Peuple de la province de Tarraconaise, puis de Gallécie, qui dépendait de la juridiction de Lucus Augusti. D'après Strabon, leur territoire débutait à l'ouest dans le voisinage du cap Νέριον / Nerium, l'actuel cap Finisterre (Géographie, III, 3, 5) C'est également ce que l'on peut conjecturer de la lecture de la Géographie de Ptolémée (II, 6, 2). Pline va globalement dans le même sens, mais dénomme ce cap promontorium Celticum (Histoire naturelle, IV, 111). Leur coeur de leur territoire était un vaste golfe, appelé Ἀρτάβρων λιμένα "le port des Artabres" par les marins selon Strabon, autour duquel se trouvaient leurs villes (Géographie, III, 3, 5). Ce même golfe est également mentionné par Ptolémée sous la forme Ἀρτάβρων λιμὴν (Géographie, II, 6, 2). Ce même golfe fut mentionné par Pomponius Mela, qui y voyait une quadruple embouchure, dont deux étaient celles des fleuves Mearus et Ivia (Description de la Terre, III, 9). Cette région est communément identifiée comme étant celle située autour de la ría de La Coruña et de la ría de Ferrol, dans le nord de l'actuelle province de La Corogne (Espagne).
Attestations et étymologie
Ce peuple fut mentionné sous deux noms distincts par les auteurs de l'antiquité. On le retouve ainsi mentionné sous la forme Ἄρταβροι (et ses déclinaisons) dans la Géographie de Strabon (II, 5, 15 ; III, 2, 9 ; 3, 5) et la Géographie de Ptolémée (II, 6, 21), gentem Artabrum et indirectement promunturium, quod aliqui Artabrum appellauere "promontoire que les uns l'ont appelé promontoire Artabrum (des Artabres)" dans l'Histoire naturelle de Pline (IV, 114 & 113) et Artabri dans la Description de la Terre de Pomponius Mela (III, 9). Strabon et Pline indiquent toutefois que cette dénomination serait fautive, et que le véritable nom de ce peuple serait Ἀροτρέβας (Géographie, III, 3, 5), Arrotrebae / Arrotrebas (Histoire naturelle, IV, 111 ; 114), soit les Arrotrèbes. X. Delamarre (2003) y voit un composé en *Arro-treb-, avec le suffixe *treb-, qui signifie "habitation".
Sources littéraires anciennes
Pline, Histoire naturelle, IV, 111 :"la région des Cantabres avec neuf cités ; le fleuve Sauga ; le port de Victoria des Juliobrigiens ; à 40.000 pas de ce lieu, les sources de l'Ebre, le port Blendium ; les Orgénomesques des Cantabres, avec leur port Vereasueca ; la région des Astures, la ville Noega ; dans une péninsule, les Paesiques ; puis, du ressort de Lugo, à partir du fleuve Navia, les Albions, les Cibarques, les Egovarres, surnommés Namariniens, les Jadons, les Arrotrèbes, le promontoire Celtique ; les fleuves Florius et Nelo ; les Celtiques surnommés Nériens, et, au-dessus, les Tamariques, dans la péninsule desquels sont les trois autels Sestiens, consacrés à Auguste ; les Capores, la ville de Noela ; les Celtiques surnommés Praesamarques ; les Cilènes. Parmi les îles dignes d'être nommées, Corticata et Aunios ;"
Pline, Histoire naturelle, IV, 113 :"Au Durius commence la Lusitanie: les Turdules anciens, les Pésures, le fleuve Vacca, la ville de Talabrica, la ville et le fleuve Aeminium, les villes de Conimbrique, de Collippo, d'Eburobritium ; puis un vaste promontoire s'avance dans la mer ; les uns l'ont appelé promontoire Artabrum, les autres le Grand Promontoire, d'autres, promontoire d'Olisipo à cause de la ville voisAeine: il sépare les terres, les mers et le ciel."
Pline, Histoire naturelle, IV, 114 :"À ce promontoire se termine le flanc de l'Espagne, et après qu'on l'a doublé on en voit commencer le front. D'un côté est le nord et l'océan Gaulois, de l'autre le couchant et l'océan Atlantique. On a évalué l'étendue de ce promontoire à 60.000 pas, d'autres à 90.000; bon nombre d'auteurs comptent 1.250.000 pas de ce promontoire aux Pyrénées, et ils y placent la nation des Artabres ; erreur manifeste, cette nation n'exista jamais: ce sont les Arrotrèbes, dont nous avons parlé avant le promontoire Celtique, qu'une erreur d'orthographe leur a fait placer là."
Pomponius Mela, Description de la Terre, III, 9 :"Sans quelques petits angles saillants et rentrants, elle serait à peu près droite d'un bout à l'autre jusqu'au pays des Cantabres. On y trouve d'abord les Artabres, qui appartiennent aussi à la nation celtique, et, après eux, les Astures. Les Artabres ont un golfe d'une ouverture étroite, mais d'une large enceinte, sur lequel on voit la ville d'Adobrica, et quatre embouchures de fleuves, dont deux sont peu connues même des habitants, et dont les deux autres sont celles du Mearus et de l'Ivia".
Strabon, Géographie, II, 5, 15 :"Eh bien ! Qu'à partir du promontoire Sacré on navigue vers le sud, on ne tarde pas à atteindre la Libye et l'on voit cette contrée, dont les terres les plus occidentales dépassent même quelque peu le méridien de Gadira, se détourner ensuite brusquement au sud-est, et former un étroit promontoire, mais pour s'élargir ensuite par degré: jusqu'au point où commence le pays des Éthiopiens Occidentaux, lequel limite au S. la Province Carthaginoise, et touche au parallèle de la Cinnainômophore. Et il en est de même si l'on navigue dans la direction opposée à partir du promontoire Sacré après avoir, en effet, couru droit au nord jusqu'au pays des Artabres, avec la Lusitanie à sa droite, on voit la côte tourner au plein levant, de manière à former un angle obtus au point où le mont Pyréné vient finir dans l'Océan, point auquel correspond dans le nord l'extrémité occidentale de la Bretagne, tout comme au pays des Artabres correspondent les îles Cassitérides, situées en pleine mer, à peu près sous le climat de la Bretagne. On voit donc à quel point les extrémités de la terre habitée, prise dans le sens de sa longueur, se trouvent rétrécies par la mer qui l'environne."
Strabon, Géographie, III, 2, 9 :"Pour ce qui est de l'étain, Posidonius nie qu'on le recueille à la surface du sol, ainsi que les historiens se plaisent à le répéter, et, suivant lui, c'est uniquement des mines qu'on l'extrait, ce sont des mines d'étain, par exemple, qui se trouvent dans le pays de ces Barbares au-dessus de la Lusitanie et dans les îles Cassitérides, ainsi que dans les autres îles Britanniques, d'où Massalia tire aussi beaucoup d'étain. Lui-même pourtant nous signale chez les Artabres, à l'extrémité nord-ouest de la Lusitanie, la présence superficielle de minerais d'argent, d'étain et d'or blanc ou d'or mêlé d'argent ; il ajoute que le sable des rivières en est aussi chargé et que, pour l'extraire, les femmes ratissent soigneusement ce sable et le lavent ensuite dans des espèces de sas ou de tamis tressés à la façon des paniers. Ici s'arrête ce qu'a dit Posidonius des mines de l'Ibérie."
Strabon, Géographie, III, 3, 5 :"Les derniers peuples de la Lusitanie sont les Artabres, qui habitent près du cap Nerium. Dans le voisinage du même cap, qui forme l'extrémité à la fois du côté occidental et du côté septentrional de l'Ibérie, habitent les Celtici, proches parents de ceux des bords de l'Anas. On raconte en effet qu'une bande de ces derniers, qui avait entrepris naguère une expédition en compagnie des Turdules contre les peuples de cette partie de l'Ibérie, s'étant brouillée avec ses alliés dès la rive ultérieure du Limaaas, et, ayant perdu en même temps, pour comble de malheur, le chef qui la commandait, se répandit dans le pays et se décida à y demeurer, ce qui fit donner au Limaeas cette dénomination de fleuve du Léthé ou de l'Oubli. Les villes des Artabres sont agglomérées autour d'un golfe connu des marins qui pratiquent ces parages sous le nom de port des Artabres. Aujourd'hui pourtant on donne aux Artabres plus volontiers le nom d'Arotrebes."
Sources
• X. Delamarre, (2003) - Dictionnaire de la langue gauloise, Errance, Paris, 440p. • D. Dopico Cainzos & P. Rodríguez Álvarez, (1992) - "Paleoetnografía de Gallaecia", in : M. Almagro-Gorbea & G. Ruiz Zapatero (coord), Paleoetnología de la Península Ibérica, Actas de la Reunión celebrada en la Facultad de Geografía e Historia de la Universidad Complutense, Madrid, 13-15 diciembre de 1989, Complutum, n°2-3, pp.395-398
• M. J. Loira Enríquez, (2019) - El proceso de romanización en el antiguo territorio de los Ártabros : formas de poblamiento y organización territorial a lo largo del periodo romano, Thesis doctoral, Universidad Nacional de Educación a Distancia (España). Escuela Internacional de Doctorado. Programa de Doctorado en Historia e Historia del Arte y Territorio, 833p.
• E. R. Luján Martinez, (2009) - "Pueblos celtas y no celtas de la Galicia Antigua : fuentes literarias frente a fuentes epigráficas", in : J. Aparicio Pérez & L. Silgo Gauche (Eds.), XXII Seminario de Estudios de Lenguas y Epigrafía Antiguas-ELEA , n°9, Real Acadèmia de Cultura Valenciana. Valencia, pp.219-250
• Pierre Crombet pour l'Arbre Celtique
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique