Dans un article dont je n'arrive pas à afficher le lien, mais que vous pourrez télécharger ci-dessous, Gérard Taverdet évoque la présence du F en gaulois, en alternance avec S (exemple donné par X. Delamarre : frogna / srogna - le nez, et frut(u)a / srutu - le torrent). Après avoir constaté que le F latin pouvait devenir B en galloroman,
Gérard Taverdet a écrit:Cette évolution de F latin vers B nous permet donc de voir un plus ancien F dans certaines formes aujourd'hui en B, même si elles sont d'origine gauloise; il n'est pas nécessaire d'aller bien loin, puisque les deux exemples de formes en F signalés par Delamarre semblent bien avoir produit une descendance romane; c'est le cas de *frut- “torrent”; si nous admettons cette évolution, nous allons trouver des formes en [bred-] ou [brid-], éventuellement avec le maintien d'une dentale intervocalique, du moins dans les formes anciennes, puisque ces dentales ont disparu sans laisser de traces dès avant l'époque littéraire; or nous avons noté, en toponymie, des formes en bred-; la première est dans le nom ancien de la Brenne, rivière de Côte-d'Or, qui fut notée en 659 Bridenam2; le second exemple est le nom du village de Brannay3 dans l'Yonne qui fut noté au IXe siècle Bradenas.
Le second mot signalé par Delamarre est un nom qui a désigné le nez et qu'on retrouve de l'avis général dans (se) renfrogner; mais il existe aussi en ancien français un verbe (soi) embronchier “baisser le nez” qui est généralement considéré comme d'origine obscure et qui pourrait bien avoir la même origine (p. ex. Chrétien de Troyes: si s'anbrunchent totes et plorent (Yvain, 5201; “toutes elles baissent la tête et pleurent”); cil anbrunche et chancele (Erec et Enide, v. 978; “il baisse la tête et chancelle”)
J'ajouterai que bronchier existe aussi, avec les sens de pencher, baisser, baisser tristement la tête (d'un latin populaire *bruncare d'origine obscure selon Greimas), ainsi que fronchier, qui a comme premiers sens ronfler, renâcler, et comme sens secondaires grogner, hennir, être revêche (origine obscure selon Greimas).
Il est possible de voir dans fronchier (dont le sens premier peut être rattaché au nez) un dérivé de frogna. En effet on peut facilement postuler une forme antérieure *fruncare, issue de *frunca, elle-même venant de *frucna - frogna par métathèse.