Les Romains prennent d'assaut la place-forte des Silures [51]
Les Romains prennent d'assaut la place-forte des Silures (51 ap. J.-C.)
Arrivés chez les Ordovices, les Silures dirigés par Caratacos fortifièrent leur position en un lieu qu'ils jugeaient favorable pour affronter l'armée romaine (Tacite, Annales, XII, 33). Lorsque les Romains s'y présentèrent, Caratacos et les autres chefs rebelles exhortèrent leurs troupes en leur expliquant que de ce combat dépendait l'avenir des Bretons et en leur rappelant les exploits de leurs aïeux contre ces mêmes Romains, lors des expéditions de Jules César en Bretagne (54-55 av. J.-C.). Les soldats promirent alors de ne pas reculer (Tacite, Annales, XII, 34).
Également exhortées par leurs chefs, après que Publius Ostorius Scapula eut reconnu les positions ennemies, les troupes romaines se mirent en marche. Elles passèrent tout d'abord la rivière qui passait en contrebas du camp des insurgés, puis, au terme d'un combat acharné, prirent et démantelèrent le rempart des Bretons. Les Silures et leurs alliés refluèrent, harcelés par les légionnaires et les troupes auxiliaires. Moins bien équipés que leurs adversaires, les insurgés furent pris dans cet étau et vaincus. Au terme de la bataille, la femme et la fille de Caratacos furent faites prisonnières, tandis que ses frères se rendirent (Tacite, Annales, XII, 35). De son côtés, Caratacos parvint à fuir et se rendit chez les Brigantes dans l'espoir d'y être secouru.
Tacite, Annales, XII, 33 :"Il avait pour lui ses ruses et les pièges du terrain, mais non la force des soldats : en conséquence, il transporte la guerre chez les Ordoviques, s'adjoint ceux qui redoutaient la paix que nous donnons, et hasarde une action décisive, après avoir choisi un champ de bataille où l'accès, la retraite, tout fût danger pour nous, avantage pour les siens. Il occupait des montagnes escarpées, et, partout où la pente était plus douce, il avait entassé des pierres en forme de rempart. Au-devant coulait un fleuve dont les gués n'étaient pas sûrs, et des bataillons armés bordaient les retranchements."
Tacite, Annales, XII, 34 :"Cependant les chefs de chaque nation parcourent les rangs, exhortent, encouragent, atténuant le danger, exagérant l'espérance, n'oubliant rien de ce qui peut animer au combat. Pour Caratacus, il volait de tous les côtés, s'écriant que ce jour, que cette bataille allait commencer l'affranchissement de la Bretagne ou son éternelle servitude. II nommait aux guerriers ces héros leurs ancêtres, qui avaient chassé le dictateur César, et par qui, sauvés des haches et des tributs, ils conservaient à l'abri de l'outrage leurs femmes et leurs enfants. Pendant qu'ils parlaient de la sorte, l'armée applaudissait à grand bruit, et chacun jurait, par les dieux de sa tribu, que ni fer ni blessures ne le feraient reculer."
Tacite, Annales, XII, 35 :"Cet enthousiasme frappa de stupeur le général romain. Tout à la fois un fleuve à traverser, un rempart à franchir, des monts escarpés, des lieux où l'oeil ne découvrait que du fer et des soldats, tout ébranlait son courage. Mais l'armée demandait le combat : tous s'écriaient à l'envi qu'il n'est rien dont la valeur ne triomphe ; et les préfets, les tribuns, tenant le même langage, échauffaient encore leur ardeur. Ostorius, ayant reconnu ce qui est accessible, ce qui ne l'est point, les fait avancer ainsi animés, et passe facilement la rivière. Parvenus au rempart, tant que l'on combattit avec des armes de trait, les blessés et les morts furent plus nombreux de notre côté ; mais lorsque, à l'abri de la tortue, on eut démoli cet amas informe de pierres amoncelées, et que les deux armées furent aux prises sur le même terrain, les barbares reculèrent vers le sommet de leurs montagnes. Mais les troupes légères et l'infanterie pesamment armée y coururent après eux, celles-là en les harcelant à coups de traits, celles-ci en pressant, par une marche serrée, leurs bataillons rompus et en désordre. Car les Bretons n'avaient pour se couvrir ni casque ni cuirasse ; et, s'ils essayaient de résister aux auxiliaires, ils tombaient sous l'épée et le javelot du légionnaire ; s'ils faisaient face aux légions, le sabre et les javelines des auxiliaires jonchaient la terre de leurs corps. Cette victoire fut éclatante : on prit la femme et la fille de Caratacus, et ses frères se rendirent à discrétion."