Les Euganéens - Ancien peuple qui a occupé l'ensemble des territoires compris entre la mer Adriatique et les Alpes centrales, avant d'être cantonné aux seules Alpes et massifs préalpins du nord de l'Italie. Seules un nombre très limité de mentions anciennes de ce peuple sont connues : Euganeisque (Tite-Live (Histoire romaine, I, 1), Euganea (Silius Italicus, Punique, VIII, 604), Euganeorum (Pline, Histoire naturelle, III, 130), Euganeae gentes (Pline, Histoire naturelle, III, 133), genere Euganeos (Pline, Histoire naturelle, III, 134), Euganeo (Lucain, Pharsale, VII, 192), Euganeos [...] lacus (Martial, Épigrammes, IV, 25), Ligusticis Euganeisque montibus (Sidoine Apollinaire, Lettres, I, 5, 4) et Eugancum [...] Timavum (Sidoine Apollinaire, Poésies, IX). Les rares éléments que nous connaissions de leur histoire sont des récits mythologiques.
Pline donnait aux Euganéens des origines grecques et les considérait comme une population laissée là par Hercule, de retour de la péninsule ibérique avec les boeufs de Géryon (Histoire naturelle, III, 134). Cette origine leur était prêtée pour des raisons étymologiques, en effet cet ethnonyme était rapproché du grec ancien εὐγενής, qui signifie "bien né". Selon Tite-Live (Histoire romaine, I, 1) et Silius Italicus (Punique, VIII, 604), ils furent par la suite chassés des bords de la mer Adriatique par les Vénètes, une fraction des Paphlagoniens conduite ici par Anténor, après la guerre de Troie.
Après leur expulsion du littoral de l'Adriatique, les Euganéens se seraient fixés près des lacs alpins et préalpins du nord de l'Italie, que Martial dénomme Euganeos [...] lacus, les "lacs euganéens" (Épigrammes, IV, 25). Les régions montagneuses qui les entourent sont quant à elles appelées Ligusticis Euganeisque montibus, les "monts Liguriens et Euganéens" par Sidoine Apollinaire (Lettres, I, 5, 4). C'est dans cette même région qu'au milieu du IIe s. av. J.-C., Caton l'Ancien (Origines, cité par Pline, Histoire naturelle, III, 133) comptabilisait 34 villes euganéennes, dont Pline précise qu'elles jouissaient du droit latin. Il est fort probable que Verona (Vérone), ville appartenant à la fois aux Rhètes et aux Euganéens selon Pline (Histoire naturelle, III, 130), était d'entre elles, tout comme Stoenos (Pline, Histoire naturelle, III, 133), probable métropole des Stoènes. Caton l'Ancien estimait également que les Trumplins et les Camunes étaient des peuples euganéens (Origines, cité par Pline, Histoire naturelle, III, 133).
D'autres monts Euganéens que ceux évoqués par Sidoine Apollinaire (Lettres, I, 5, 4) sont connus. En effet, les montagnes mentionnées par Sidoine Apollinaire sont celles où le Lambrus (Lambro), l'Addua (Adda), l'Atagis (Adige) et le Mincius (Mincio) prennent leurs source, soit les massifs alpins centraux et préalpes des Alpes orientales. Lucain (Pharsale, VII, 192) par contre, mentionne un augure officiant au sommet d'un mont Euganeo au pied duquel jaillit la source d'Aponus (Abano Terme, province de Padoue). Il s'agît du mont Montirone d'Abano, qui appartient à un ensemble collinaire encore appelé de nos jours les monts Euganéens (Colli Euganei en italien). Ces collines sont situées au sud-ouest de Padua (Padoue), ville dont la fondation était attribuée à Anténor, selon les légendes romaines.
Ce même passage de Lucain (Pharsale, VII, 192) situe le Timavus (Timavo) près du mont Euganeo. Il s'agît là d'une erreur, ou plus précisément d'un raccourcis. En effet Sidoine Apollinaire (Poésies, IX) qualifie ce même fleuve côtier, qui marquait la frontière entre l'Istrie et la Vénétie, d'Eugancum [...] Timauum, le "Timave euganéen".
Lucain, Pharsale, VII, 192 :"S'il faut en croire la renommée, assis sur le mont Euganin, aux lieux où jaillit en fumant l'Aponus, où le Timave répand ses ondes, un augure s'écria : "Voilà le jour suprême ; le sort du monde se décide ; Pompée et César heurtent leurs glaives sacrilèges" soit qu'il eût tiré ses présages des éclats du tonnerre et des traits de la foudre, soit qu'il eût observé la Discorde qui s'élevait parmi les astres ou l'obscure pâleur du soleil et l'éclipse de sa lumière."
Martial, Épigrammes, IV, 25 :"Rivages de l'Altinum, qui rivalisez avec les belles campagnes de Baïes, bois qui vis le bûcher de Phaéton, vous, la plus belle des Dryades, que le Faune de la ville d'Anténor prit pour seule et unique épouse auprès des lacs Euganéens ; et vous, Aquilée, fécondée par les eaux, du Timave, qui reçut les fils de Léda, et permit à Cyllarus de puiser l'onde de ses sept embouchures ; vous serez le port et l'asile de ma vieillesse si quelque jour je suis maître de mes loisirs."
Pline, Histoire naturelle, III, 130 :"Puis viennent les gens de Feltre, les Tridentins, les Béruniens, dont les villes sont rhétiques ; Vérone, qui appartient aux Rhètes et aux Euganéens ; Julia, qui appartient aux Carniens ; puis des peuples qu'il n'importe pas d'énumérer scrupuleusement, les Alutriens, les Assériates, les Flamoniens Vaniens, et d'autres surnommés Culiques ; les Forojuliens, surnommés Transpadans ; les Forétans, les Nédinates, les Quarquènes, les Taurisans, les Togiens, les Varbares."
Pline, Histoire naturelle, III, 133-134 :"On regarde les Rhètes comme issus des Étrusques, expulsés par les Gaulois et conduits par le chef Rhétus. Sur le versant des Alpes qui regarde l'Italie, sont les nations Euganéennes, jouissant du droit latin, et dont Caton énumère trente-quatre villes; parmi elles sont les Triumpilins, peuplade vendue avec son territoire ; puis les Camunes et plusieurs autres semblables, attribuées aux municipes voisins. Le même Caton pense que les Lépontiens et les Salasses appartiennent à la nation Taurisque ; presque tous les autres, admettant une étymologie grecque pour le mot Lépontiens, pensent qu'ils proviennent d'hommes qui appartenaient au cortège d'Hercule, et dont les membres furent gelés par la neige au passage des Alpes ; que les habitants des Alpes Graïques provenaient de Grecs (Graii) appartenant aussi à cette armée, et que les Euganéens, étant d'une race illustre, avaient tiré leur nom de cette circonstance. Leur capitale est Stonos."
Sidoine Apollinaire, Lettres, I, 5, 4 :"Porté un peu en travers des bouches du bourbeux Lambro, du bleuâtre Adda, du rapide Adige, du paresseux Mincio, je vis jusque dans leurs lits ces fleuves qui prennent leurs sources aux monts Liguriens et Euganées ; les rives en sont couvertes de forêts de chênes et d'érables."
Sidoine Apollinaire, Poésies, IX :"Je ne chanterai pas la jeunesse lacédémonienne, s'exerçant à la lutte en l'honneur des Tyndarides ; cette jeunesse qui, façonnée à cet art, aux plaines de Thérapné, fait trembler les lutteurs du théâtre bébrycien. Je ne parlerai pas des oracles de Lycie et des Gérites, ni des réponses de Thémis antérieures à celles de Delphes ; ni des dieux que le Toscan interroge sur l'autel inaccessible, en purifiant le sol qu'a frappé la foudre ; ni de ceux que l'augure, né sur les bords du Timave Euganéen, voyait, des collines d'Anténor, prêter leur appui aux combattants de Thessalie ; ni de ceux qu'interrogeaient aussi Amphiaraüs et Melampus."
Silius Italicus, Punique, VIII, 604 :"ceux de la colonie troyenne, sortie anciennement du territoire des Euganéens et qui avait fui les rivages sacrés d'Anténor."
Tite-Live, Histoire romaine, I, 1 :"C'est encore une chose universellement connue, qu'après diverses aventures, Anténor, à la tête d'une troupe nombreuse d'Hénètes, qui, chassés de la Paphlagonie par une sédition, et privés de leur roi Pylémène, mort sous les murs de Troie, cherchaient un chef et une retraite, pénétra jusqu'au fond du golfe Adriatique, et que, chassant devant eux les Euganéens, établis entre la mer et les Alpes, les Hénètes, réunis aux Troyens, prirent possession de leur territoire."