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César et ses méthodes expéditivesModérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice
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Oui, je m'attendais à celle-là !
Il n'empêche que plusieurs textes classiques insistent sur le manque d'endurance des guerriers celtes lors de très longs péribles. Il s'agit de marches en Grèce, en Italie et en Asie Mineure où le climat est beaucoup plus chaud, les Celtes souffrent de la chaleur et de la soif. En pays plus tempéré, on peut supposer que les guerriers marchaient plus volontiers. Porter un équipement de 25 à 30 kg implique, quel que soit le climat, une certaine résistance. Je ne sais pas si les cavaliers disposaient de plusieurs chevaux, s'il existait quelque chose comme l'association médiévale destrier-palefroi. Dernière chose, à une époque plus ancienne, le guerrier noble est accompagné d'un porte-lance et d'un porte-bouclier, s'agit-il déjà des ambacts, c'est possible. Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
J'oubliais de répondre à Lopi :
"Quant à la stratégie, j'aime bien la stratégie gauloise : quelqu'un montre une direction, on met la tête sous le bouclier, et on fonce. Simple, parfois efficace. parfois désastreux." Le terme de tactique serait plus judicieux et sans procès d'intention, c'est le casque qu'on met sur la tête et pas le bouclier sauf si on fait la tortue au 2e ou 3 rang... Quant à la charge furieuse, c'était effectivement une tactique très souvent efficace et parfois désastreuse. Mais attention au cliché, on a aussi des milliers de Gaulois qui forment le centre (et la moitié ) des armées puniques, avancent au pas et en ordre, soutiennent le choc, reculent, ne plient pas, laissent beaucoup de pertes mais donnent le plus souvent la victoire à Hannibal. Dernière remarque, les mercenaires gaulois d'Hannibal sont équipés principalement du bouclier et de l'épée ce qui est en contradiction avec ce que j'ai dit plus haut sur l'épée en tant qu'arme du dernier duel. Ce dernier point est un bon exemple des limites de nos connaissances et peut-être de notre capacité de comprendre comment cela fonctionnait réellement. Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
Sedullos, tu peux citer tes sources pour ça, stp
Existe-t-il des études sur la pérennité des techniques de taille jusqu'à la Renaissance? Ou des idées à ce sujet?
Salut,
Lopi, pour le passage que tu cites, je n'ai pas de sources à proprement parler mais il s'agit d'appliquer une simple logique. Les nobles gaulois combattent le plus souvent à cheval donc ils doivent maîtriser l'équitation avec armes et équipements défensifs, la guerre n'étant pas une simple randonnée. Les ambacts suivent le chef partout : si le chef est à cheval, il y a des chances raisonnables pour que les ambacts le soient aussi. Je vais vérifier pour les soldures du roi des Sotiates, dans la Guerre des Gaules de César mais, il me semble bien que les 600 sont à cheval. Après on peut toujours contester les chiffres. Quant à la chasse à courre, c'est la chasse noble par excellence et elle constitue un entraînement à la guerre, le cerf ou le sanglier n'étant pas des proies faciles. En qui concerne la pérennité des techniques de taille, je ne sais pas trop quoi te répondre. L'épée gauloise me semble bien spécifique, c'est une épée longue mais pas trop, souple et comme je l'ai dit plus haut, assez légère avec moins d'un kilo. En tant que reconstituteurs, Eporenos et moi on a certaines idées là -dessus mais on se garderait bien de les projeter sur d'autres types d'épées du Moyen Age et de la Renaissance. Il existe des forums spécialisés en escrime ou d'autres sur une période, comme celui des Guerriers du Moyen Age où des gens pourraient répondre bien mieux que moi. Les Allemands ont rédigé des traités d'escrime au XVe siècle qui ont été lus et traduits dans toute l'Europe. L'un d'eux va être édité bientôt... A suivre peut- être sur un autre fil Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
Je ne sais pas si nous parlons du même texte Lopi, mais je me souviens très clairement d'un texte (dont la référence m'échappe) dans lequel il était dit que les Gaulois devaient se soumettre à une mesure (le tour du ventre il me semble) à l'aide d'une corde. Si ce tour était trop important, le gaulois "trop gras" était soumis à un impôt supplémentaire. Si je ne me suis pas trompé, celà implique l'existence d'un devoir légal d'entretenir sa forme physique. A la question, comment les Gaulois entretenaient'ils leur forme physique? on est tenté de répondre "en s'entrainant régulièrement"....mais rien n'implique, néanmoins, un entrainement à l'usage des armes...
Salut,
Orgenomeskos a écrit : "mais rien n'implique, néanmoins, un entraînement à l'usage des armes..." Moi, je dirais bien sûr que si en ce qui concerne les guerriers" professionnels, c'est tellement évident qu'ils s'entraînaient régulièrement. Les guerriers n'ont rien d'autre à faire en dehors des fonctions et besoins naturels que de se préparer à la guerre pour l'honneur et aussi pour sauver leur peau. Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
Salut,
Faire de l’Histoire est un problème. Pour toute chose, il y a l’image que l’on a de soi, et l’image que l’on donne aux autres (où est la réalité ?). Je ressors d’anciens historiens, car la confrontation des idées n’est jamais inutile devant des certitudes. ------------------------------------------------------- De l’impossibilité des chiffres chez César Ferdinand LOT, La Gaule, réed. de 1967, pp. 137-141 : « Loin de se dénuder pour combattre, comme le veut une légende recueillie par les Anciens, friands d'anecdotes absurdes, le guerrier, le noble du moins, protégeait son corps avec une sorte de cotte de mailles imitée par la lorica romaine, selon Varron (V, 46), peut-être aussi avec des brassards et des jambières. Rien de pareil pour le pauvre fantassin. C'est lui dont le corps, sans protection, pouvait être considéré comme nu au sens de la langue militaire du Moyen Age. Il représentait déjà le vulgus inerme des textes des XIe et XIIe siècles. Quant à la tactique, c'est celle de la plupart des Barbares, au moins dans les premiers temps de la lutte, l'attaque impétueuse « en coin » (cuneatim) contre l'ennemi. Si elle ne réussit pas, c'est le découragement et la fuite. Les Celtes ignorent la guérilla. Strabon remarque qu'ils se jettent sur l'ennemi en masse et périssent aussi en masse, alors que les Ibères se ménagent, portant la guerre tantôt ici, tantôt là , guerre de « brigands » (IV, 3). Le contraste avec l'armée romaine est saisissant, particulièrement avec l'armée commandée par César. Lui n'engage au combat que des troupes aguerries et qu'il tient bien en main. Les nouvelles levées sont utilisées seulement pour la garde du camp. Dans la dernière campagne contre les Bellovaques, il ne veut même pas mettre en ligne la légion XI, qui, cependant, a huit campagnes à son actif; elle surveillera les bagages (Hirtius, VIII, 8 ). La supériorité romaine est tellement écrasante que Napoléon Ier va jusqu'à écrire : « Les Gaulois n'avaient aucune armée de ligne entretenue, exercée, et, dès lors, aucun art ni aucune science militaire. Aussi, si la gloire de César n'était fondée que sur la conquête de la Gaule, elle serait problématique. Toute nation qui perdrait de vue l'importance d'une armée de ligne perpétuellement sur pied et qui se confierait à des levées ou des armées nationales éprouverait le sort des Gaules, mais sans même avoir la gloire d'opposer la même résistance (Précis des guerres de César, p. 53-54) ». Un élément qui a joué un rôle capital, c'est la castramétation. César en a usé plus que nul autre et en a tiré des effets décisifs. Il y a même chez lui une sorte de manie de circonvallation, qui lui sera contraire, plus tard, à Dyrrachium, dans la guerre civile. L'endurance et la célérité des soldats romains à creuser des fossés, à élever des remparts et à les garnir, à disposer des pièges, est admirable. Le pic, la pioche et la pelle ont eu autant d'efficacité, pour le moins, que l'épée courte et pointue et le célèbre pilum. Enfin l'artillerie névrobalistique de siège et de campagne a eu son rôle dans les succès romains. Une dernière supériorité et qui peut paraître surprenante, c'est probablement l'égalité ou même la supériorité numérique des armées de César. Qui ne partage le jugement de Napoléon III à propos de la campagne de l'an 702 de Rome (52 av. J.-C), qui aboutit au triomphe de César à Alésia ? « La campagne de 702 est sans contredit la plus intéressante sous le double point de vue politique et militaire. A l'historien, elle offre la scène émouvante des peuplades, jusqu'alors divisées, s'unissant dans une même pensée nationale et s'armant afin de reconquérir leur indépendance. Au philosophe, elle présente comme résultat consolant (sic) pour les progrès de l'humanité le triomphe de la civilisation contre les efforts les mieux combinés et les plus héroïques de la barbarie. Enfin, aux yeux du soldat, c'est le magnifique exemple de ce que peuvent l'énergie et la science de la guerre chez un petit nombre en lutte avec des masses sans organisation et sans discipline (Histoire de Jules César, t. II, p. 450) ». Mais les armées gauloises représentaient-elles vraiment des masses, comme le veut Napoléon III ? L'oncle en doute fort en ce qui touche l'armée enfermée dans Alésia : « Mais est-il vrai que Vercingétorix s'était renfermé avec 80.000 hommes dans la ville qui était d'une médiocre étendue? Lorsqu'il renvoie sa cavalerie, pourquoi ne pas renvoyer les trois quarts de son infanterie ? 20.000 hommes étaient plus que suffisants pour renforcer la garnison d'Alise, qui est un mamelon élevé qui a 3.000 toises de pourtour et qui contenait d'ailleurs une population nombreuse (?) et aguerrie. Il n'y avait dans la place des vivres que pour trente jours; comment donc enfermer tant d'hommes inutiles à la défense, mais qui devaient hâter la reddition ? Alise était « une place forte par sa position; elle n'avait à craindre que la famine. Si, au lieu de 80.000 hommes, Vercingétorix n'eût eu que 20.000 hommes, il eût eu pour cent vingt jours de vivres, tandis que 60.000 hommes tenant la campagne eussent inquiété les assiégeants. Il fallait plus de cinquante jours pour réunir une nouvelle armée et pour qu'elle pût arriver au secours de la place. Enfin, si Vercingétorix eût eu 80.000 hommes, peut-on croire qu'il se fût enfermé dans les murs de la ville ? Il eût tenu les dehors à mi-côte et fût resté campé, se couvrant de retranchements, prêt à déboucher et à attaquer César (Précis des guerres de César, p. 110) ». Sur ce dernier point, Napoléon est en défaut. Vercingétorix a commencé par tenir les côtes. Mais ces côtes ne couvraient qu'environ 40 hectares, à peine de quoi contenir 10.000 hommes. C'est qu'en effet il faut 24 hectares en moyenne pour une légion de 6.000 hommes, nécessité de tous les temps, car le Felddienst Ordnung allemand de la fin du siècle dernier exige pour le bivouac d'un bataillon de 1.000 hommes un espace de 4 hectares, soit 250 hommes à l'hectare. C'est la même superficie que présentent en moyenne les camps fixes romains pour une légion sous l'Empire. Bonn a 25 hectares, Lambèse 21, Neuss 24,70. Ce dernier camp était fait pour loger une légion (5.280 hommes), deux cohortes auxiliaires (1.000 hommes), une aile de cavalerie (120), au total 6.400, soit 259 hommes à l'hectare. En admettant que la légion de César fût forte de 4.000 hommes seulement, il disposait de 40.000 soldats romains, non compris cavalerie et auxiliaires. Il est admissible que 20.000 Gaulois ou moins encore se soient laissé enfermer par ces forces. Avec l'effectif de 80.000, c'est inexplicable. D'une façon générale, Napoléon Ier paraît sceptique touchant la supériorité numérique des Gaulois ou des Germains. Ainsi, dans son exposé de la première des campagnes, il s'efforce de démontrer que les Helvètes et les Germains d'Arioviste n'étaient pas plus nombreux que les Romains (Précis des guerres de César, p. 35). Il accepte cependant les chiffres des belligérants fournis par l'auteur des Commentaires. Il y a lieu de s'en étonner. Napoléon III, sur un point, est plus perspicace : il a fait calculer le nombre de voitures qu'il eût fallu pour le transport de 368.000 Helvètes et autres. On trouva 8.500, traînées par 34.000 bêtes (Histoire de Jules César, t. II, p.58-59). Et s'il eût su que l'attelage antique ne permettait que le quart du transport de l'attelage moderne, il eût compris encore mieux l'impossibilité des assertions de César. La queue de la colonne eût été encore en Suisse quand la tête était près du mont Beuvray. L'assertion de César de la déroute de 430.000 Germains (Usipètes et Tenctères), sans que les Romains perdent un seul homme, passe les limites tolérables de l'impudence. Les chiffres de l'année venant au secours d'Alésia sont non moins inadmissibles. Avant le XIXe siècle, nulle armée n'a pu compter 250.000 hommes, faute de routes suffisantes, faute de voitures de transport, etc. Le commandement en eût été, du reste, impossible, comme le montre l'exemple de Napoléon dans sa campagne de Russie. On peut s'émerveiller que Vercingétorix ait demandé 15.000 cavaliers. Le roi de France eût été incapable, avant le XVIe ou même le XVIIe siècle, de réunir un pareil nombre, alors que son royaume était sensiblement plus peuplé que la Gaule. Il est probable aussi que César a été trompé. Quand ses informateurs lui disent que les Bellovaques peuvent lever 100.000 combattants, ce qui suppose une population de 400.000 têtes, plus que le département de l'Oise représentant leur « cité », ils lui mentent, sans doute pour l'intimider. Néanmoins, il demeure certain que le proconsul accueille volontiers des chiffres destinés à rehausser à Rome le prestige de ses armes. Le problème de l'approvisionnement n'a pas été soulevé. Il est essentiel, cependant. L'entretien de 10 légions, n'eussent-elles en tout que 35.000 à 40.000 hommes, plus la cavalerie et les auxiliaires, est chose accablante. La France du XIVe siècle et du XVe siècle succombe quand elle doit entretenir le tiers à peine de ces troupes. Que pouvait-il rester aux indigènes comme provisions après les prélèvements en froment et fourrages exigés pour les armées du conquérant ? N'insistons pas davantage. Contentons-nous de signaler dans les évaluations numériques de César des impossibilités d'ordre pratique ». ------------------------------------------------------ De la représentation du guerrier celte dans la défaite et classes sociales : Lucien de Samosate : Zeuxis ou Antiochus 9. Antiochus avait seize éléphants : Théodotas ordonne de les cacher, de les dérober le plus possible à la vue des ennemis ; puis, quand on sonnera la trompette, que la mêlée commencera, qu'on en viendra aux mains, que la cavalerie des Galates se mettra à charger, et que leur phalange, en s'ouvrant, livrera passage aux chars poussés en avant, alors quatre des éléphants s'élanceront sur chacune des divisions de la cavalerie ennemie, et les huit autres sur les chars armés de faux ou traînés par deux chevaux. « Ce sera, disait-il, le moyen d'effrayer les chevaux des Galates, qui se jetteront, en fuyant, sur leur infanterie ». Ce fut ce qui arriva. 10. Les Galates et leurs chevaux, n'ayant jamais vu d'éléphants, sont si épouvantés de ce spectacle inattendu, que, loin même de ces animaux, au seul bruit de leurs cris, à la vue de leurs défenses, dont la blancheur était relevée par la couleur noire de leur corps, à l'aspect de leurs trompes dressées et menaçant de saisir ce qu'ils pourraient rencontrer, ils lâchent pied avant qu'on en vienne à une portée de trait, et s'enfuient en désordre : les fantassins s'entre-percent de leurs lances, et sont foulés aux pieds des cavaliers, qui se ruent sur eux de toute leur vitesse ; les chars, retournés contre leur propre parti, ensanglantent leur passage, et, comme dit Homère, Ils tombent, et tombant roulent avec fracas.(Il. XVI,379). Les chevaux, une fois lancés hors de leur route et ne pouvant tenir contre les éléphants, jettent à bas leurs conducteurs, Traînent par les sentiers le char vide et sonore, (Il. XI, 460), coupent et déchirent avec les faux ceux mêmes de leurs amis qui sont renversés : or, combien n'y en avait-il pas de gisants au milieu de cet affreux tumulte ! Cependant les éléphants poursuivent leur course, écrasant sous leurs pas, lançant en l'air avec leurs trompes, et perçant de leurs défenses tout ce qu'ils rencontrent ; en un mot, ils font remporter à Antiochus une victoire complète. 11. La plupart des Galates périssent dans un immense carnage, quelques-uns sont faits prisonniers ; le reste, en petit nombre, se sauve à travers les montagnes. Les Gaulois de la frise de Cività Alba : ou comment l’oligarchie piétine l’infanterie Strabon résumant l'impression qui se dégage de l'histoire militaire des Gaulois (IV, 4, 2). « Tous les peuples appartenant à la race celtique sont passionnés de guerre, irritables et prompts à en venir aux mains, du reste simples et pas méchants; à la moindre excitation ils se rassemblent en foule et courent au combat, cela ouvertement et sans aucune circonspection, de sorte que la ruse et l'habileté militaire viennent facilement à bout de leurs efforts. On n'a qu'à les provoquer quand on veut, où l'on veut et pour le premier prétexte venu, on les trouve toujours prêts à accepter le défi et à braver le danger, sans autre arme même que leur force et leur audace. D'autre part, si on les prend par la persuasion, ils se laissent amener aisément à faire ce qui est utile, témoin l'application qu'ils montrent aujourd'hui pour l'étude des lettres et de l'éloquence. Cette force dont nous parlions tient en partie à la nature physique des Gaulois qui sont tous des hommes de haute taille, elle provient aussi de leur grand nombre. Quant à la facilité avec laquelle ils forment ces rassemblements tumultueux, la cause en est dans leur caractère généreux qui leur fait ressentir l'injure à leurs voisins comme la leur propre et s'en indigner avec eux... ». Strabon continue (IV, 4, 5) : « A leur franchise, à leur fougue naturelle, les Gaulois joignent une grande légèreté et beaucoup de fanfaronnade ainsi que la passion de la parure car ils se couvrent de bijoux d'or, portent des colliers d'or autour du cou, des anneaux d'or autour des bras et des poignets et leurs chefs s'habillent d'étoffes teintes de couleurs éclatantes et brochées d'or. Cette frivolité de caractère fait que la victoire rend les Gaulois insupportables d'orgueil tandis que la défaite les consterne. Avec leurs habitudes de légèreté, ils ont cependant certaines coutumes qui dénotent quelque chose de féroce et de sauvage dans leur caractère mais qui se retrouvent, il faut le dire, chez la plupart des nations du Nord. Celle-ci est du nombre; au sortir du combat ils suspendent au cou de leurs chevaux les têtes des ennemis qu'ils ont tués et les rapportent avec eux pour les clouer comme autant de trophées aux portes de leurs maisons… ». Albert GRENIER, Les Gaulois, réed. 1970, pp. 163-164 : « Et cependant, malgré leur courage, malgré leur intelligence, malgré leur nombre à peu près constamment supérieur à celui des Romains, les Gaulois furent presque constamment battus et la conquête de la Gaule fut pour Rome infiniment moins longue et moins difficile que celle de l'Espagne. A quoi tient cette infériorité ? Strabon nous l'indique. Les Espagnols faisaient la guérilla; ils n'étaient jamais vaincus que partiellement et se trouvaient toujours en état de continuer la lutte. Au contraire, c'est par masse que les Gaulois avaient l'habitude de combattre; ils livraient bataille avec toutes leurs forces; battus, ils se trouvaient réduits à l'impuissance. Ils aimaient le combat loyal, sans embuscade, même sans tactique et en considéraient l'issue comme une sorte de jugement de Dieu. S'ils étaient vaincus, c'est que leurs dieux les avaient abandonnés et n'approuvaient pas leur résistance; il ne restait donc qu'à se soumettre. César s'étonne parfois de leur empressement à capituler. Il venait à peine, dit-il, d'apprendre la victoire de son lieutenant Sabinus que les Gaulois accouraient déjà pour lui apporter leur soumission. « Autant les Gaulois », conclut-il, « sont enthousiastes et prompts pour prendre les armes, autant ils manquent de fermeté et de ressort pour supporter les revers. » Les autres écrivains antiques les accusent généralement de se fatiguer et de se décourager vite. Ils avaient aimé passionnément, autrefois, la bataille qui exalte l'homme au-dessus de lui-même, la ruée en masse animée d'une irrésistible frénésie. Ils poussaient droit devant eux en frappant de grands coups, persuadés que la violence de l'attaque devait l'emporter sur toutes les manœuvres de l'ennemi et sur tous les obstacles. Civilisés et devenus sédentaires, ils avaient perdu de leur vigueur sans changer leur méthode et sans acquérir l'art de se battre. Leur dernière bataille, celle que l'armée de secours vint livrer sous les murs d'Alésia est caractéristique à cet égard. Dès leur arrivée, les Gaulois se ruent à l'assaut des retranchements de César sans les avoir reconnus. Repoussés, ils s'en tiennent là . Cependant un cousin de Vercingétorix avait découvert un point faible de la circonvallation romaine et, dissimulant son approche, vint l'attaquer à l'heure de midi où les Romains avaient coutume de se reposer. Il avait avec lui ses soixante mille Arvernes, et Labienus, qui commandait en ce point, se trouva bientôt en fâcheuse posture. Craignant des attaques sur d'autres points, César n'osait lui envoyer des renforts. « Si vous ne pouvez plus vous défendre », se contenta-t-il de lui faire dire, « attaquez. » Mais le reste de l'armée gauloise ne paraît pas; elle est restée dans ses cantonnements et César a tout loisir de rétablir la situation en se portant lui-même avec toutes ses réserves au point menacé. Il lance alors ses cavaliers germains contre le camp gaulois au repos; ils ne sont guère qu'un millier, ils suffisent pour jeter la panique. Surprise, toute cette grande armée se disperse et s'enfuit. Vercingétorix n'a plus qu'à se rendre ». La suite au prochain épisode (peut-être). PS : à propos, Fourbos, comment écrit-on 13 en Gaulois ? A+
Ferdinand Lot a écrit : "Avant le XIXe siècle, nulle armée n'a pu compter 250.000 hommes, faute de routes suffisantes, faute de voitures de transport, etc. "
Voici à titre de comparaison, les chiffres donnés pour l'armée de Darius à la bataille de Gaugamèles en - 331 av. J.C. Arrien : 40 000 cavaliers, 1 000 000 de fantassins Diodore de Sicle : 200 000 cavaliers, 800 000 fantassins Quinte-Curce : 45000 cavaliers, 200 000 fantassins Source : Alexandre : histoire et dictionnaire.- Laffont, 2004. Que Napoléon III me pardonne mais César n'a jamais écrit que tous les Helvètes avaient été transportés en voiture. Le coin est, me semble-t-il, une formation tactique romaine et germaine plutôt que celtique. On connaît au moins une embuscade, celle où tomba le consul Postumius en Gaule Cisalpine... La question des approvisionnements de l'armée césarienne a été étudiée par Christian Goudineau dans César et la Gaule, 1990 Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
A mon humble avis la situation est différente en Perse et en Gaule.
Le bocage a posé beaucoup de problèmes aux armées, haies quasi impénétrables et chemins étroits, pas évident d'acheminer rapidement des milliers d'hommes dans ces conditions. De plus nous avons eu un fil il y a quelques temps sur la démographie gauloise et le peuplement était très important, au alentour de 15 millions voir plus ; cela pour dire qu'il était facile de se ravitailler sur les troupeaux et les greniers quite à laisser ces populations démunies pour l'hiver. L'humanisme n'avait pas encore été "inventé" et de toutes façons c'est la première chose que l'on oublie en temps de guerre. Les "dommages collatéraux" devaient être plus meurtriers que les combats à cette époque... comme actuellement. La guerre est une maladie de l'esprit. Muskull / Thomas Colin
Comme l'eau modèle la terre, la pensée modèle le possible. http://muskull.arbre-celtique.com/ http://thomascolin.fr
Salut,
Muskull, je sais bien que la Perse et la Gaule sont différentes, je répondais simplement sur la question des effectifs à la citation de Lot : "Avant le XIXe siècle, nulle armée n'a pu compter 250.000 hommes, faute de routes suffisantes, faute de voitures de transport, etc." Les armées de l'Antiquité étaient nombreuses, beaucoup plus que celles du Moyen Age et même des temps modernes. Il y avait des routes même en Gaule. Quant au bocage, on ne le trouvait pas partout. Il y avait de l'openfield. Il faut abandonner aussi le mythe de la grande forêt, il y a probablement plus de forêt en France de nos jours qu'en Gaule au 1er siècle av. J.-C. Jean-Paul Brethenoux. Sedullos Lemouico immi exobnos in catue ! ΣΕΔΟΥΛΛΟΣ (Graecum est, non legitur !)
"Honorer les dieux, ne pas faire le mal, s'exercer à la bravoure."
Salut Sedullos,
Je crois que je me suis mal exprimé. je corrige: "mais rien n'implique, dans l'extrait auquel je fais référence, un entraînement à l'usage des armes..." en effet cet extrait n'évoque qu'un entrainement physique, sans qu'il ne soit (dans mes souvenir) fais mention de l'usage des armes. Ceci n'est en aucune façon en contradiction avec ton propos...bien au contraire...l'auteur insiste juste sur cette particularité gauloise qui consiste à mesurer le 'tour de ventre" de certains et qui implique, sous peine d'amende, un entretien régulier de sa forme physique. A mon goût, il s'agit ni plus ni moins que d'une obligation d'entrainement militaire s'appliquant très certainement à une classe bien particulière de la société gauloise.
A l'époque romaine c'est une certitude, à l'époque gauloise peut-être pas...peut-être faudrait-il ouvrir un autre fil pour argumenter sur ce point, j'ai quelques documents qui pourraient être intéressants à ce sujet. Ne tombons pas pour autant dans une caricature de la Gaule pré-romaine recouverte de forêts, les défrichements étaient en effets largement entamés.
Le passage de la mesure de la ceinture : Sratbon IV, 4, 6
Sinon Ammien Mercellin 15, 12 : Le Gaulois est soldat à tout âge. Jeunes, vieux courent au combat de même ardeur; et il n'est rien que ne puissent braver ces corps endurcis par un climat rigoureux et par un constant exercice. L'habitude locale en Italie de s'amputer le pouce pour échapper au service militaire, et l'épithète de "murcus" (poltron) qui en dérive, sont choses inconnues chez eux.
Exact, merci Lopi
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