Peuple de la Gaule celtique, leur territoire correspondait à la moitié orientale de l'ancien diocèse du Mans (avant 1790), c'est à dire l'actuel Haut-Maine (soit une grande partie du département de la Sarthe). Leur capitale était Vindinum (Le Mans).
Attestations et étymologie
Ce peuple fut mentionné sous les formes Aulercis Cenomanis par César (Guerre des Gaules, VII, 75), (Aulerci qui cognominantur) Cenomani par Pline (Histoire naturelle, IV, 107), Αὐλίρκιοι οἱ Κενομανοὶ par Ptolémée (Géographie, II, 8, 8) et enfin sur deux inscriptions découvertes à Allonnes : AVL(ERCI) CE[NOMANI (CAG-72, p 116 ; AE 2003, 1187 ; 2004, 928) et CIVIT(AS) [AV]L(ERCORVM) [CENOMAN(ORVM)] (AE 2003, 1189 ; 2004, 930 ; 2011, 764). Leur nom est gaulois. Le premier composé s'explique par le préfixe au-, qui exprime l'idée de séparation ou d'éloignement, associé au terme -lergo / -lerco qui signifie "trace". "Aulerques" devait signifier "(ceux qui sont) loin de leurs traces". L'étymologie du second composé n'est pas résolue.
Histoire
● Protohistoire
L'idée qu'il ait pu existé un lien entre les Aulerques Cénomans et les Cénomans d'Italie semble avoir été émise par Tite-Live (Histoire romaine, V, 34 ; 35). En effet, narrant le mythe du roi des BiturigesAmbigatus, ayant envoyé ses neveux Bellovesus à la conquête de l'Italie, et Segovesus à la conquête de la forêt Hercynienne, depuis la Gaule (Tite-Live, Histoire romaine, V, 34), il mentionne dans les rangs gaulois les Aulercos "Aulerques". Dans le passage suivant, il évoque spécifiquement l'arrivée des Cénomans en Italie, depuis la Gaule (via la vallée du Tessin), sous la conduite d'Elitovius et Bellovesus (Tite-Live, Histoire romaine, V, 35). Il est donc fort probable qu'à ses yeux, les Cénomans d'Italie ne pouvaient qu'être issus des Aulerques Cénomans de Gaule.
On considère régulièrement que les Aulerques Cénomans, Aulerques Eburoviques, Aulerques Diablintes et Aulerques Brannoviques pourraient avoir été les fractions d'un même peuple, ayant pris leur indépendance dans un contexte qui ne nous est pas connu. Autre alternative, on peut également penser qu'il s'agît de peuples différents, unis au sein d'une même confédération. Les rares textes existants, la Guerre des Gaules de César en premier lieu, n'apportent aucun élément d'explication.
● Guerre des Gaules
Bien que le récit de la guerre des Gaules (58-51 av. J.-C.) par César soit généralement précis, il mentionne à plusieurs reprises les Aulercos "Aulerques" sans que nous ne puissions dire s'il les évoque dans leur ensemble, ou s'il évoque une population particulière de manière imprécise. Les Aulerques Cénomans firent assurément parler d'eux en 52 av. J.-C., lorsqu'ils fournirent un contingent de 5000 hommes aux armées de secours chargées de contraindre César à lever le siège d'Alésia (César, Guerre des Gaules, VII, 75).
● Intégration de la cité des Aulerques Cénomans à l'Empire romain
Dans le cadre de la réforme provinciale de Dioclétien (dernière décennie du IIIe s. ap. J.-C.), la province de Gaule lyonnaise fut divisée en deux nouvelles provinces. À cette occasion, la cité des Aulerques Cénomans intégra la province de Lyonnaise seconde. Lorsque cette province fut à sont tour divisée, lors de la réforme provinciale de Constantin (314 ap. J.-C.), la cité des Aulerques Cénomans intégra finalement la province de Lyonnaise troisième.
Sources littéraires anciennes
César, Guerre des Gaules, VII, 75 :"Pendant que ces choses se passaient devant Alésia, les principaux de la Gaule, réunis en assemblée, avaient résolu, non d'appeler aux armes tous ceux qui étaient en état de les porter, comme le voulait Vercingétorix, mais d'exiger de chaque peuple un certain nombre d'hommes ; ils craignaient, dans la confusion d'une si grande multitude, de ne pouvoir ni la discipliner, ni se reconnaître, ni se nourrir. Il fut réglé que les divers états fourniraient, savoir [...] les Ambiens, les Médiomatrices, les Petrocorii, les Nerviens, les Morins, les Nitiobroges, chacun cinq mille ; les Aulerques Cénomans, autant ; les Atrébates, quatre mille ; les Véliocasses, les Lexovii, les Aulerques Eburovices, chacun trois mille, les Rauraques avec les Boïens, mille ; vingt mille à l'ensemble des peuples situés le long de l'Océan, et que les Gaulois ont l'habitude d'appeler Armoricains, au nombre desquels sont les Curiosolites, les Redons, les Ambibarii, les Calètes, les Osismes, les Lémovices, les Unelles."
Pline, Histoire naturelle, IV, 107 :"La Gaule Lyonnaise renferme les Lexoviens, les Véliocasses, les Calètes, les Vénètes, les Abrincatuens, les Ossismiens ; la Loire, fleuve célèbre ; une péninsule remarquable qui s'avance dans l'Océan, à partir des Ossismiens, dont le tour est de 625.000 pas, et dont le col a 125.000 pas de large ; au-delà de cette péninsule, les Namnètes ; dans l'intérieur, les Éduens, alliés, les Carnutes, alliés, les Boïens, les Sénons, les Aulerques surnommés Éburoviques, et ceux qui sont surnommés Cénomans ; les Meldes, libres ; les Parisiens, les Tricasses, les Andécaves, les Viducasses, les Bodiocasses, les Venelles, les Coriosuélites, les Diablintes, les Riedons, les Turons, les Atésuens, les Ségusiaves, libres, dans le territoire desquels est Lyon, colonie."
Tite-Live, Histoire romaine, V, 34 :"Le sort assigna à Ségovèse les forêts Hercyniennes ; à Bellovèse, les dieux montrèrent un plus beau chemin, celui de l'Italie. Il appela à lui, du milieu de ses surabondantes populations, des Bituriges, des Arvernes, des Héduens, des Ambarres, des Carnutes, des Aulerques ; et, partant avec de nombreuses troupes de gens à pied et à cheval, il arriva chez les Tricastins. Là, devant lui, s'élevaient les Alpes; et, ce dont je ne suis pas surpris, il les regardait sans doute comme des barrières insurmontables; car, de mémoire d'homme, à moins qu'on ne veuille ajouter foi aux exploits fabuleux d'Hercule, nul pied humain ne les avait franchies."
Tite-Live, Histoire romaine, V, 35 :"Bientôt, suivant les traces de ces premiers Gaulois, une troupe de Cénomans, sous la conduite d'Étitovius, passe les Alpes par le même défilé, avec l'aide de Bellovèse, et vient s'établir aux lieux alors occupés par les Libuens, et où sont maintenant les villes de Brixia et de Vérone. Après eux, les Salluviens se répandent le long du Tessin, près de l'antique peuplade des Lèves Ligures."
Sources épigraphiques
Inscription d'Allonnes (AE 2003, 1187 ; 2004, 928) ... TRIB(VNICIA) P]OT(ESTATE) III CO(N)S(VLI) II I[MP(ERATORI) II [...] AVL(ERCI) CE[NOMANI
"[...] revêtu à trois reprises du pouvoir tribunicien, deux fois consul, salué 2 fois impérator [...] (la cité des) Aulerques Cénomans [...]."
"Pour [...] légat d'Auguste propréteur de la province de Lyonnaise, quindecimvir sacris faciundis, adlecté parmi les prétoriens, [?] de la légion XIIII Gemina Martia Victrix, préposé aux détachements de [?] Gallica [?] [?] des Germains et des Daces [?] ayant reçu pour décorations militaires la couronne murale, la (couronne) vallaire, deux lances, ainsi que [?] étendards, questeur Auguste, tribun de la légion [?], tribun de la légion VI Victrix, [?] de la légion XXII Primigenia, decemvir chargé des litiges. La cité des Aulerques Cénomans (a érigé ce monument)."