Tiberius Claudius Cogidubnus est fait grand roi des Bretons par les Romains [43/47 ?]
Tiberius Claudius Cogidubnus est fait "grand roi des Bretons" par les Romains (entre 43 et 47 ap. J.-C. ?)
Selon Tacite (Vie d'Agricola, XIV) et l'inscription dédicatoire d'un temple élevé à Chichester (CIL 07, 11 ; RIB-01, 91), un notable breton dénommé Tiberius Claudius Cogidubnus, fraîchement élevé au rang de citoyen romain, s'est vu attribuer le titre de Rex magnus Britannorum "grand roi des Bretons" et confié l'administration de plusieurs cités alliées. D'après Tacite (Vie d'Agricola, XIV), Tiberius Claudius Cogidubnus aurait bénéficié de cet honneur parce que, allié inconditionnel de Rome, il ne pouvait administrer les cités bretonnes qui lui étaient confiées qu'en faveur de cette dernière.
L'inscription découverte à Chichester (CIL 07, 11 ; RIB-01, 91) laisse entendre quant à elle que la cité des Règnes, dont Noviomagus (Chichester) était la capitale, était l'une de celles qui furent gouvernées par ce roi. Pourtant, ce simple constat est lui-même sujet à caution. En effet, il n'existe aucune attestation de l'existence de la cité des Règnes avant le milieu du IIe s. ap. J.-C. Tout porte à croire qu'avant la conquête de la Bretagne par Aulus Plautius (43-47 ap. J.-C.), la ville de Noviomagus appartenait aux Atrébates, lesquels étaient passés depuis peu sous la dépendance des Catuvellaunes. La même incertitude concerne la cité britto-romaine des Belges, dont l'existence n'est également attestée qu'à partir du milieu du IIe s. ap. J.-C. On considère donc que Tiberius Claudius Cogidubnus était un Atrébate et que le domaine sur lequel s'exerçait son autorité s'étendait à minima sur ces trois cités.
L'année au cours de laquelle ce roi client de Rome a reçu cette attribution est inconnue. Tacite, qui a rédigé la Vie d'Agricola en 98 ap. J.-C. paraît indiquer qu'il était de ses contemporains (Vie d'Agricola, XIV). La mention faite du souverain breton intervient pourtant immédiatement après une courte description du gouvernement d'Aulus Plautius (43-47 ap. J.-C.) et de Publius Ostorius Scapula (47-51/52 ap. J.-C.) et immédiatement avant celui d'Aulus Didius Gallus (52-57 ap. J.-C.). Son praenomen et son nomen sont ceux que portaient l'empereur Claude (Tiberius Claudius Drusus), ce qui laisse supposer que c'est ce dernier qui lui a accordé la citoyenneté, la tradition voulant que l'on prenne ceux de celui qui avait favorisé la naturalisation. Cette hypothèse implique que l'événement soit contemporain ou postérieur à l'intervention de l'empereur Claude en Bretagne (43 ap. J.-C.) (et nécessairement antérieur la mort de ce dernier, en 54 ap. J.-C.). Aussi, son règne n'a certainement pas duré jusqu'au gouvernement de Sallustius Lucullus (84-89 ap. J.-C.), puisqu'à cette époque la ville de Noviomagus avait déjà, avec certitude, intégré la province de Bretagne (RIB-01, 2334).
Tacite, Vie d'Agricola, XIV :"Le premier consulaire qui gouverna ce territoire, Aulus Plautius, et son successeur, Ostorius Scapula, étaient, l'un et l'autre, de remarquables hommes de guerre. Peu à peu, le sud de la Bretagne gagna le statut de province et, en outre, une colonie de vétérans s'y installa. Le roi Cogidumnus, qui jusqu'à nos jours s'est montré très coopérant, se vit confier le gouvernement de certaines tribus, car une vieille habitude romaine, qui, depuis bien longtemps, a fait ses preuves, consiste à se servir même des rois pour mieux asservir."
"À Neptune et à Minerve, pour le salut de la maison divine, sous l'autorité de Tiberius Claudius Cogidubnus(1) grand roi des Bretons, la corporation des forgerons et ceux qui s'y trouvaient ont fait don de ce temple à leurs propres frais. Pudente fils de Pudentinus, a dédié cet espace."
(1) Aujourd'hui, la reconstruction du nom figurant sur cette inscription est lue : "Togidubnos" (voir cette entrée en lien).
Dessin modifié en tenant compte de la nouvelle lecture.
"A Jupiter le très bon, le très grand, au salut de l'empereur César Domitianus Auguste, Caius Sallustius Lucullus, légat d'Auguste propréteur de la province de Bretagne a posé (ce monument) pour s'acquitter de son voeu, de bon gré, comme il se doit. Quintus […]."