Les Gallo-Romains

[Thierry]

Bonjour à tous !

Sais t'on quand le terme Gallo-Romain (que je n'aime pas) est apparu ? Est-ce une commodité, un raccourci tendancieux "d'historiens" anciens ?

Si on doit considérer l'influence Romaine sur les élites Gauloises (parfois très longtemps après la conquête, tout de même) comme un fait historique, pourquoi parler de Gallo-Romains, là où il n'y avait que des Gaulois ?

Les colonies de peuplement romaines ont été assez rares en dehors de la Provincia et bien souvent cantonnées aux frontières ( Bâle, Cologne par exp..)

S'il y a eu conquête et présence armée, il me semble qu'il n'y a jamais eu "d'invasion" italienne en Gaule Chevelue impliquant des transferts de population conséquentes.

Dès lors, comment expliquer cette schizophrénie gallo-romaine ?

Merci de m'éclairer.

[Patrice]

Salut,
Tu devrais lire le bouquin de Van Andriga sur la Religion gallo-romaine, paru cette année chez Errance.

Tu verrais que la conquête romaine s'est accompagnée d'une profonde réorganisation politique et économique, qui s'est resentie jusque dans la religion (le coeur d'une société traditionnelle).

A+

Patrice

[Marc'heg an Avel]

Salut,

Si on cherche une date, on peut proposer l'Edit de Caracalla, (Edit de Milan), en 212, qui octroie la citoyenneté romaine à tout individu libre né sur le territoire de l'Empire.

Le terme "Britto-romain" n'est pas utilisé depuis longtemps (Vers 1980, Léon Fleuriot), pour distinguer les Bretons citoyens de l'Empie des Bretons d'avant la conquete et l'acquis de citoyenneté.

JC Even

[Thierry]

Merci pour vos réponses.

J'ai feuilleté ce bouquin quand il est sorti, il mérite effectivement très certainement de s'y arrêter, je vais chercher à l'emprunter.

Le bouleversement de la "romanité" est très certainement immense et surtout, il est visible, mais il existe aussi ailleurs.

C'est quand même curieux cette "gallo-romanité" de toute éternité alors que, si j'ai bien compris, comme le signale Jean Claude, les Britto-Romains sont une "invention" récente résultant d'un systéme de classification établi par un historien.

Dans l'empire, en général on ne parle pas de Gréco-Romains, d'ibéro-Romains, de Numido-Romains..... pour désigner une population en tout cas.

Les Gaulois sont donc à part...

Thierry - Teuta Veliocassi

[Marc'heg an Avel]

CARACALLA était Africain ( au sens romain du terme) par son père, Gaulois par sa mère, et de plus, il était né à Lyon.

- Marcus Aurelius Antoninus Severus Augustus Caracalla : Fils de l'empereur Septime Sévère et de l'impératrice Julia Domna. Né le 04 avril 188, à Lyon. Dies imperium : 12 octobre (?) 198. Seul empereur, au plus tard dès le 27 février 212. Caracalla est assassiné le 08 avril 217, près de Carrhes.

Et pour le détail, rappelons que Septime Sévère est devenu empereur après avoir battu, à Lyon, Albinus, général romain proclamé lui-meme empereur par les légions de (G)Bretagne.

Le monde était petit, déjà à cette époque, et "Rome n'était plus dans Rome"

JC Even

[Gwalchafed]

Salut à tous,
sur le sujet de l'implantation de romains en Gaule, la république et l'Empire n'accordaient ils pas des terres aux légionnaires après leur service militaire? En ce cas l'ancienneté de la Province et du reste de la Gaule comme partie de Rome n'aurait-elle pas favorisé une grande proportion de romains dans la population?

[Marc'heg an Avel]

Observation à retenir, car il ne faut pas oublier en effet que la Narbonnaise était déjà bien romanisée avant la guerre des Gaules entreprise par Jules César, en ajoutant cette précision que la Lio Alauda (Alouette) de Jules césar était une légion gauloise de Narbonnaise.

Voir aussi les colonies romaines et latines précoces en Narbonnaise : Narbonne, Aix, Béziers, etc ...

JC Even

[Marc'heg an Avel]

LEGIO ALAUDA ! per Jovis !

[Thierry]

Oui, Narbonne, Aix et beaucoup d'autres en Provincia sont romaines, mais en Comata, il n'y a guère de colonies, sauf en frontière de la Germanie, Bâle et Cologne c'est sûr.
Je crois me souvenir d'une ville qui s'appelle Nyons, mais pour le reste, je ne sais pas.

La plupart des villes gallo romaines ne correspondent pas à une implantation de vétérans, me semble t'il.

A bientôt,

Thierry - Teuta Veliocassi

[Marc'heg an Avel]

Extrait de marikavel.org :

Colonia Claudia Ara Agrippnensis : colonie latine de Germanie IIè; aujourd'hui Cologne.

Colonia Julia Apta : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Apt (en Provence).

Colonia Augusta Apollinaris Reiorum : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui ***

Colonia Julia Augusta Aquae Sextiae : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Aix-en-Provence.

Colonia Julia Augusta Nemausus : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Nîmes.

Colonia Julia Avennio : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Avignon.

Colonia Julia Cabellio : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Cavaillon.

Colonia Julia Carcaso : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Carcassonne.

Colonia Julia Claudia Luteva : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Lodève.

Colonia Julia Dinia : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Digne.

Colonia Julia Firma Secundanorum Arausio : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Orange.

Colonia Julia Meminorum Carpentoracte : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Carpentras.

Colonia Julia Paterna Narbo Martius Decemanorum : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Narbonne.

Colonia Julia Paterna Arelatensis Sextanorum : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Arles.

Colonia Julia Paterna Septimanorum Baeterrae : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Béziers.

Colonia Octavanorum Pacensis Calassica Forum Julii : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Fréjus.

Colonia Julia Ruscino : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui ***

Colonia Julia Tolosa : colonie latine de la Gaule méridionale; aujourd'hui Toulouse.

Colonia Julia Valentia : colonie latine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Valence.

Colonia Julia Vienna : colonie romaine de la Gaule méditerranéenne; aujourd'hui Vienne (sur le Rhône).

Colonia : graphie abusive pour Glevum / Gloucester : Colonia Nervia (ou Nerviana) Glevensium.
Source, selon Rivet et Smith : Ravenna, 106-14 : COLONEAS.


JC Even

[Sedullos]

Salut,

Thierry,
>Dans l'empire, en général on ne parle pas de Gréco-Romains, d'ibéro-Romains, de Numido-Romains..... pour désigner une population en tout cas.<

Christian Goudineau a évoqué cette question dans
le Dossier Vercingétorix et dans Par Toutatis, il dit qu'on ne parle pas de Germano-Romains...
Il dit aussi et ça c'est intéressant qu'un passage de la Guerre des Gaules laisserait supposer qu'il avait à la fin de l'indépendance, non seulement des commerçants romains, comme ceux qui sont massacrés à Cenabum, mais aussi peut-être déjà des colons romains, installés sur des terres agricoles.
Ne prenant presque jamais de notes, je ne sais plus dans lequel des 2 livres se trouve cette information.

[Thierry]

Hello Sedullos, Hello Jean Claude,

Je crois que c'est dans "Par Toutatis", mais je ne mettrais pas ma tête à couper; j'ai dû le lire trop vite.

C'est vrai, il ya des commerçants romains, certainement même bien avant la Guerre des Gaules ( le vin et les esclaves sont deux enjeux majeurs pour Rome ), les colons, je ne vois pas trop. Il ne peut s'agir que d'individus relativement isolés, encore qu'il faille très certainement tenir compte de disparités importantes ( Les Eduens ou les Arvernes ont certainement plus de relations avec les Romains que les Morins ou les Calétes....)

En Belgique, Rome semble être totalement absente, c'est peut-être une des motivations de l'invasion de 57.....


En tout cas, les fondations de colonies de peuplement romaines résultent de décisions politiques connues et recensées.

A ce sujet la liste que vient de fournir Jean Claude nous indique qu'il ya une forte colonisation en Provincia, pratiquement aucune fondation en Comata.

Ceci étant, je ne veux rien démontrer. Je me pose simplement des questions sur la façon dont Rome a étendu son influence dans les esprits celtes dès lors que ce n'est vraisemblablement pas la promiscuité de populations hétèrogènes qui a créé l'individu à la fois gallo et romain.

