Cité de la province de Gaule narbonnaise, puis de la Viennoise. Son territoire correspondait à celui de l'ancien diocèse de Grenoble (avant 1790), soit l'Oisans, le nord du Vercors, le massif de la Chartreuse, la combe et la cluse de Savoie. Sa métropole était Cularo / Gratianopolis, l'actuel Grenoble (Isère).
Attestations et étymologie
Le gentilé Cularonenses n'est attesté que sur deux inscriptions, aujourd'hui disparues, qui furent posées à l'occasion de la dédicace de l'enceinte de Cularo, à la fin du IIIe ap. J.-C. (CIL 12, 2229). Un débat existe toujours cependant pour savoir s'il n'était question que des habitants de Cularo ou de ceux de la cité devenue indépendante (Rémy & Jospin, 2006). À la fin du IVe ap. J.-C., la ville et la cité changèrent de nom, pour devenir Gratianopolis (Gratiano-polis, "la ville de Gratien") pour la première, et ciuitas Gratianopolitana pour la seconde. Le nom de la ciuitas Gratianopolitana fut mentionnée dans la Notice des Gaules. Le noms actuels de Grenoble et celui du Grésivaudan en sont issus.
Histoire
• Une cité déduite tardivement
Lors de l'une des réformes administratives qui touchèrent l'empire à la fin du IIIe ap. J.-C., la cité des Viennenses subit d'importantes transformations puisque deux cités distinctes lui furent déduites ; la cité des Genavenses et la cité des Cularonenses. On considère traditionnellement que cette déduction fut contemporaine de l'érection de l'imposante enceinte urbaine de Cularo, qui n'était jusque alors qu'une modeste localité. La synthèse publiée par F. Baucheron et al. (1998) portant sur les recherches archéologiques menées sur cette enceinte invite à penser que le début de sa construction remonte au règne de Probus (276-282 ap. J.-C.). Elle ne fut terminée que plus tard, du temps de Dioclétien et Maximien Hercule (1), qui s'en seraient attribués l'honneur, comme le démontraient les inscriptions qui surmontaient les deux portes de la ville (CIL 12, 2229).
Considérant l'extension de la cité des Cularonenses, il semble que celle-ci correspondait aux anciens territoires des Tricores et des Ucennes, certainement attribués aux Allobroges / Viennenses dans la seconde moitié du Ier s. av. J.-C. La cité des Cularonenses fut très certainement constituée à partir d'un (ou deux) pagus hérités de ces anciennes entités territoriales.
À la fin du IVe s., Cularo prit le nom de Gratianopolis. Le plus ancien témoin de ce changement sont les Actes du concile d'Aquilée (381), qui mentionnent l'évêque Domninus (saint Domnin) comme [episcopus] Gratianopolitanus (Dauzat & Rostaing, 1979). En conséquence, la cité des Cularonenses prit à son tour le nom de cité gratianopolitaine (ciuitas Gratianopolitana). L'origine de ce changement fait toujours débat, et certains veulent y voir la conséquence du passage de l'empereur Gratien dans la vallée du Rhône en 379.
Notes
(1) Les inscriptions qui surmontaient les deux portes de la ville plaident pour une dédicace effectuée entre décembre 285 ap. J.-C. (avènement de Maximien Hercule) et le 1er mars 293 ap. J.-C. (instauration de la tétrarchie).
Sources épigraphiques
Grenoble (CIL 12, 2229) DD(OMINI) NN(OSTRI) IMP[P](ERATOR) CAES(AR) GAIVS AVREL(IVS) VALERIVS DIOCLETIANVS P(IVS) <F=P>(ELIX) INVICTVS AVGVSTVS ET IMP(ERATOR) CAESAR MARCVS AVREL(IVS) VALERIVS MAXIMIANVS PIVS FELIX INVICTVS AVG(VSTVS) MVRIS CVLARONENSIBVS CVM INTERIORIBVS AEDIFICIIS PROVIDENTIA SVA INSTITVTIS ADQVE PERFECTIS PORTAM ROMANAM IOVIAM VOCARI IVSSERVNT // DD(OMINI) NN(OSTRI) IMP[P](ERATOR) CAES(AR) GAIVS AVREL(IVS) VALERIVS DIOCLETIANVS P(IVS) <F=P>(ELIX) INVICTVS AVGVSTVS ET IMP(ERATOR) CAESAR MARCVS AVREL(IVS) VALERIVS MAXIMIANVS PIVS FELIX INVICTVS AVG(VSTVS) MVRIS CVLARONENSIBVS CVM INTERIORIBVS AEDIFICIIS PROVIDENTIA SVA INSTITVTIS ADQVE PERFECTIS PORTAM VIENNENSEM HERCVLEAM VOCARI IVSSERVNT
"Nos deux seigneurs, l'empereur César Gaius Aurelius Valerius Diocletianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste et, l'empereur César Aureélius Valerius Maximianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste, après la construction des murailles des Cularonenses avec leurs édifices intérieurs, ouvrage de leur prévoyante sollicitude, heureusement entrepris et achevés, ont donné à la porte du côté de Rome le nom de porte de Jupiter." "Nos deux seigneurs, l'empereur César Gaius Aurelius Valerius Diocletianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste et, l'empereur César Aureélius Valerius Maximianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste, après la construction des murailles des Cularonenses avec leurs édifices intérieurs, ouvrage de leur prévoyante sollicitude, heureusement entrepris et achevés, ont donné à la porte du côté de Vienna le nom de porte d'Hercule."
Sources
• F. Baucheron et al., (1998) - "Chapitre 2. Les remparts de la ville : enceinte et fossé", in : F. Baucheron et al. (dir.), Autour du groupe épiscopal de Grenoble. Deux millénaires d'histoire, DARA 16, Alpara, Lyon, pp.39-56
• A. Dauzat & C. Rostaing, (1979) - Dictionnaire étymologique des noms de lieu en France, Librairie Guénégaud, Paris, 786p.
• B. Rémy & J.-P. Jospin, (2006) - Cularo, Gratianopolis, Grenoble, Presses Universitaires de Lyon, Galliae civitates, 141p.
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique