Cette campagne fut plus que problématique dans un premier temps. En effet, les navires de Decimus Iunius Brutus Albinus devaient seconder l'offensive terrestre de César, or il n'en fut rien. Les Romains ignoraient tout de la navigation sur l'Atlantique, ne maîtrisaient aucunement les marées, et ignoraient tout de la position des rades et îles et la région. Ainsi, alors que César prenait l'une après l'autre les villes vénètes, ces derniers parvenaient presque toujours à s'en extirper et à fuir vers d'autres villes, grâce à leurs nombreux vaisseaux, sans que la flotte romaine ne put rien empêcher, étant bloquée par des vents contraires. Dans ces circonstances, César était contraint à multiplier les sièges, sans jamais remporter de victoire décisive (Guerre des Gaules, III, 12). Aussi, un problème majeur se dessinait dans l'éventualité d'une confrontation navale, puisque les navires des Vénètes étaient supérieurs en tous points à ceux des Romains et, de part leurs dimensions, s'avéraient extrêmement difficiles à attaquer (Guerre des Gaules, III, 13 ; 14).
La campagne de Decimus Iunius Brutus Albinus était jusqu'alors un échec complet, puisqu'elle se montra parfaitement inadaptée pour seconder celle de César, rendant tout perspective de victoire sur les Vénètes plus qu'improbable. Lorsque enfin la flotte de Decimus Iunius Brutus Albinus parvint à gagner la portion du littoral où se trouvait César, deux cent vingt navires vénètes, parfaitement équipés et armés, vinrent se placer devant ceux des Romains, près à engager la bataille.
Sources littéraires anciennes
César, Guerre des Gaules, III, 11 :"Il fait partir son lieutenant Q. Titurius Sabinus, avec trois légions, chez les Unelles, les Coriosolites et les Lexovii, pour tenir ces peuples en respect. II donne au jeune D. Brutus le commandement de la flotte et des vaisseaux gaulois, qu'il avait fait venir de chez les Pictons, les Santons et autres pays pacifiés, et il lui enjoint de se rendre au plus tôt chez les Vénètes, lui-même en prend le chemin avec les troupes de terre."
César, Guerre des Gaules, III, 12 :"Si, après de pénibles travaux, on parvenait à contenir la mer par une digue et des môles, et à s'élever jusqu'à la hauteur des murs, les assiégés, commençant à désespérer de leur fortune, rassemblaient leurs nombreux navires, dernière et facile ressource, y transportaient tous leurs biens, et se retiraient dans des villes voisines. Là ils se défendaient de nouveau par les mêmes avantages de position. Cette manoeuvre leur fut d'autant plus facile durant une grande partie de l'été, que nos vaisseaux étaient retenus par les vents contraires et éprouvaient de grandes difficultés à naviguer sur une mer vaste, ouverte, sujette à de hautes marées et presque entièrement dépourvue de ports."
César, Guerre des Gaules, III, 13 :"Les vaisseaux des ennemis étaient construits et armés de la manière suivante : la carène en est un peu plus plate que celle des nôtres, ce qui leur rend moins dangereux les bas-fonds et le reflux ; les proues sont très élevées, les poupes peuvent résister aux plus grandes vagues et aux tempêtes ; les navires sont tout entiers de chêne et peuvent supporter les chocs les plus violents. Les bancs, faits de poutres d'un pied d'épaisseur, sont attachés par des clous en fer de la grosseur d'un pouce ; les ancres sont retenues par des chaînes de fer au lieu de cordages ; des peaux molles et très amincies leur servent de voiles, soit qu'ils manquent de lin ou qu'ils ne sachent pas l'employer, soit encore qu'ils regardent, ce qui est plus vraisemblable, nos voiles comme insuffisantes pour affronter les tempêtes violentes et les vents impétueux de l'Océan, et pour diriger des vaisseaux aussi pesants. Dans l'abordage de ces navires avec les nôtres, ceux-ci ne pouvaient l'emporter que par l'agilité et la vive action des rames ; du reste, les vaisseaux des ennemis étaient bien plus en état de lutter, sur ces mers orageuses, contre la force des tempêtes. Les nôtres ne pouvaient les entamer avec leurs éperons, tant ils étaient solides ; leur hauteur les mettait à l'abri des traits, et, par la même cause, ils redoutaient moins les écueils. Ajoutons que, lorsqu'ils sont surpris par un vent violent, ils soutiennent sans peine la tourmente et s'arrêtent sans crainte sur les bas-fonds, et, qu'au moment du reflux, ils ne redoutent ni les rochers ni les brisants ; circonstances qui étaient toutes à craindre pour nos vaisseaux."
César, Guerre des Gaules, III, 14 :"Après avoir enlevé plusieurs places, César, sentant que toute la peine qu'il prenait était inutile, et qu'il ne pouvait ni empêcher la retraite des ennemis en prenant leurs villes, ni leur faire le moindre mal, résolut d'attendre sa flotte. Dès qu'elle parut et qu'elle fut aperçue de l'ennemi deux cent vingt de leurs vaisseaux environ, parfaitement équipés et armés, sortirent du port et vinrent se placer devant les nôtres."
Dion Cassius, Histoire romaine, XXXIX, 40 :"Sous le consulat de Marcellinus et de Philippe, César se mit en campagne contre les Vénètes, qui habitent sur les bords de l'Océan : ils s'étaient emparés de quelques soldats romains, envoyés sur leurs terres pour fourrager. Des députés vinrent les réclamer : les Vénètes les retinrent aussi, dans l'espoir d'obtenir en échange, les otages qu'ils avaient donnés ; mais César ne les rendit pas. Il envoya même des détachements dans diverses directions, les uns pour ravager les terres des peuples qui avaient soutenu la défection des Vénètes et les empêcher de se secourir mutuellement, les autres pour observer ceux qui étaient en paix avec les Romains, afin de prévenir de nouveaux mouvements ; puis il marcha en personne contre les barbares, après avoir fait construire dans l'intérieur des terres des barques qui pussent, d'après ce qu'il avait entendu dire, résister au flux et au reflux de la mer. Il les fit descendre par la Loire ; mais l'été presque tout entier s'écoula sans qu'il remportât aucun avantage. Les villes des Vénètes, bâties dans des lieux fortifiés par la nature, étaient inaccessibles : l'Océan, qui les baignait presque toutes et dont les eaux montent et s'abaissent tour à tour, eu rendait l'attaque impossible pour les troupes de terre et même pour les vaisseaux, au moment du reflux, ou lorsque les flots vont se briser contre le rivage. César fut dans le plus grand embarras jusqu'au jour où Décimus Brutus se rendit de la mer Intérieure auprès de lui avec des vaisseaux légers. Il ne comptait pas sur le succès, même avec le concours de ces vaisseaux : heureusement les barbares ne s'en inquiétèrent nullement, à cause de leur petitesse et de leur mauvaise construction, et ils furent vaincus."