[Rigomagenses] - Cité gallo-romaine des Alpes cottiennes, puis de la province des Alpes maritimes, elle fut mentionnée dans la Notice des Gaules sous la forme ciuitas Rigomagensium. L'identité de cette cité a parfois été discutée, le nom même des Rigomagenses a été considéré comme une possible corruption de celui des Caturigomagenses de Chorges, ou de celui (plus hypothétique) des Brigomagenses de Briançonnet. Comme l'a montré G. Barruol dés 1966, les sources du Haut-Moyen Âge évoquant un pagus Rigomagensis et une vallis Rigomagensis(1) attestent du fait que cette antique cité ne pouvait se situer ailleurs que dans la vallée de l'Ubaye. Le nom de cette cité dérive de celui d'une localité, vraisemblablement dénommée Rigomagus, que G. Barruol (1966 ; 1969 ; 2004) et G. Bérard (1997) s'accordent à identifier à Faucon-de-Barcelonnette, plutôt qu'à Barcelonnette (où les vestiges romains sont rares). Le territoire des Rigomagenses correspondait à la vallée de l'Ubaye.
Dans le cadre de la réforme provinciale de Dioclétien (dernière décennie du IIIe s. ap. J.-C.), la province des Alpes cottiennes disparut et ses cités qui en dépendaient furent rattachées à la province des Alpes maritimes. Ainsi, il est tentant de penser que ce fut dans le contexte de cette réorganisation qu'eut lieu la déduction de la cité des Rigomagenses au détriment de celle des Caturiges(2). Aussi, il est tout à fait probable que cette déduction ait redonné vie à une entité administrative antérieure, ayant été supprimée au début de la période romaine. Suivant G. Barruol (1966 ; 1969 ; 2004), la vallée de l'Ubaye aurait pu correspondre aux territoires des Savincates et peut-être des Némalones, ou encore au territoire des Adunicates selon P. Arnaud (2002). Notons que l'idée selon laquelle plusieurs peuples auraient pu se partager la vallée de l'Ubaye est tout à fait plausible. En effet, G. Barruol (1966) a noté qu'un petite entité administrative adjacente, la vallis Moccensis, la vallée de L'Ubayette (testament d'Abbon, 739), a connu une histoire singulière, puisque elle dépendait de l'archidiocèse de Turin au VIe s. Cette particularité invite à croire que cette entité administrative a pu constituer le territoire d'une population pré-romaine, distincte de celle qui occupait la moyenne vallée de l'Ubaye.
(1) Les attestations médiévales ont été faites sous les formes in pago Rigomagense et in valle Moccense et Rigomagense dans le testament du patrice Abbon, aux profits de l'abbaye de Novalaise (739) et vallis Reumagensis dans un diplôme de Louis le Pieux (814-840) (Barruol, 1966 ; 1969 ; 2004).
(2) Ce point de vue ne fait pas l'unanimité puisque F. Artru (2013) distingue déjà les Rigomagenses comme l'une des cinq cités constituant la province des Alpes cottiennes dés le Haut-Empire.
Sources
• P. Arnaud, (2002) - "Des peuples aux cités des Alpes méridionales : sources, problèmes, méthodes", In : D. Garcia & F. Verdin (Eds.), Territoires celtiques. Espaces ethniques et territoires des agglomérations protohistoriques d'Europe occidentale, Actes du XXIVe colloque international de l'Association française pour l'étude de l'âge du Fer (AFEAF), Martigues, 1-4 juin 2000, Paris, pp.185-198
• A. Artru, (2013) - "La circulation dans les Alpes à l'époque romaine : l'exemple des Alpes Cottiennes", Dialogues d'histoire ancienne, vol.39, n°1, pp.237-263
• G. Barruol, (1966) - "Rigomagus et la vallée de Barcelonnette", Actes du 1er congrès historique Provence-Ligurie, Bordhigera, 1964, Marseille-Bordhigera, pp.41-58
• G. Barruol, (1969) - Les peuples préromains du Sud-Est de la Gaule. Étude de géographie historique, Paris, éditions De Boccard, 408p.
• G. Barruol, (2004) - "Faucon-de-Barcelonnette / Rigomagus (Alpes-de-Haute-Provence)", in : A. Ferdière, (Ed), Capitales éphémères. Des Capitales de cités perdent leur statut dans l'Antiquité tardive, Actes du colloque Tours 6-8 mars 2003, Fédération pour l'édition de la Revue archéologique du Centre de la France, Supplément à la Revue archéologique du Centre de la France, n°25, pp.419-421
• G. Bérard, (1997) - Carte archéologique de la Gaule: 04. Alpes-de-Haute-Provence, Les Editions de la Maison des Sciences de l'Homme, 568p.
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique