[Antipolitains] - Cité de Gaule narbonnaise, elle avait pour centre politique Antipolis (Antibes). A son apogée, cette petite cité contrôlait l'ensemble de la région comprise entre la Siagne et le Loup, soit le territoire de l'ancien diocèse d'Antibes (dont le siège a été transféré à Grasse, en 1244), dans le sud de l'actuel département des Alpes-Maritimes.
Après la capitulation de Massalia (49 av. J.-C.), les Romains détachèrent l'établissement d'Antipolis de sa métropole, et lui octroyèrent le statut de cité de droit latin (Pline, Histoire naturelle, III, 35 ; Strabon, Géographie, IV, 1, 9). Devenus indépendants, les Antipolitains commencèrent à battre monnaie et certaines de leurs émissions monétaires sont connues pour porter au revers le nom de la petite cité abrégé sous la forme ΑΝΤΙ ΛΕΠ (ou ΛΕΠΙ) (LT.2179 ; BN.2179-2186). Cette dernière abréviation est plus qu'intéressante puisqu'elle semble pouvoir être développée en ΑΝΤΙ(ΠΟΛΕΩC) ΛΕΠ(ΙΔΟΥ) "Antipolis Lepida", laissant entendre que la petite cité aurait été élevée au rang de colonie latine lorsque Marcus Aemilius Lepidus gouvernait la Gaule transalpine (44-42 av. J.-C.) (Rogers, 1986 ; Christol, 2009). Les magistrats de cette cité intégrèrent dés lors la tribu Voltinia, comme l'atteste l'épigraphie (CIL 12, 175 ; CIL 12, 179 et CIL 13, 8647 ; AE 1905, 225). La formule provinciale de la Gaule narbonnaise, vraisemblablement composée en 27 av. J.-C., stipule, immédiatement après la mention de l'oppidum Latinum Antipolis, la regio Deciatium, la "région des Déciates". Ceci laisse entendre que les Déciates ne furent pas élevés au rang de cité, mais furent définitivement adtributi aux Antipolitains. Par contre, les territoires dénommés regio Oxubiorum Ligaunorumque, "région des Oxybiens et des Ligaunes" furent quant à eux mentionnés après la colonie de Forum Iulii (Fréjus), impliquant qu'ils dépendirent dorénavant de cette dernière (Pline, Histoire naturelle, III, 35).
L'intégration pleine et entière des Déciates à la cité des Antipolitains dut se faire entre la fin du Ier av. J.-C. et le Ier ap. J.-C., avec l'octroi du droit latin. Ainsi, au milieu du IIe s. ap. J.-C., Ptolémée faisant d'Antipolis la métropole des Déciates (Géographie, II, 10, 8). A cette date, les deux territoires étaient amalgamés.
Les fouilles archéologiques effectuées au niveau de l'amphithéâtre des Trois Gaules à Lyon ont permis d'extraire des gradins sur lesquels étaient mentionnés les noms de plusieurs peuples dont les délégués siégeaient au sanctuaire fédéral des Trois Gaules. Contre toute attente, un bloc portant la mention ...]POL[... a été extrait (AE 2000, 939), laquelle paraît pouvoir être restituée de la manière suivante : [ANTI]POL[ITANI] (Audin & Guey, 1976 ; Chastagnol, 1997). Selon toute vraisemblance, il s'agissait de places réservées à des délégués issus de la cité des Antipolitains, bien que celle-ci relevait de la province de Gaule narbonnaise. Ces places, tout comme celles attribuées à des délégués de la cité des Glanienses||, doivent être considérées comme étant celles réservées à des étrangers aux Trois Gaules (Christol & Janon, 2000).
Lors de la réforme provinciale de Dioclétien (dernière décennie du IIIe s. ap. J.-C.), la ciuitas Antipolitana, la "cité antipolitaine" intégra la nouvelle province de Narbonnaise seconde, comme en témoigne la Notice des Gaules.
Pline, Histoire naturelle, III, 34-35 :"le promontoire Zao, le port Citharista ; la région des Camatulliques, puis les Sueltères ; et au-dessus les Verrucins ; sur la côte elle-même, Athénopolis des Marseillais ; une colonie de la huitième légion, Forum Julii, ou Pacensis, ou Classica ; il y passe un fleuve appelé Argenté ; la région des Oxubiens et des Ligaunes, au-dessus desquels sont les Suètres, les Quariates, les Adunicates ; sur la côte, la ville latine d'Antipolis ; la région des Déciates ; le Var, qui descend du mont Céma, de la chaîne des Alpes."
Strabon, Géographie, IV, 1, 9 :"Nous ferons remarquer seulement dès à présent que, bien qu'Antipolis soit située en dedans des limites de la Narbonnaise, et Nicaea en dedans des limites de l'Italie, celle-ci demeure dans la dépendance de Massalia et fait partie de la Province, tandis qu'Antipolis se trouve rangée au nombre des villes italiques, par suite d'un décret rendu contre les Massaliotes, qui l'a affranchie de leur juridiction."
"Aux Dieux mânes de Marcus Moltelius Secundinus, fils de Caius, (de la tribu) Voltinia, flamine, duumvir d'Antipolis, ses héritiers (ont fait ce monument), conformément à son testament."
"Aux Dieux mânes de Titus Valerius Paternus, fils de Titus, (de la tribu) Voltinia, duumvir, flamine, décurion. Titus Valerius Nepos, (de la tribu) Voltinia, chevalier public, pontife, décurion, son père, [...]."
Inscription d'Antibes (CIL 12, 178) IVLIAE CAELIANI LIBERTAE NIALLVSAE VXORI MERENTISSIMAE VIVVS FECIT C(AIVS) TVLLIVS FLAVIANVS DECVRIONIS FILIVS DOMO CATINA EX PROVINCIA SICILIA INCOLA ANTIPOLITANVS SIBI ET [
"A Iulia Niallusa, affranchie de Caelianus, la plus méritante des épouses. De son vivant, Caius Tullius Flavianus, fils du décurion, originaire de Catina dans la province de Sicile, antipolitain pour loi, a fait (ce monument) pour lui-même et [...]."
Inscription d'Antibes (ILN-02-A, 15) MA[...] MA[RC]ELLAE SA[CE]RDOT(I) MIN[E]RVAE ET DIANAE IN HONOR(EM) CALPVRNI HERMETIS MARIT(I) EIVS IIIIIIVIRI AVG(VSTALIS) COR(PORATI) A(NTIPOLITANI)
"Ma[...] Marcella, prêtresse de Minerve et de Diane, en l'honneur de Calpurnius Hermes, son mari, sévir augustal de la corporation des Antipolitains."
Inscription de Xanten (CIL 13, 8647 ; AE 1905, 225) M(ANIVS) MAECIVS VOL(TINIA) SEVERVS ANT[I]PO[LI] L(VCI) F(ILIVS) MIL(ES) LEG(IONIS) XV
"A Manius Maecius Severus, fils de Lucius, (de la tribu) Voltinia, d'Antipolis, militaire dans la légion XV."
Sources
• A. Audin & J. Guey, (1976) - "Quelques broutilles épigraphiques : Théâtre de Vienne, Amphithéâtre de Lyon", Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France, pp.200-205
• A. Chastagnol, (1997) - "Les cités de la Gaule narbonnaise. Les statuts", in : M. Christol, & O. Masson (eds.), Actes du Xe Congrès international d'épigraphie grecque et latine, Nîmes, 4-9 octobre 1992, Publications de la Sorbonne, Paris, pp.51-73
• M. Christol & M. Janon, (2000) - "Le statut de Glanum à l'époque romaine", Revue archéologique de Narbonnaise, vol.33, pp.47-54
• M. Christol, (2009) - "Les cités de droit latin en Gaule méridionale", in : F. Hurley ed., Rome et l'Occident. Gouverner l'Empire (IIe siècle av. J.-C. - IIe siècle ap. J.-C.), Presses universitaires de Rennes, Rennes, pp.315-358
• G. B. Rogers, (1986) - "Notes sur des rapports métrologiques : un système monétaire en Gaule de 43 à 23 av. J.-C.", Revue Numismatique, vol.6, n°28, pp.83-93
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique