Peuple de la Gaule celtique, puis de la province romaine de Gaule aquitaine. Leur territoire correspondait à celui qui fut celui du diocèse de Mende (avant 1790), soit le Gévaudan, pays qui recouvre assez précisément l'actuel département de la Lozère. La métropole de cette cité était Anderitum (Javols, Peyre-en-Aubrac, Lozère).
Attestations et étymologie
Cet ethnonyme a été mentionné par César sous les formes Gabalos et Gabalis (Guerre des Gaules, VII, 7 ; 64 ; 75), supposant un nominatif pluriel en Gabali, par Pline sous les formes Gabales (Histoire naturelle, IV, 109) et Lesurae Gabalicoque pagis "de la Lozère du pays des Gabales" (Histoire naturelle, XI, 240), ils furent également mentionnés sous la forme Γαβαλεῖς par Strabon (Géographie, IV, 2, 2) et Γάβαλοι par Ptolémée (Géographie, II, 7, 16-17). Suivant X. Delamarre (2003 ; 2019), ce nom s'expliquerait par le gaulois *gablos > gabalos, dont le sens premier dût être "fourche / branche fourchue" et par extension "gibet". Ceci amènerait donc à traduire cet ethnonyme par "les fourches". J. Lacroix (2003) soutient la même hypothèse, mais privilégie un sens étendu à "favelot", et traduit cet ethnonyme par "les hommes aux javelots".
Histoire
● La guerre des Gaules
Les Gabales ne prirent part que très tardivement à la guerre des Gaules. Ils se tirent suffisamment à l'écart des différents conflits pour n'avoir été mentionnés par César qu'à partir de l'année 52 av. J.-C. En effet, après avoir obtenu le ralliement de nombreux peuples gaulois, Vercingetorix envoya Lucterios dans le sud de la Gaule celtique, en direction de cités n'ayant pas tenu leur engagement d'entrer dans l'insurrection, ou celles possiblement hésitantes en raison de la proximité de la province romaine de Gaule transalpine. Les Rutènes, les Nitiobroges et les Gabales se laissèrent finalement entraîner par Lucterios, et lancèrent une première attaque contre la région de Narbo (Narbonne) (Guerre des Gaules, VII, 7).
Après l'assemblée de Bibracte (été 52 av. J.-C.), les Arvernes, les Gabales et possiblement les Vellaves lancèrent une nouvelle série d'attaques contre la Gaule transalpine, visant plus particulièrement les Helviens (Guerre des Gaules, VII, 64).
Les Gabales ne furent finalement mentionnés nommément pour avoir pris part à la levée de l'armée de secours chargée de contraindre les Romains à lever le siège d'Alesia, en contribuant au contingent de 35000 combattants des Arvernes et de leurs alliés (Guerre des Gaules, VII, 76).
● La romanisation des Gabales
En 27 av. J.-C., dans le cadre de la réorganisation administrative de la Gaule opérée par Auguste, le territoire des Gabales fut intégré à la province de Gaule aquitaine (Pline, Histoire naturelle, IV, 109). Quelques années plus tard, lorsque Auguste définit le statut des cités de la province (16-13 av. J.-C.), les Gabales héritèrent du statut fiscal de cité stipendiaire, impliquant qu'ils étaient soumis au paiement du tribut (Histoire naturelle, IV, 109). Ce fut très certainement à cette même époque que les Gabales édifièrent leur métropôle suivant le modèle romain, Anderitum (Javols, Peyre-en-Aubrac, Lozère).
● La cité des Gabales au Bas-Empire
Dans le cadre de la réforme provinciale de Dioclétien (fin du IIIe s. ap. J.-C.), la cité des Gabales fut rattachée administrativement à la province d'Aquitaine première (Notice des Gaules).
Sources littéraires anciennes
César, Guerre des Gaules, VII, 7 :"Cependant le Cadurque Luctérios, envoyé chez les Rutènes, les attire au parti des Arvernes, va de là chez les Nitiobroges et les Gabales, qui lui donnent les uns et les autres des otages ; puis, à la tête d'une nombreuse armée, il marche pour envahir la Province du côté de Narbonne."
César, Guerre des Gaules, VII, 64 :"Les choses ainsi réglées, il (Vercingetorix) ordonne aux Éduens et aux Ségusiaves, limitrophes de la province, de lever dix mille fantassins ; il y ajoute huit cents cavaliers. Il confie le commandement de ces troupes au frère d'Éporédorix, et lui dit de porter la guerre chez les Allobroges. D'un autre côté, il envoie les Gabales et les plus proches cantons des Arvernes, ravager le territoire des Helviens, ainsi que les Rutènes et les Cadurques celui des Volques Arécomiques. En même temps, et par des messages secrets, il sollicite les Allobroges, espérant que les ressentiments de la dernière guerre n'y étaient pas encore éteints. Il promet aux chefs de l'argent, et à la nation la souveraineté de toute la province."
