Cassitérides / Κασσιτεριδας - Îles régulièrement mentionnées dans l'antiquité du fait qu'une grande partie de l'étain qui inondait les marchés méditerranéens y était produit. Inconnu des Méditerranéens, l'emplacement de ces îles est variable selon les sources et régulièrement associé aux mythes relatifs aux Hyperboréens. De très nombreux éléments laissent supposer que ces îles n'avaient pas d'existence réelle, elles constituaient certainement un pendant aux île Electrides (ou Glessaries) d'où provenait (dans le même cadre mythique) l'ambre de la Baltique. Le nom des Cassitérides provient du Grec κασσίτερος qui signifie "étain".
La première mention des Cassitérides paraît remonter à Hérodote (Histoire, III, 115), qui au Ve s. av. J.-C., avoue être troublé par les informations qu'il possède relatives à ces îles et au fleuve Ἠριδανὸν (Eridanos > Eridan > Rhin ?) de la Mer du Nord.
Hérodote, Histoire, III, 115 : "Telles sont les extrémités de l'Asie et de la Libye. Quant à celles de l'Europe à l'occident, je n'en puis rien dire de certain ; car je ne conviendrai pas que les barbares nomment Eridan un fleuve qui se jette dans la mer du Nord, et dont on dit que nous vient l'ambre. Je ne connais pas non plus les îles Cassitérides, d'où l'on nous apporte l'étain : le nom même du fleuve est une preuve de mon sentiment. Eridanos n'est point un mot barbare, c'est un nom grec inventé par quelque poète. D'ailleurs, je n'ai jamais trouvé personne qui ait pu me dire, comme témoin oculaire, quelle est cette mer que l'on place dans cette région de l'Europe. Ce qu'il y a de certain, c'est que l'étain et l'ambre nous viennent de cette extrémité du monde."
Les sources plus tardives (Diodore de Sicile, Histoire Universelle, V, 25 ; Strabon, Géographie Universelle, III, 5, 11 ; Pline, Histoire Naturelle, IV, 119 ; Solin, Polyhistor, XXIV) ont eu tendance à situer ces îles en Occident, au large des côtes ibériques, plus exactement au large de la Province romaine de Lusitanie. Ptolémée (Géographie, II, 6, 76) se distingue quant à lui en situant les "dix îles" des Cassitérides, au large de la province de Tarraconnaise.
Diodore de Sicile, Histoire Universelle, V, 25 : "Au reste, il semble qu'on puisse dire que la passion des Carthaginois pour les richesses, leur a fait chercher tous les moyens d'en acquérir, et que celle des Romains a été de ne rien laisser à personne. On trouve aussi de l'étain en plusieurs endroits de l'Espagne, non pas sur la superficie de la terre, comme l'ont faussement écrit quelques historiens, mais dans des mines, d'où il faut le tirer, pour le faire fondre comme l'or et l'argent. La plus grande abondance de ce métal est dans des îles de l'Espagne situées au dessus de la Lusitanie, et qu'on nomme pour cette raison les îles Cassitérides. Il y en a aussi quantité dans l'île Britannique, située vis à vis des Gaules. Les marchands chargent l'étain sur des chevaux et le transportent au travers de la Celtique jusqu'à Marseille et à Narbonne."
Strabon, Géographie, III, 5, 11 : "Les îles Cassitérides, qui suivent, sont au nombre de dix, toutes très rapprochées les unes des autres. On les trouve en s'avançant au nord en pleine mer à partir du port des Artabres. Une seule de ces îles est déserte ; dans toutes les autres, les habitants ont pour costume de grands manteaux noirs, qu'ils portent par-dessus de longues tuniques talaires, serrées par une ceinture autour de la poitrine, ce qui, joint au bâton qu'ils ont toujours à la main quand ils se promènent, les fait ressembler tout-à-fait aux Furies vengeresses de la tragédie. Ils vivent en général du produit de leurs troupeaux à la façon des peuples nomades. Quant aux produits de leurs mines d'étain et de plomb, ils les échangent, ainsi que les peaux de leurs bestiaux, contre des poteries, du sel et des ustensiles de cuivre ou d'airain que des marchands étrangers leur apportent. Dans le principe, les Phéniciens de Gadira étaient le seul peuple qui envoyât des vaisseaux trafiquer dans ces îles, et ils cachaient soigneusement à tous les autres la route qui y mène. Il arriva même qu'un patron de navire phénicien, qui se voyait suivi par des bâtiments romains, dont les pilotes avaient espéré de pouvoir ainsi connaître la route de ces comptoirs, s'échoua volontairement et par pure jalousie nationale sur un bas-fond, où il savait entraîner les Romains à une perte assurée ; mais ayant réussi, lui, à s'échapper du milieu de ce naufrage général, il fut indemnisé par l'Etat des marchandises qu'il avait perdues. A force d'essayer, cependant, les Romains finirent par découvrir la route de ces îles. Ce fut Publius Crassus qui y passa le premier, et, comme il reconnut le peu d'épaisseur des filons et le caractère pacifique des habitants, il donna toutes les indications pouvant faciliter la libre pratique de ces parages, plus éloignés de nous pourtant que ne l'est la mer de Bretagne."
Pline, Histoire Naturelle, IV, 119 : "En face de la Celtibérie sont plusieurs îles appelées Cassitérides par les Grecs à cause des mines de plomb qu'elles renferment; et, en face du promontoire des Arrotrèbes, six îles des Dieux, que quelques-uns ont appelées Fortunées."
Ptolémée, Géographie, II, 6, 76 : "Dans l'océan occidental sont les îles Cassiterides, au nombre de dix, le centre de celles-ci correspond au point 4°00' / 45°30', et deux îles sont appelées les îles des Dieux, 4°40' / 43°30',"
Solin, Polyhistor, XXIV :"Vis-à-vis de la Celtibérie sont beaucoup d'îles dites Cassitérides : elles donnent beaucoup de plomb ; il en est trois, dites les îles Fortunées, dont il suffit de remarquer le nom."
Tous les auteurs actuels n'acceptent pas l'idée que ces îles aient pu n'être que mythiques. Certains les rapprochent des îles Oestrymnides vues par Himilcon. Contrairement aux informations données par de nombreux auteurs antiques, les localisations proposées aujourd'hui situent ces îles au large de la Grande-Bretagne au niveau des Sorlingues (ou îles Scilly) ou encore au niveau de l'île de Wight, où effectivement, existent des traces d'anciennes exploitations d'étain.
(Pour ce qui est du caractère mythique de ces îles, cf. textes de Denys le Périégète, Eustathe et Nicéphore le Blemmide)