Campagne de Quintus Fulvius Nobilior contre les Celtibères [-153]
Campagne de Quintus Fulvius Nobilior contre les Celtibères (153 av. J.-C.)
Le contentieux relatif aux fortifications de Segeda (automne-hiver 154 av. J.-C.) aboutit à la rupture du le traité qui unissait les Segedenses aux Romains depuis 179 av. J.-C.. Conscient que ce précédent pouvait mettre le feu à toute la Celtibérie, le Sénat romain décida de frapper fort et de tuer tout projet de révolte dans l'oeuf. Les comices centuriates furent avancés au 1er janvier 153 av. J.-C., et Quintus Fulvius Nobilior et Titus Annius Luscus furent élus consuls. Contrairement à l'usage, ils entrèrent en charge immédiatement (Tite-Live, Periochae, XLVII ; Cassiodore, Chronique, 601). Pour faire face à l'urgence dans la péninsule Ibérique, Quintus Fulvius Nobilior y fut dépêché dans l'urgence, à la tête d'une armée de près de 30000 hommes (Appien, Ibérique, IX, 45).
Lorsque l'armée romaine approcha du territoire des Segedenses, les fortifications de Segeda n'étaient toujours pas terminées, donc impropres à soutenir une attaque. Les Segedenses préférèrent donc quitter leur ville. Ils déléguèrent donc des représentants auprès des Numantins, l'une des composantes des Arévaques, afin de pouvoir trouver refuge sur leur territoire, ce qu'ils acceptèrent. Suivant Florus, les Numantins tentèrent en vain d'intercéder en faveur des Segedenses, afin d'éviter tout conflit avec Rome. Pour toute réponse, les Romains conditionnèrent le maintien du traité garantissant la paix avec les Numantins par le fait que ces derniers déposent les armes, ce que ces derniers ne pouvaient accepter, puisqu'ils n'étaient pas eux-mêmes en conflit avec Rome (Abrégé de l'Histoire romaine, II, 18). Conscients que le secours apporté aux Segedenses et le refus des conditions imposées par les Romains constituaient un casus belli, le 20 août 153 av. J.-C. (1), les deux peuples scellèrent leur alliance en désignant un chef de guerre commun, Caro, un Segedense (Appien, Ibérique, IX, 45).
La campagne lancée par Quintus Fulvius Nobilior au début de l'année 153 av. J.-C. tourna rapidement à la catastrophe. D'abord tournée contre les Segedenses, puis les Numantins, cette campagne déstabilisa profondément toute la Celtibérie, révélant ainsi involontairement le rejet de la domination romaine par les Celtibères. Le consul eut à subir des combats incessants, auxquels Polybe fit référence, sans jamais parvenir à reprendre la main (Histoire générale, XXXV, 1). La série de conflits qui se succédèrent dés lors est dénommée par les historiens la deuxième guerre celtibère (153-151 av. J.-C.).
Notes
(1) Appien indique que cette élection eut lieu trois jours avant les Vulcania, fête en l'honneur du dieu Vulcain qui débutait le 23 août (Ibérique, IX, 45).
Sources littéraires anciennes
Appien, Ibérique, IX, 45 :"C'est pourquoi le préteur Nobilior fut envoyé contre elles avec une armée de presque trente mille hommes. Quand les Ségédéens apprirent son arrivée, leur mur n'étant pas encore fini, ils se sauvèrent avec leurs épouses et leurs enfants chez les Arévaques, et demandèrent à ces derniers de les recevoir. Les Arévaques acceptèrent et choisirent pour général un Ségédéen appelé Carus, qu'ils considéraient comme un homme de guerre."
Cassiodore, Chronique, 601 :"Q. Fulvius et P. Annius. Ce furent les premiers consuls à entrer en fonction aux calendes de janvier, à cause de la guerre soudaine en Celtibérie."
Florus, Abrégé de l'Histoire romaine, II, 18 :"Jamais, à dire vrai, motif de guerre ne fut plus injuste. Les Numantins avaient accueilli les Ségidenses, leurs alliés et leurs parents, qui avaient échappé aux Romains, et ils avaient vainement intercédé en leur faveur. Bien qu'ils n'eussent pris part à aucune guerre, les Romains leur ordonnèrent de déposer les armes ; leur alliance était à ce prix. Les barbares accueillirent cette proposition comme si on voulait leur couper les mains."
Polybe, Histoire générale, XXXV, 1 :"On a appelé guerre de feu celle que Rome fit alors aux Celtibériens. Cette guerre, en effet, eut un caractère d'acharnement tout particulier : elle offre une série de combats continus. En Grèce ou en Asie, le plus souvent une bataille, rarement deux, décide de la lutte, et dans ces batailles mêmes, tout dépend d'un seul moment, celui de l'attaque et du choc. Mais dans la guerre dont il s'agit ici, les choses prirent un autre train. D'ordinaire, la nuit seule arrêtait ces mêlées, où les combattants ne laissaient la fatigue triompher ni de leur âme, ni de leur corps, et, comme regrettant d'avoir quitté le champ de bataille, ils recommençaient sans cesse de nouvelles luttes. C'est à peine si l'hiver interrompait la suite de ces éternelles hostilités. Enfin, si on veut se représenter une guerre de feu, on ne saurait en concevoir une autre que celle dont nous parlons."
Tite-Live, Histoire romaine (Periochae), XLVII :"La 598e année de la fondation de Rome, les consuls entrent pour la première fois en charge, immédiatement après la dissolution des comices et la création des consuls de l'année suivante. La révolte des Espagnols est la cause de ce changement dans la tenue des comices."
Sources
• Pierre Crombet pour l'Arbre Celtique
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique