Actualité du blog "L'Armorique gallo-romaine"

[Pierre]

si je t'ai bien compris, des sanctuaires non bâtis, probablement donc des clairières où le saint concerné faisait mettre le feu à la végétation !

Ouh là

Loin de moi l'idée du druide officiant au milieu d'une clairière et coupant le gui avec une serpe d'or

Le sanctuaire non bâti est déjà faux à la tène, il l'est encore plus à l'époque gallo-romaine.

AE 1959, 00130 : Matris sacrum ex voto / circumsaeptum fani et aditus / Catulius Combardi fil(ius) / erga merita salvisque liberis eius / s(olvit) l(ibens) m(erito)

L'Ambarre Catulius fait érigé un mur d'enceinte autour du fanum. On est loin de la pâture à vaches

Au XIXe siècle, époque à laquelle nous devons la plupart des traductions des textes antiques, la vision des lieux de culte est assez classique ... Les temples sont du type greco-romain. Fanum et Templum sont donc considérés comme synonymes. Aujourd'hui, compte tenu des découvertes dans ce domaine, nous sommes bien obligés de constater que cette uniformité n'existe pas. Il y a bien deux grands types de lieux de culte : des greco-romains, et des romano-celtiques (terme préférable à gallo-romains, car il concerne aussi le domaine insulaire). L'avantage des auteurs antiques, par rapport aux traducteurs du XIXe siècle, était d'avoir sous leurs yeux ces deux types de lieu de culte. Nous pouvons donc nous demander, comment cette différence peut se traduire dans les textes antiques. Le terme fanum est d'un usage rare, et ne concerne jamais, que ce soit dans les textes antiques ou les données épigraphiques, les lieux de culte des grands centres urbains. Là, où justement on ne trouve exclusivement que des structures du type greco-romain. Pourquoi ?

@+Pierre

[Séléné.C]

Heu = le sanctuaire non bâti est déjà loin ?

Pourtant les "Vies des Saints" parlent bien d'arbres à guirlandes qu'on abat pour empêcher de les honorer, non ?

[André-Yves Bourgès]

si je t'ai bien compris, des sanctuaires non bâtis, probablement donc des clairières où le saint concerné faisait mettre le feu à la végétation !

Ouh là

Loin de moi l'idée du druide officiant au milieu d'une clairière et coupant le gui avec une serpe d'or

C'était une boutade, Pierre !

Au XIXe siècle, époque à laquelle nous devons la plupart des traductions des textes antiques, la vision des lieux de culte est assez classique ... Les temples sont du type greco-romain. Fanum et Templum sont donc considérés comme synonymes. Aujourd'hui, compte tenu des découvertes dans ce domaine, nous sommes bien obligés de constater que cette uniformité n'existe pas. Il y a bien deux grands types de lieux de culte : des greco-romains, et des romano-celtiques (terme préférable à gallo-romains, car il concerne aussi le domaine insulaire). L'avantage des auteurs antiques, par rapport aux traducteurs du XIXe siècle, était d'avoir sous leurs yeux ces deux types de lieu de culte. Nous pouvons donc nous demander, comment cette différence peut se traduire dans les textes antiques. Le terme fanum est d'un usage rare, et ne concerne jamais, que ce soit dans les textes antiques ou les données épigraphiques, les lieux de culte des grands centres urbains. Là, où justement on ne trouve exclusivement que des structures du type greco-romain. Pourquoi ?

Tandis qu'à l'inverse le terme templum est utilisé concurremment avec fanum par Sulpice Sévère ou Grégoire de Tours, par exemple, pour désigner des lieux de culte ruraux ou du moins "rurbains".

Cette problématique est très intéressante ; mais elle dépasse largement le cadre de ma petite notule sur "le Feu-du-temple" : je maintiens que, dans l'hypothèse que je propose, à savoir l'existence d'un fanum "gallo-romain" à cet endroit, le toponyme peut se révéler tautologique, résultant d'une incompréhension du terme fanum à une époque où cependant le souvenir de celui-ci ne s'était pas encore perdu et où ses ruines recevaient le nom de "temple" (< templum) dont les populations comprenaient toujours le sens. On voit au VIIe siècle l'actuel toponyme Talmas, vraisemblablement issu de thalamus, "demeure, séjour" [cf. dans les Miracula de saint Magloire à propos du fanum que "certains disaient avoir été une cour ou une demeure royale" (alii regalem aulam vel thalamum fuisse)] être interprété par le rédacteur d'une charte comme désignant un "temple de Mars" (villa quae vocatur templum Martis), sans doute parce qu'il y avait sur place "un petit fanum gallo- romain", dont les traces ont été révélées par de récentes prospections archéologiques aériennes.

Les toponymistes ont généralement adopté le point de vue que les noms de lieu formés avec le mot "temple" étaient tous issus des possessions de l'Ordre du Temple, à quelques rares exceptions comme Templemars, qui pouvaient remonter à l'Antiquité ; mais il faudrait me semble-t-il affiner cette démonstration, qui laisse de côté toute la période du Haut Moyen Âge...

Bien cordialement.

[Pierre]

Bonjour Andre-Yves,

J'avais bien écrit : "relativisons"

Si fanum désigne l'espace sacré (acceptation qui n'est pas démontrée), je ne vois aucun inconvénient à appeler templum l'édifice cultuel qui se trouve en son sein. De ce fait, "Le Feu du Temple" me perturbe beaucoup moins que si le lieu s'était appelé "le Temple du Feu". Tout comme je pense, que je ferais certainement plus sourire un Trégorrois, en parlant de "l'église de l'enclos paroissial", que de "l'enclos paroissial de l'église"

@+Pierre

[Pierre]

Pourtant les "Vies des Saints" parlent bien d'arbres à guirlandes qu'on abat pour empêcher de les honorer, non ?

Bonjour Séléné,

C'est du paganisme

Les vitae concernent une période agitée ou la religion gallo-romaine est à l'abandon. Ces phénomènes sont intéressants dans la mesure où on y retrouve des éléments concernant les religions celtique et/ou gallo-romaine. Mais attention, il ne faut pas tout prendre pour argent comptant. Il faut séparer le grain de l'ivraie. Les arbres à loques existent encore de nos jours, mais Jupiter, Mars, Lugus, etc... n'y sont plus invoqués. Au mieux, tu pourras trouver graver sur le tronc d'un arbre "I♥M". Mais il s'agira dans ce cas d'un culte qui n'a rien de jupitérien

@+Pierre

[Séléné.C]

Oui, je suis au courrant...

A part le voisin de mes parents qui accroche des CD dans son cerisier, sans doute pour honorer les fées musiciennes qui viennent s'y reposer (et quelques autres adeptes de ce culte étrange pratiqué seulement sur des fruitiers), on orne assez peu les arbres, de nos jours, sauf peut-être aux environs du soltice d'hiver, où on charge des arbres synthétiques de guirlandes lumineuses. Eventuellement, on trouvera des buissons artistement décorés d'un bout de plastique déchiré façon dentelle, et flottant dans les doigts du vent... Que diront de tout ça les historiens du XL° siècle ?

Mais,même si c'est du paganisme : tu as dit plus haut

Le sanctuaire non bâti est déjà faux à la tène, il l'est encore plus à l'époque gallo-romaine.

Et pourtant, même si (s'cusez-moi) j'ai un peu (très-très) oublié les détails, depuis l'époque de mes études (heureusement, PYB donne des références précises!) la première chose qui me vient en tête, en lisant ça, ce sont les arbres à guirlandes brûlés ou abattus.
Voilà...

[Pierre]

Salut Séléné,

Le pin que fait abattre saint-Martin n'est pas dans le sanctuaire, mais dans ses alentours

Et apparemment les défenseurs de l'arbre, se souciaient bien peu du sort du sanctuaire...

http://encyclopedie.arbre-celtique.com/ ... e-1865.htm

@+Pierre