La Gaule devient une province romaine [hiver -51:-50]
En 56 av. J.-C., dans son Discours sur les provinces consulaires (VIII), Cicéron, tout en reconnaissant les mérites des campagnes césariennes en Gaule, s'inquiétait que ce territoire, sur le point d'être conquis, n'était toujours pas assujetti aux lois et au droit romain. Les incursions germaniques des années 56-55 av. J.-C. tout comme les révoltes gauloises qui éclatèrent entre 55 et 51 av. J.-C. durent en effet retarder la mise en place des institutions romaines.
Un passage du livre VIII de la Guerre des Gaules, rédigé par Hirtius, livre quelques informations sur cette réorganisation. Tout d'abord, si l'on en croît Hirtius, cette réorganisation eut lieu au cours de l'hiver 51-50 av. J.-C. (Consulat de Marcus Claudius Marcellus et Servius Sulpicius Rufus selon Salluste, fragments de l'Histoire, I, 9). Une partie de ce passage mentionne les mesures prises en ce qui concerne les collectivités publiques (ciuitates), les dirigeants (principes) et les questions administratives (Goudineau, 2007). Ainsi, la lex prouinciae donnait la liste des ciuitates et leur statut (Suétone, Jules César, XXV, 2) :
- Les cités assujetties (ciuitates stipendiariae) étaient intégrées à la province de Gallia transalpina (la future Narbonnaise) et devenaient soumises au gouverneur et à l'impôt (Goudineau, 2007). Ce tribut annuel s'élevait à quarante millions de sesterces selon Suétone (Jules César, XXV, 2).
- Les cités reconnues sociae ac bene meritae bénéficiaient d'un statut privilégié ; civitates foederatae ou alors civitates liberae ac immunes (Goudineau, 2007). Les ciuitates foederatae seraient la cité des Rèmes, la cité des Eduens et probablement celle des Lingons (Jullian, 1909).
Cicéron, Discours sur les provinces consulaires, VIII : "Mais, ne consultant que l'importance de la guerre dont la Gaule fut le théâtre, non seulement ils ne votèrent point le rappel de leur ennemi, mais lui décernèrent extraordinairement cette province. On a fait dans les Gaules une guerre importante : de puissantes nations y ont été domptées par César ; mais elles ne sont pas encore assujetties à notre empire par des lois, par des droits établis, par une paix assez solide. La guerre est fort avancée, et, à dire vrai, presque terminée ; mais nous ne la verrons entièrement achevée qu'autant qu'on chargera celui qui l'a commencée d'en poursuivre la fin."
César (Hirtius), Guerre des Gaules, VIII, 49 : "César, en tenant dans la Belgique ses quartiers d'hiver, n'avait d'autre but que de maintenir dans notre alliance les peuples de la Gaule, et de ne leur donner ni espoir ni motif de guerre. Car, étant près de partir, il ne voulait point se mettre dans la nécessité de recommencer la guerre, au moment où il allait retirer l'armée, ni laisser toute la Gaule disposée à reprendre librement les hostilités pendant son absence. Aussi, par son attention à adresser des éloges aux états, à combler de récompenses leurs principaux habitants, à n'établir aucun nouvel impôt, à rendre l'obéissance plus douce, il contint facilement en paix la Gaule, épuisée par tant de revers."
Salluste, fragments de l'Histoire, I, 9 :"L'habileté de ses généraux a fait la principale force de Rome. C`est sous le consulat de Servius Sulpicius et de M. Marcellus qu'ont été soumises par les armes romaines toutes les Gaules comprises entre le Rhin, la méditerranée et l'Océan, à l'exception des lieux que des marais rendent impraticables."
Suétone, Jules César, XXV, 2 :"Toute la Gaule comprise entre les Pyrénées, les Alpes, les Cévennes, le Rhône et le Rhin, c'est-à-dire dans un périmètre de quelque trois millions deux cent mille pas, il la réduisit en province romaine, à l'exception des villes alliées et de celles qui avaient bien mérité de Rome, et il imposa au pays conquis un tribut annuel de quarante millions de sesterces."
Sources
• Jullian C., (1909) - Histoire de la Gaule, tome III. La conquête romaine et les premières invasions germaniques, Librairie Hachette et Cie, Paris,607p.
• Goudineau C., (2007) - Antiquités Nationales, cours dispensés au Collège de France, pp.721-731 (http://www.college-de-france.fr/media/ant_nat/UPL17363_cgoudineaucours0506.pdf)
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique