update/encyclo_update.php?dicord=4&dictra=SEE&diccpl=5628

Il serait intéressant que vous me donniez votre avis et que vous me fassiez part de vos suggestions et compléments éventuels. Ai-je bien interprété les sources antiques ? Mes interprétations sont-elles compatibles avec ce que l’on sait de l’homosexualité initiatique prêtée à différentes populations indo-européennes ?

Merci pour vos remarques !
Dernière édition par Orgenomeskos le Mar 26 Juin, 2007 19:58, édité 1 fois.
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Messagede Pierre » Mar 26 Juin, 2007 19:55

Salut à tous,

Avec ce lien ça marche mieux :wink:

http://www.arbre-celtique.com/encyclope ... e-5628.htm

Le modéle "update" étant réservé aux gentils contributeurs :lol:


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