Thierry - Teuta Veliocassi

[Muskull]

Bonsoir
Une colonisation est une colonisation, l'empire romain, pour nourrir ses armées et payer ses mercenaires avait besoin de richesses, de beaucoup de richesses...
Il accaparait donc, par la violence ou l'influence les terres les plus riches et les plus fructueuses pour son "commerce". Les régions "pauvres" comme les montagnes, les zones peu irriguées, les grandes forêts du bassin parisien (sauf proches de la Seine), l'ouest breton n'étaient pas intéressants...
Mais ils arrivaient tout de même à faire fructifier ces régions grâce au commerce "binaire" vin /esclaves...

[Thierry]

Bonjour,

J'ai reparcouru Goudineau hier soir.

En fait il évoque le massacre de Cenabum dans "César et la Gaule", "Vercingétorix", et "Par Toutatis".

Il évoque César et je crois que c'est dans le dernier (p 57 de mémoire) qu'il développe son idée sur les "negatiores" romains et l'importance prise par le traffic des esclaves dans la zone du denier d'argent ( Eduens - Sequanes - Lingons - Rèmes ).

Peuples, au demeurant alliés indéfectibles de Rome, qui ont cru (jusqu'en 52, pour les Eduens) qu'ils seraient traités en égaux.

Tout ça ne veut pas dire que les Romains étaient nombreux en Gaule à cette période de la conquête ( en dehors de l'armée, bien sûr) mais simplement que Rome avait déjà une forme d'emprise commerciale et politique sur certains peuples Gaulois.

Une colonisation est une colonisation...dis-tu Muskull.
Personnellement, je ne crois pas que ce qui s'est passé entre Rome et la Gaule ressemble au phénomène colonial tel que notre beau pays l'a lui même pratiqué.

Je pense plutôt à une acculturation via les écoles comme celle d'Autun, la diffusion du latin dans les élites et à une négation par les Gaulois eux-mêmes de leur propre passé, et c'est ça qui m'interpelle.....


Je reprends mon idée initiale. J'ai tout de même oublié Lyon qui malgré son nom celte a un statut de colonie.

Malgré tout, si on fait les comptes Lyon, Bâle, Nyons et Cologne.....ce n'est tout de même pas une colonisation homogène sur tout le territoire.( Je continue à mettre le cas de la Narbonnaise à part qui constitue pour les Romains eux-mêmes une province différenciée.)

Bien sûr il ya de nombreuses villes nouvelles à partir de la réorganisation augustéenne, mais elles sont le fait de décisions des tribus elles mêmes, comme l'abandon de Bibracte pour Autun.

Certes César a pillé, réduit en, esclavage, voir fait disparaître des peuples entiers (voir le sort des Eburons ou des Vénétes), mais après lui, il faut avouer qu'à partir de l'organisation de la Gaule sous Auguste, les Romains ont laissé beaucoup de prérogatives et une relative indépendance aux anciennes nations.

Pourtant il va y avoir un bouleversement qui se ressent dans la société et la religion.Y'a t'il eu pérsécution des druides et interdiction des cultes anciens ? Si oui était-ce le fait direct du pouvoir Romain ou de nouvelles élites en place ? J'avoue mon ignorance à ce sujet.


Avec des différences de traitement, la pression sera surtout fiscale sur les nouvelles "cités", pas même militaire (les légions sont toutes aux frontières)

Les révoltes sous l'empire, seront le fait d'individus qui sont culturellement totalement romanisés.( Il faut mettre à part les Bagaudes du IIIe siècle.)

Mais je m'égare !


A vous lire j'ai en tout cas le sentiment que mon information est incomplète et je n'ai que des bribes.Je continue donc, à être preneur de renseignements.....

A bientôt,

Thierry - Teuta Veliocassi.

[Sedullos]

Salut, Thierry,
oui, il y a eu persécution des druides sous Tibère et Claude.
Pour deux raisons,
-Rome ne pouvait accepter l'existence d'une classe sacerdotale structurée qui pouvait remettre en cause sa souveraineté
-c'est l'époque, depuis la fin de la République, où Rome est envahie par les cultes orientaux, et par une masse de mages, astrologues, considérés comme des charlatans et des agitateurs. (Cf Les Satires de Juvénal)
Comme le disent Le Roux et Guyonvar'ch, les druides ont été englobés dans la même réprobation qui frappait les "mathematici" orientaux. n n