Cavares - Peuple gaulois installé sur la rive gauche du Rhône, entre la Durance et le Tricastin. Leur nom s'explique aisément par le gaulois *cavaros, qui signifie les "géants / héros / champions".
D'un point de vue archéologique, on constate que du fait de la proximité de la colonie phocéenne de Μασσαλία (Massalia, Marseille) et de plusieurs de ses comptoirs, dont Θηλίνη (Théliné, Arles) et Ροδανουσία (Rhodanousia, Espeyran), le territoire des Cavares reçut très tôt d'importantes influences hellénistiques. Il faut peut-être trouver là l'explication du fait qu'Artémidore d'Éphèse ait qualifié deux des oppida des Cavares, Avenio (Avignon) et Cabellio (Cavaillon), de possessions massaliotes (Descriptions géographiques, cité par Etienne de Byzance, Ethniques).
L'histoire de ce peuple reste mystérieuse. On considère souvent qu'aux IIIe et IIe s. av. J.-C., ils étaient les clients des Voconces ou des Allobroges. C'est ce qui est classiquement déduit du fait qu'ils ne furent jamais mentionnés par les sources anciennes dans le cadre de la campagne d'Hannibal Barca en Gaule transalpine (218 av. J.-C.), bien que leur territoire fut au coeur de nombreux événements richement documentés. Ils ne furent pas non-plus mentionnés dans les nombreux textes portant sur la conquête du sud de la Gaule par les Romains (125-118 av. J.-C.). Après la conquête, leur territoire fut intégré à la province romaine de Gaule transalpine.
Dans le cadre des pillages perpétrés en Gaule par les Cimbres et les Teutons (113-102 av. J.-C.), une importante bataille eut lieu sur leur territoire, au cours de laquelle les armées romaines commandées par Quintus Caepio et Mallius Maximus furent taillées en pièces. Cette bataille eut lieu non loin d'Arausio, en 105 av. J.-C. (Cf. La bataille d'Arausio).
La plus ancienne mention connue de ce peuple remonte à l'Économie rurale de Varron, ouvrage dans lequel nous apprenons qu'au Ier s. av. J.-C., les Cavares exportaient d'importantes quantités de charcuteries à Rome, où elles étaient particulièrement appréciées (Économie rurale, II, 4, 10).
Strabon, qui reprend au moins partiellement des informations des Descriptions géographiques d'Artémidore d'Éphèse (Ier s. av. J.-C.), décrit les Cavares comme un peuple profondément romanisé. Il semble indiquer que cet ethnonyme regroupait sous un même nom plusieurs populations de la rive gauche du Rhône (Géographie, IV, 1, 12). Ceci pourrait expliquer que les sources antérieures aient été étonnamment silencieuses à leur sujet. Enfin, si l'on se base sur les écrits de Pline (Histoire naturelle, III, 36) et Ptolémée (Géographie, II, 10, 14), de nombreuses colonies romaines ont été déduites sur leur territoire au Ier s. av. J.-C., le cas le mieux documenté étant la fondation de la colonie d'Arausio (36-35 av. J.-C.).
Pline, Histoire naturelle, III, 36-37 :"Dans l'intérieur des terres, colonies : Arles de la sixième légion, Béziers de la septième, Orange de la seconde ; dans le territoire des Cavares, Valence, des Allobroges Vienne ; villes latines : Aix des Salluviens, Avignon des Cavares, Apta Julia des Vulgientes, Alébécé des Reies Apollinaires, Alba des Helves, Augusta des Tricastins, Anatilia, Aeria, Bormanni, Comacina, Cabellio, Carcasum des Volces Tectosages, Cessero, Carpentoracte des Mémines, Ies Caenicenses, les Cambolectres, surnommés Atlantiques, Forum Voconii, Glanum Livii ; les Lutevans, appelés aussi Foroneronienses ; Nîmes des Arécomiques, Piscènes, les Rutènes, les Samnagenses ; Toulouse des Tectosages, sur la frontière de l'Aquitaine ; les Tascons, les Tarusconienses, les Umbraniques ; les deux capitales de la cité des Vocontiens alliés, Vasio et Lucus Augusti ; dix-neuf villes sans renom, de même que vingt-quatre attribuées à Nîmes."
