Je précise : il semble que l'on n'ait pas pu établir un lien entre le Pardon et d'éventuelles manifestations pré-chrétiennes. Donc, faute de preuve, on ne peut rien affirmer.
Ceci dit, les processions posent quelques problèmes d'interprètation, c'est le moins que l'on puisse dire...
Nous avons, par exemple, le même problème avec la procession d'Echternach et le culte rendu dans cette ville à saint Willibrord.
Comme elle en a l'habitude, l'Eglise a fini par récupérer ce qu'elle a pourfendu pendant des siècles : n'admet-elle pas aujourd'hui que la Terre est ronde ?
Bref, saint Augustin lui-même considérait que ces manifestations, ces danses, étaient de nature diabolique : le Diable lui-même était au coeur de ces manifestations.
Et cela nous ramène, une fois de plus, aux traditions charivariques, rituels à la tête desquels on trouvait le Chasseur Sauvage dans lequel tous les théologiens s'accordent à reconnaître l'image de Satan.
Ce qui nous permet de faire la synthèse entre les processions jugées diaboliques par l'Eglise et les rituels charivariques, également considérés comme sataniques, c'est évidemment la célèbre histoire des danseurs de Kölbigk.
Je résume :
Une bande de jeunes gens dansent en dehors de l'église et refusent de participer à l'office en dépit des appels du curé (je pense que cela se passe durant la période de Noël, donc Solstice, Douze Jours ou Nuits, etc...).
Ce dernier leur jette l'anathème -pour ne pas dire un sort...- et leur dit que si ils n'obtempèrent pas, ils danseront à cette place pendant un an sans interruption en chantant les mêmes chants.
Evidemment, ils n'obéissent pas.
Alors, le curé tente de sauver sa fille -c'était avant le célibat des prêtres...- qui se trouve parmi les danseurs, mais en essayant de la faire sortir du groupe, il lui arrache le bras, et, ne ressentant rien, elle continue de suivre la troupe.
La légende du bras arraché se retrouve, en outre, dans la périphérie de Bruxelles, mais la situation est inversée : c'est un père païen qui en essayant d'empêcher sa fille d'embrasser la religion chrétienne, lui arrache le bras.
Donc, nos danseurs dansent pendant un an, ne ressentant ni les effets des intempéries, ni ceux du viellissement.
Lorsque la malédiction est levée, ils s'écroulent et la fille du curé au bras arraché meurt. Les autres doivent fuir la ville et vont porter dans tout l'Occident la nouvelle de ce prodige résultant, bien entendu, de la volonté de l'espiègle dieu unique des chrétiens...
Or, selon certains, cette légende serait justement originaire d'Echternach (Grand-Duché de Luxembourg)et non de Kölbigk (Allemagne). Et la procession de cette ville serait donc à mettre en rapport avec cette légende.
Il y a effectivement des aspects étranges. Saint Willibrord se fête le 7 novembre, alors que la procession se déroule aux alentours de la Pentecôte, soit entre Beltaine -fête liée au feu et au dieu guerisseur Bel/Belénos, l'Apollon celte- et le Solstice d'Eté.
Durant la procession, on invoque saint Willibrord, entre autres contre l'épilepsie. Il existe également à Echternach une source réputée miraculeuse dont on prétend que l'eau peut soigner les maux des yeux.
Or, les eaux vives et surtout le soin des yeux sont particulièrement liés au culte de l'Apollon celte. Certes -oui, Patrice, tu as raison- on me rétorquera que les fontaines miraculeuses ne sont pas forcément liées à Apollon, mais ce cas d'Echternach me paraît quand même assez troublant...
J'ajoute que l'Eglise a bien été obligée de reconnaître, et ce dès le XIe s. si je me souviens bien, que le site d'Echternach était connu pour ses vertus curatives depuis des "temps immémoriaux"...
Que dire de plus ? Pas grand'chose... Et ce ne sont pas les autorités écclésiastiques -qui semblent en savoir plus que ce qu'elles veulent bien nous dire- qui vont nous aider à y voir plus clair dans ce domaine, ce qui est assez logique...
Donc, oui nombre d'aspects des processions chrétiennes sont étranges et suscitent des interrogations, mais faute de preuve, il ne nous est pas possible d'affirmer qu'elles sont des réminiscences d'anciens cultes païens.
Et je pense qu'il en sera de même pour Auray que pour Echternach et bien d'autres exemples.
Dulovios.