César, Guerre des Gaules, VII, 75 :"Pendant que ces choses se passaient devant Alésia, les principaux de la Gaule, réunis en assemblée, avaient résolu, non d'appeler aux armes tous ceux qui étaient en état de les porter, comme le voulait Vercingétorix, mais d'exiger de chaque peuple un certain nombre d'hommes ; ils craignaient, dans la confusion d'une si grande multitude, de ne pouvoir ni la discipliner, ni se reconnaître, ni se nourrir. Il fut réglé que les divers états fourniraient, savoir les Héduens, avec leurs clients les Ségusiaves, les Ambivarétes, les Aulerques Brannovices, les Blannovii, trente-cinq mille hommes ; les Arvernes avec les peuples de leur ressort, tels que les Eleutètes, les Cadurques, les Gabales, et les Vellavii, un pareil nombre ; […]."
Pline, Histoire naturelle, IV, 108-109 :"A l'Aquitaine appartiennent les Ambilatres, les Anagnutes, les Pictons, les Santons, libres; les Bituriges, libres, surnommés Ubisques ; les Aquitains qui ont donné leur nom a la province ; les Sediboniates ; puis les Convènes rassemblés dans une ville ; les Bégères, les Tarbelliens, surnommés Quatuor Signani (à cause d'une garnison de quatre enseignes) ; les Cocosates, surnommés Sex Signani ; les Vénames, les Onobrisates, les Bélendes, la chaîne des Pyrénées ; au-dessous, le s Monèses, les Osquidates des montagnes, les Sibyllates, les Campones, les Bercorcates, les Bipedimuens, les Sassuminiens, les Vellates, les Tornates, les Consoranniens, les Ausques, les Élusates, les Sottiates, les Osquidates de la plaine, les Succasses, les Tarusates, les Basabocates, les Vasséens, les Sénnates , les Cambolectres, les Agésinates (ou Cambolectres Agésinates) joints aux Pictons, puis les Bituriges libres, appelés Cubes ; les Lemovices, les Arvernes, libres ; les Gabales ; d'un autre côté, les Rutènes, qui sont limitrophes de la Gaule Narbonnaise ; les Cadurques, les Antobroges et les Pétrocores, séparés des Tolosates par le Tarnis."
Pline, Histoire naturelle, XI, 240 :"Le fromage le plus estimé à Rome, où l'on juge en présence l'une de l'autre les productions de tous les pays, est, parmi les fromages des provinces, celui qui provient de la contrée de Nemausus, de la Lesura et du pays des Gabales ; mais le mérite en dure peu, et il ne vaut que tant qu'il est frais."
Strabon, Géographie, IV, 2, 2 :"Voici, maintenant, quels sont les peuples compris entre le Garounas et le Liger qui ont été, avons-nous dit, annexés à l'Aquitaine : les Éluens, d'abord, dont le territoire commence à partir du Rhône ; immédiatement après les Éluens, les Vellaves, qui faisaient partie naguère de la nation des Arvernes, mais qui, aujourd'hui, sont indépendants; puis les Arvernes eux-mêmes, les Lémovices et les Pétrocoriens, auxquels il faut ajouter les Nitiobriges, les Cadurques et les Bituriges-Cubes ; sur le littoral, les Santons et les Pictons, les premiers, riverains du Garounas, les autres, riverains du Liger ; enfin, les Rutènes et les Gabales, sur les confins de la Narbonnaise. Il y a de belles forges chez les Pétrocoriens, ainsi que chez les Bituriges-Cubes ; des fabriques de toiles de lin chez les Cadurques, et des mines d'argent chez les Rutènes et chez les Gabales."
Sources épigraphiques
Estampille de potier de La Canourgue (CAG-48a, p 134) GABALIBVS FELICIT(ER)
"À l'empereur César Marcus Cassianius Latinius Postumus, l'invaincu, le pieux, favorisé des dieux, Auguste, grand pontife, revêtu de la puissance tribunicienne, père de la patrie, 4 fois consul (2). La cité des Gabales, […]."
(2) Le 4e consulat de Marcus Cassianius Latinus Postumus correspond à la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 268 (Gricourt & Hollard, 1994).