Les insurgés attaquèrent Hannibal au cours de sa retraite du territoire des Vaccéens, alors que les Carthaginois se trouvaient près du Tage. Compte-tenu du nombre de belligérants, Hannibal fut contraint de faire reculer ses troupes sur la rive droite du fleuve. Ce faisant, par cette manoeuvre, Hannibal mit un obstacle entre son armée et celle de ses adversaires, contraignant ainsi ces derniers à franchir le Tage et à perdre le bénéfice du nombre. Les Carpétans et leurs alliés tentèrent de franchir le fleuve en différents points, mais furent systématiquement terrassés par les Carthaginois et leurs éléphants, immédiatement après avoir mis le pied sur la rive gauche du fleuve, ou encore par la cavalerie, au milieu des flots.
Le bilan de cette bataille fut épouvantable pour les Carpétans, qui tentèrent avec difficulté de remettre en ordre leurs troupes. Hannibal ne leur en laissa pas le temps de manoeuvrer et traversa le fleuve à la tête d'un bataillon, mettant en fuite près de 100000 hommes. Les Carthaginois ne s'arrêtèrent pas là, puisqu'ils profitèrent de leur victoire pour dévaster le territoire des Carpétans (Polybe, Histoire générale, III, 14 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 5).
Dés lors, une portion notable de la région située au sud de l'Èbre fut soumis par les Carthaginois, ce qui inquiétait les cités de la côté méditerranéenne restées autonomes, dont celle de Saguntum (Sagonte), allié de Rome.
Polybe, Histoire générale, III, 14 :"Comme il revenait de cette expédition, l'attaque soudaine des Carpétans, peuplade qu'on peut considérer comme la plus puissante de ce pays, lui fit courir de très-grands dangers. Aux Carpétans s'étaient unis leurs voisins, excités déjà par les exilés Olcades, et échauffés encore par quelques citoyens d'Elmantique échappés à l'ennemi. Si les Carthaginois avaient été forcés de combattre contre eux en bataille rangée, ils eussent été infailliblement vaincus. Mais Annibal, en mettant, par une retraite savamment combinée, le Tage entre eux et lui, et en ne les attaquant qu'au passage du fleuve, fit si bien, que, protégé parle Tage et par ses éléphants, qui s'élevaient au nombre de quarante, tout, contre l'attente générale, réussit au gré de ses désirs. Lorsque les Carpétans essayèrent, par une attaque simultanée en plusieurs endroits de franchir le fleuve, ils furent pour la plupart écrasés au moment où ils touchaient la terre, sous les pieds des éléphants qui parcouraient la rive et qui tuaient tout ce qui se présentait : beaucoup aussi périrent dans les flots, exterminés par la cavalerie, qui avait l'avantage de résister mieux au courant par la vigueur de ses chevaux, et de combattre de haut des hommes à pied. Enfin, Annibal traversa le Tage à son tour, et mit en fuite plus de cent mille Barbares."
Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 5 :"Les réfugiés d'Hermandica, joints à ceux des Olcades, peuple soumis l'année d'auparavant, soulèvent les Carpétans ; ils attaquèrent Hannibal dans sa retraite du pays des Vaccéens, non-loin du Tage, et retardèrent sa marche, qu'embarrassait déjà le butin. Hannibal n'engagea point l'action ; il fit camper ses troupes sur la rive du fleuve, et, lorsque le silence l'avertit que ses adversaires étaient plongés dans le premier sommeil, il traversa le fleuve à gué : laissant ensuite, par la disposition de ses lignes, un espace aux ennemis pour marcher sur ses traces, il résolut de les surprendre au passage. Sa cavalerie reçut l'ordre de commencer l'attaque dès qu'ils seraient entrés dans l'eau. L'infanterie, placée sur la rive, avait en tête quarante éléphants. Les Carpétans, avec les débris des Olcades et des Vaccéens, étaient forts de cent mille hommes, armée invincible à terrain égal. Naturellement présomptueux, comptant sur le nombre, persuadés que la crainte avait été la cause de la retraite d'Hannibal, certains que le seul obstacle à la victoire était le passage du fleuve, ils poussent un cri de guerre, et, sans ordre, sans guide, ils s'élancent dans les eaux, chacun à l'endroit le plus voisin. De l'autre rive du fleuve, on envoie contre eux un gros de cavalerie, et il s'engage, au milieu du courant, une lutte inégale, où l'infanterie, qui n'avait point le pied ferme, et qui redoutait d'être submergée, pouvait être facilement culbutée, même par des cavaliers sans armes, qui auraient poussé leurs chevaux au hasard ; tandis que les cavaliers, libres de leurs mouvements et de leur armure, dont les chevaux avaient pied dans les endroits les plus profonds, combattaient de près et de loin. Une grande partie fut engloutie dans le fleuve ; quelques-uns, emportés vers les Carthaginois par la rapidité du courant, furent écrasés sous les pieds des éléphants ; les derniers, trouvant plus de sûreté à regagner leur rive, au moment où, dispersés çà et là, ils cherchaient à se réunir, et à se remettre de cet affreux désordre, virent paraître Hannibal à la tête d'un bataillon carré ; il traversait le fleuve, et bientôt il les eut chassés du rivage. Le pays fut dévasté, et, quelques jours après, les Carpétans étaient soumis."