HÉLIODORE. Éthiopiques, IX, 15; trad. d'après MAILLON. J., Paris, Les Belles Lettres, CUF. 1960
Voici quelle est la forme de leur armure. L'homme est choisi pour sa vigueur exceptionnelle. Il est coiffé d'un casque compact, fait d'une seule pièce, qui, tel un masque, représente exactement une figure humaine et recouvre entièrement la tête depuis le sommet du crâne jusqu'au cou, sauf les yeux, pour permettre de voir. Sa main droite est armée d'une lance [kontos], plus longue qu'une haste [lonkhè] ; la main gauche reste libre pour tenir les rênes. Une épée [kopis] est suspendue à son côté. La poitrine et tout le reste du corps sont cuirassés. Voici comment est faite la cuirasse : des plaques de bronze et de fer, quadrangulaires, et d'un empan dans chaque sens, sont liées entre elles par leurs extrémités, s'imbriquant les unes dans les autres dans le sens de la hauteur et dans le sens de la largeur, d'une façon continue. Elles sont attachées ensemble par-dessous par des liens lâches à l'endroit où elles se rejoignent. C'est comme un vêtement d'écailles qui adhère au corps sans le blesser et l'enveloppe complètement, entourant chaque jambe séparément, sans gêner les mouvements, car il peut se contracter et s'allonger. Elle a des manches et va du col aux genoux, ouverte seulement à hauteur des cuisses pour permettre à l'homme de monter à cheval. Sur une telle cuirasse, les traits rebondissent et nulle blessure n’est à redouter. La cnémide va de la pointe du pied au genou et s'attache à la cuirasse. Une armure semblable protège aussi le cheval : ses membres sont entourés de jambières ; sa tête est entièrement couverte de plaques frontales; de son dos pend de chaque côté, sur les flancs, une housse de lames de fer qui le protège, tout en laissant libre le dessous du ventre afin de ne pas gêner sa course. Le cheval ainsi armé et pour ainsi dire enchâssé, le cavalier l'enfourche ; mais il ne se hisse pas seul ; il faut qu'on le soulève à cause de son poids. Et quand arrive le moment du combat, il lâche la bride, éperonne sa monture et s'élance de toute sa fougue sur l'ennemi, pareil à un homme de fer ou à une statue sculptée dans la masse qui se mettrait en mouvement. Le kontos horizontal darde au loin sa pointe. Il est soutenu du côté du fer par un lien attaché au col du cheval, tandis que sa poignée est fixée à la croupe par un lacet. Ainsi, il ne cède pas sous les chocs, mais aide la main du cavalier qui n'a qu'à diriger le coup. L'homme se raidit et s'arc-boute pour faire une blessure plus profonde, et son élan est si impétueux qu'il transperce tout ce qu'il trouve devant lui et souvent, d'un seul coup, désarçonne deux ennemis à la fois.
A+