Olbia - Comptoir massaliote, Olbia correspond au site hellénistique mis au jour au niveau de Saint-Pierre-de-l'Almanarre (Hyères, Var). Cette localité fut mentionnée sous les formes Ὀλβία par le Pseudo-Scymnos (Circuit de la Terre, v. 216), Ptolémée (Géographie, II, 10, 8) et Étienne de Byzance (Ethniques, 489), Ὀλβίαν (accusatif) & Ὀλβίας (génitif) par Strabon (Géographie, IV, 1, 5 ; 9) et Olbiam (accusatif) par Pomponius Mela (Description de la Terre, II, 70). Une dernière mention fut faite au IIe ou IIIe s. ap. J.-C., sous la forme VICINAE CASTELLANAE OLBIENSIVM "quartier fortifié des olbienses" (AE 1910, 60). Ce toponyme vient du grec ὀλβία, qui signifie "chance / bonheur", ce qui amène à traduire ce nom par "la chanceuse / la bienheureuse".
Le site archéologique a été découvert au milieu du XIXe s., identifié comme étant l'antique Ὀλβία en 1909, suite à la mise au jour d'une inscription non-équivoque (AE 1910, 60), avant de faire l'objet de plusieurs campagnes de fouilles depuis 1956, qui se se multipliées depuis les années 1990. Cette localité fut fondée vers 350-325 av. J.-C., sur le littoral, au pieds du Mont des Oiseaux (l'ὄρος Ὀλβιανόν d'Étienne de Byzance, Ethniques, 489), au point de jonction l'isthme de la presqu'île de Giens avec le continent. À l'origine Ὀλβία fut fondée pour servir d'escale aux navires, mais également pour protéger les possessions massaliotes des celto-ligures et autres pirates de la région. Cette dernière fonction explique pourquoi ce site a les caractéristiques d'une fondation militaire, avec une enceinte quadrangulaire de 165 mètres de côté (1 stade), surmontée par quatre tours d'angle et quatre autres tours sur les quatre côtés du rempart. Deux rues principales, se croisant à angle droit divisaient la ville en quatre quartiers, eux-mêmes scindés en plusieurs îlots, par des rues secondaires. Ces îlots étaient divisés en trois parcelles de même taille, traduisant la volonté d'une répartition égalitaire entre les colons (Bats, 1990 ; Brun, 1999 ; Fleury-Alcaraz, 2001). Selon J.-P. Brun (1999), ce comptoir fut conçu pour recevoir 400 familles. Citoyens de Massalia, les habitants d'Ὀλβία étaient, à la manière des clérouques d'Athènes, des soldats-colons, pêcheurs, agriculteurs, qui avaient comme mission principale de sécuriser le commerce maritime.
À l'extérieur de la ville d'Ὀλβία, mais dans la chôra de cette dernière, au niveau de la presqu'île de Giens, sur trouve un autre sanctuaire hellénistique, rupestre, actif entre la fin du IIe av. J.-C. et le tout début du Ier s. ap. J.-C.. En effet, au niveau du lieu-dit La Capte se trouvait un sanctuaire dédié à Aristée, ayant fait l'objet de plusieurs campagnes de fouilles depuis 1973 (Coupry & Giffault, 1984 ; Decourt, 2004 ; Bats, 2010).
Le site d'Olbia a connu une grande prospérité entre le Ier et le IIIe s. ap. J.-C. Trois ensembles thermaux, l'un intra-muros (Ier s. av. J.-C.), un second et un troisième au sud et à l'est de la ville grecque. Aussi, il a été possible d'identifier un nouveau quai du Haut-Empire, visant à remplacer l'ancien port grec ensablé (Fleury-Alcaraz, 2001). Cette ville gallo-romaine, qui se développa progressivement sur le site d'Olbia, est parfois assimilée à Pomponianis portus, mentionnée sur l'Itinéraire d'Antonin (505, 7 ; 8), bien que sa localisation ait été certainement toute autre.
Sources littéraires anciennes
Étienne de Byzance, Ethniques, 489 :"Olbia : ville de Ligystique. Le citoyen est dit Olbiopolitês. On trouve aussi Olbianoi, formé comme Asianoi. Il existe près de cette ville la montagne Olbianon."
Pomponius Mela, Description de la Terre, II, 70 :"Vient ensuite Forum-Julii, colonie de vétérans octaviens ; puis Athénopolis, Olbie, Tauroïs, Cithariste, et Lacydon, port des Massiliens, au fond duquel est Massilie. Cette ville fut fondée par des Phocéens dans le voisinage de nations barbares, qui, quoique aujourd'hui paisibles, n'ont avec elle aucune ressemblance ; de sorte qu'on est surpris de la facilité avec laquelle cette colonie a su s'établir sur une terre étrangère, et y conserver jusqu'à présent ses moeurs primitives."
Pseudo-Scymnos, Circuit de la Terre, v. 201-216 :"Tout près est Massilia très-grande ville, colonie des Phocéens. Ils la fondèrent dans la Ligystique cent vingt ans, dit-on, avant que fût livrée la bataille de Salamine. C'est ce que rapporte de sa fondation l'historien Timée. Puis vient après elle Tauroïs et, dans le voisinage, Olbia et, à l'extrémité, Antipolis."
Strabon, Géographie, IV, 1, 5 :"Ajoutons qu'ils avaient employé leurs forces militaires à fonder un certain nombre de places destinées à leur servir de boulevards contre les Barbares : les unes, situées sur la frontière d'Ibérie, devaient les couvrir contre les incursions des Ibères, de ce même peuple à qui ils ont communiqué avec le temps les rites de leur culte national (le culte de Diane d'Ephèse), et que nous voyons aujourd'hui sacrifier à la façon même des Grecs ; les autres, telles que Rhodanusia et Agathé, devaient les défendre contre les Barbares des bords du Rhône ; d'autres enfin, à savoir Tauroentium, Olbia, Antipolis et Nicaea, devaient arrêter les Salyens et les Ligyens des Alpes. Massalia possède encore des cales ou abris pour les vaisseaux et tout un arsenal."
Strabon, Géographie, IV, 1, 9 :"Quant à la côte qui se prolonge dans la direction du Var et de la partie de la Ligystique attenante à ce fleuve, elle nous présente, avec les villes massaliotes de Tauroentium, d'Olbia, d'Antipolis et de Nicaea, la station navale, fondée naguère par César-Auguste sous le nom de Forum Julium : cette station se trouve située entre Olbia et Antipolis, à 600 stades de Massalia. Le Var coule entre les villes d'Antipolis et de Nicaea, mais passe à 20 stades de l'une et à 60 de l'autre, de sorte qu'en vertu de la délimitation actuelle Nicaea se trouve appartenir à l'Italie, bien qu'elle dépende effectivement de Massalia. Nous l'avons déjà dit, ce sont les Massaliotes, qui, se voyant entourés de Barbares, ont bâti ces différentes places : ils voulaient les contenir et s'assurer au moins le libre accès de la mer, puisque du côté de la terre tout était aux mains de leurs ennemis."
Sources épigraphiques
Inscription de Saint-Pierre-de-l'Almanarre (Hyères) (AE 1910, 60) GENIO VICINAE CASTELLANAE OLBIENSIVM LVCIIVS RVPIIVS IACCHVS DONO DEDIT COM SVIS
"Au génie du quartier fortifié des olbienses, Lucius Rupilius Iacchus a fait ce don avec les siens."
Sources
• M. Bats, (1990) - "Olbia", in : "Voyage en Massalie, 100 ans d'archéologie en Gaule du Sud" (coord.) Musées de Marseille, Edisud, pp.206-210
• M. Bats, (2010) - "Les dédicants gaulois du sanctuaire d'Aristée de la chôra d'Olbia de Provence (Hyères, Var) connaissaient-ils le gallo-grec ?", in: L. Borhy (ed.), Studia celtica classica et romana Nicolae Szabó septuagesimo dedicata, Pytheas, Budapest, pp.51-54
• J.-P. Brun, (1999) - "Olbia", in : J.-P. Brun & M. Borreani (dir.), Carte archéologique de la Gaule 83/1 - Var, Académie des inscriptions et belles-lettres, Paris, pp.437-461
• J. Coupry & M. Giffault, (1984) - "Onomastique non-hellénique dans l'anthroponymie olbienne et massaliète, en Ligurie marseillaise, à la fin de l'époque hellénistique, d'après les ex-voto du sanctuaire d'Aristée à l'Acapte", Collection de l'Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité, vol. 294, Hommages à L. Lerat, pp.209-220
• J.-C. Decourt, (2004) - Inscriptions grecques de la France (IGF), Travaux de la Maison de l'Orient et de la Méditerranée, n°38, 363p.
• K. Fleury-Alcaraz, (2001) - "Renaissance et aménagement d'un site ; Olbia la grecque", Archéologia, n°381, pp.34-39
• J.-L. Reille, (2001) - "L'importation des meules domestiques dans la forteresse grecque d'Olbia (Hyères, Var) entre le IIe s. av. n. è. et le Haut Empire", Documents d'archéologie méridionale, n°24, [Disponible en ligne]
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique