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Parthénios de Nicée : Histoires d'amour, VIII, Traduction de : Edm. Cougny, 1986, Paris, Errance
Texte:
Une variante
Erippè : " Alors que les Galates faisaient leurs courses dans l'Ionie et en saccageaient les villes, on célébrait à Milet les Thesmophories et les femmes étaient rassemblées dans le temple qui est à peu de distance de la ville. Un détachement de ces barbares qui passait par la Milésie, dans cette incursion soudaine, enleva les femmes. On en délivra alors quelques unes en donnant pour les ravoir beaucoup d'argent et d'or. Quelques autres avec qui les barbares s'étaient liés, quittèrent le pays. Parmi elles était Erippè, femme de Xanthos, personnage fort considéré à Milet et d'une des premières familles : elle avait laissé derrière elle un petit enfant de deux ans. Comme son mari avait pour elle une grande passion, il fit de l'argent d'une partie de son avoir, et s'étant formé mille [statères] d'or, il passa d'abord en Italie, puis, conduit par quelque hôte à lui, il arriva à Marseille et de là dans la Celtique. En approchant de la maison où sa femme se trouvait avec un homme des plus considéré chez les Celtes, il pria qu'on le voulut bien recevoir. Dans ce pays-là on aime bien les étrangers ; on le reçut donc avec empressement. Il entre, il voit sa femme, et elle, lui jetant ses bras autour du cou, l'entraînait avec toutes sortes de caresses. Le Celte arrive au même instant, et Erippè lui raconte comment son mari a couru après elle, comment, pour l'amour d'elle, il vient verser le prix de sa rançon. Le Celte admire la belle âme de Xanthos, et, ayant fait une assemblée de ceux qui lui tenaient de plus près, il l'y traite comme son hôte. Comme, après le repas, on restait à boire, il fait asseoir la femme auprès de lui et demande à Xanthos par interprète à combien se montait en tout l'avoir qu'il possédait. Celui-ci ayant dit qu'il avait environ mille [statères] d'or, le barbare l'invita à faire de cette somme quatre parts, à en prendre trois pour lui, sa femme et son enfant, et à laisser la quatrième pour la rançon de sa femme.
Or quand ils se furent retirés pour se coucher, la femme fit à Xanthos beaucoup de reproches, parce que, ayant promis au barbare plus d'argent qu'il n'en avait, il allait être en grand péril s'il ne justifiait pas sa déclaration. Mais il lui dit qu'il avait caché dans les chausses de ses valets mille autres [statères] d'or, parce qu'il ne s'attendait pas à trouver le barbare si accommodant, mais bien à avoir besoin de beaucoup d'argent pour la racheter. Le lendemain, la femme révéla au Celte la quantité d'or et l'engagea à tuer son mari, en l'assurant qu'elle l'aimait plus, lui, que son pays et son enfant ; car elle détestait Xanthos de tout son coeur. Ces paroles ne firent pas plaisir au barbare, et il songea à l'en punir. Comme Xanthos hâtait son départ, le Celte l'accompagna avec toute sorte d'amitiés, emmenant aussi Erippè avec lui. Lorsqu'on fut arrivé aux frontières des Celtes, le barbare dit qu'il voulait offrir un sacrifice avant de se séparer de ses hôtes. La victime amenée, il invite Erippè à la tenir de son côté ; quand elle y a porté la main, suivant un usage qu'elle connaissait bien d'ailleurs, levant son épée, il lui en porte un coup qui lui enlève la tête. Alors il engage Xanthos à ne point regretter cette femme dont il lui raconte les méchants desseins, et lui permit d'emporter tout son or. "