Pomponius Mela, Description de la Terre, II, 68 :"Ses villes les, plus florissantes sont Vasion chez les Vocontiens, Vienne chez les Allobroges, Avénion chez les Cavares, Nemausus chez les Arécomiques, Tolose chez les Tectosages, Arausion, colonie de vétérans de la seconde légion, Arélate, colonie de vétérans de la sixième, Baeterres, colonie de vétérans de la septième ; mais par-dessus tout Narbo-Martius, colonie d'Atacines et de vétérans de la dixième légion, autrefois, le boulevard de toute cette contrée, qui lui doit aujourd'hui son nom et sa célébrité."
Pomponius Mela, Description de la Terre, II, 72 :"Le Rhône commence à peu de distance des sources de l'Ister et du Rhin ; il se jette ensuite dans le lac Léman, le traverse avec son impétuosité ordinaire, sans mêler ses eaux à celles du lac, et en sort aussi gros qu'il y était entré. De là il roule vers l'occident, et sépare les deux régions de la Gaule jusqu'à une certaine distance ; puis, se tournant vers le sud, il entre dans la Narbonnaise, où, déjà considérable, il se grossit encore du tribut de plusieurs rivières, et va se jeter dans la mer, entre le pays des Volces et celui des Cavares."
Strabon, Géographie, IV, 1, 11 : "Avançons-nous donc à partir de Massalia dans le pays compris entre les Alpes et le Rhône, nous y trouvons d'abord les Salyens, dont le territoire mesure 500 stades jusqu'au Druentias ; puis, le bac nous passe à Cavallion, et là nous mettons le pied sur le territoire des Cavares, qui s'étend à son tour jusqu'au confluent de l'Isara et du Rhône, c'est-à-dire jusqu'au point où le mont Cemmène vient en quelque sorte rejoindre le Rhône.[...] Il y a encore d'autres rivières qui, entre le Druentias et l'Isar, descendent des Alpes pour s'unir au Rhône ; nous en citerons deux notamment qui entourent [Luerion], la ville des Cavares, et qui confondent leurs eaux avant de se jeter dans le fleuve, et une troisième, le Sulgas, qui a son confluent près de la ville de Vindalum, à l'endroit même où Cnaeus [Domitius] Aenobarbus tailla en pièces, dans une grande bataille rangée, plusieurs myriades de Gaulois. Dans ce même intervalle du Druentias et de l'Isar, on remarque plusieurs places importantes, telles que Avenion, Arausion et Aeria, ville bien nommée, nous dit Artémidore, en ce qu'elle occupe, tout au haut d'une montagne fort élevée, une situation vraiment aérienne. En général, le pays n'offre que plaines et beaux pâturages, mais, pour aller d'Aeria à [Luerion], il faut franchir encore dans la montagne plusieurs défilés étroits et obstrués par des bois."
Strabon, Géographie, IV, 1, 12 : "De l'autre côté du fleuve, ce sont les Volces qui occupent la plus grande partie du pays, les Volces dits Arécomisques. Narbonne passe pour être leur port, il serait plus juste de dire qu'elle est celui de la Gaule entière, tant elle surpasse les autres villes maritimes par l'importance et l'activité de son commerce. Les Volces touchent au Rhône et voient s'étendre en face d'eux, sur la rive opposée, les possessions des Salyens et des Cavares, [disons mieux, des Cavares seuls,] car le nom de ce peuple l'a emporté sur tous les autres, et l'on commence à ne plus appeler autrement les Barbares de cette rive, lesquels d'ailleurs ne sont plus, à proprement parler, des Barbares, vu qu'ils tendent de plus en plus à prendre la physionomie romaine, adoptant tous la langue, les moeurs, voire même quelques-uns les institutions des Romains."
Varron, Économie rurale, II, 4, 10 :"La charcuterie des Gaules a toujours été renommée pour l'excellence et la quantité de ses produits. L'exportation considérable de jambons, de saucissons des Comacines et des Cavares et autres confections de ce genre, qui se fait annuellement de ce pays à Rome, témoigne de leur supériorité comme goût."