Le nom de ce petit royaume qui occupait les hauts défilés des Alpes n'apparaît que tardivement dans l'histoire, à l'époque augustéenne. Strabon nous apprend qu'il était appelé anciennement " Terre de Donnas " (Donnius ou Idéonnus selon les versions). Cet état qui avait pour capitale Seguso (Suse, Piémont, Italie) était constitué d'une confédération de peuplades celto-ligues : Les Ségusiens, les Ségoviens, les Belaces, les Caturiges, les Médulles, les Tébaves, les Adanates, les Savincates, les Ecdini, les Veamines, les Venisaniens, les Iemerii, les Vésubiens, et les Quariates. L'ensemble semble être sous la domination des Ségusiens, peuple auquel appartenait la famille régnante. Ce royaume s'étendait donc du Val de Suse à l'est ; la vallée de la Tinée, de la Vésubie, de l'Ubaye, de l'Avance, au sud ; et enfin la haute vallée de la Durance, le Massif des Ecrins, la vallée de la Maurienne à l'ouest. Lorsque ce royaume apparaît dans l'histoire, leur roi est Marcus Julius Cottius, fils de Donnas.
Strabon, Géographie, IV, 6, 6: "Du côté opposé, c'est-à-dire sur le versant italien de la chaîne des Alpes, habitent les Taurins, nation ligystique, et, avec les Taurins, maintes autres tribus de même origine, celles-là notamment qui forment la population des deux districts connus sous les noms de terre de Donnas [ou ldéonnus selon les traductions] et de terre de Cottius."
Sous le règne d'Auguste, vers 9 ou 8 avant J.-C., des campagnes militaires romaines touchent les Alpes, plus particulièrement les Alpes Maritimes. Ammien Marcellin évoque à ce titre le fait que Cottius dû rabattre sa fierté.
Ammien Marcellin, Histoire de Rome, XV, 10: "Elle a l'Océan et les Pyrénées pour rempart au couchant; et, du côté où le soleil se lève, la masse imposante des Alpes Cottiennes. C'est là que le roi Cottius tint seul contre nous si longtemps, protégé par ses impraticables défilés et par ses rocs inaccessibles. Ce prince toutefois rabattit plus tard de sa fierté; et ce fut lui qui, devenu l'ami de l'empereur Octavien, par un retour d'affection mémorable, et après des efforts inouïs, ouvrit plus loin, au travers des vieilles Alpes, ces routes si commodes qui en abrègent le trajet. Je donnerai une autre fois sur cette opération les renseignements que j'ai pu recueillir."
Pline est plus bavard. Dans sa transcription de l'inscription du Trophée de La Turbie (élevé en 5 avant J.-C., 18e année de la puissance tribunicienne d'Auguste) commémorant les victoires romaines sur les populations alpines, il cite les Médulles, les Caturiges, Edenetes (ou Adanates), Esubiens (ou Vesubiens), les Veamines et les Ectini (Ecdini), peuplades rattachées au royaume de Cottius. Ceci indique qu'une guerre, certainement courte opposa Rome à différents royaumes alpins. Cottius ne participa certainement pas à cette guerre, du moins ne s'opposa pas à Rome comme le souligne Pline, lorsqu'il écrit "on n'y a pas joint les douze cités Cottiennes, qui ne furent pas hostiles". Cottius, prenant peur face à l'avancée romaine offrit certainement de lui-même son territoire à Auguste et se plaça sous sa protection. Curieusement, les Medulles et les Caturiges figurent sur le Trophée de la Turbie. Il est probable que certaines peuplades cherchèrent à s'émanciper du Royaume de Cottius et qu'Auguste eut à les combattre. Cottius récupéra certainement ces territoires pour les administrer en tant que préfet.
Pline, Histoire Naturelle, III, 24, 4: "Il ne paraît pas hors de propos de transcrire ici l'inscription du trophée des Alpes, qui est ainsi conçue : A l'Empereur, fils du divin César, Auguste, Grand Pontife, Empereur pour la 14e fois, l'an 18 de sa puissance tribunitienne, le Sénat et le Peuple Romain, en mémoire de ce que, sous les ordres et sous ses auspices, tous les peuples alpins, depuis la Mer Supérieure jusqu'à l'Inférieure, ont été soumis à l'Empire romain. Les peuples alpins vaincus: les Triumplini, les Camuni, les Vennonetes, les Isnarci, les Breuni, les Genaunes, les Focunates, quatres nations vindéliciennes, les Consuanetes, les Rucinates, les Licates, les Catenates, les Ambisontes, les Rugusci, les Suanetes, les Calucones, les Brixentes, les Lepontes, les Viberi, les Nantuates, les Seduni, les Veragri, les Salassi, les Acitavones, les Medulli, les Ucini, les Caturiges, les Brigiani, les Sogiunti, les brodionti, les Nemalones, les Edenetes, les Esubiani, les Veamini, les Gallitae, les Triullati, les Ectini, les Vergunni, les Eguituri, les Nemeturi, les Oratelli, les Nerusci, les Velauni, les Suetri. On n'y a pas joint les douze cités Cottiennes, qui ne furent pas hostiles, ni les cités attribuées aux municipes par la loi Pompeia."
Le Trophée de La Turbie commémore l'amitié entre Rome et le royaume de Cottius, qui intervient certainement dés 8 avant J.-C. (15e année de la puissance tribunicienne d'Auguste), année au cours de laquelle le roi des Ségusiens fit édifier à Suse sa capitale, un arc de triomphe. Sur ce monument sont gravés les noms des quatorze peuples qu'il gouvernait jadis, et qu'il administre dès lors en qualité de préfet romain - praefectus Ciuitatum -. Marcus Julius Cottius, se fit donc l'allié d'Auguste et conserva son royaume avec une indépendance relative.
l'Arc de Suse (CIL V 7231). IMP. CAeSARI AVGVSTO DIV. F. PONTIFICI MAXIMO TRIBVNIC. POTESTATIS XV IMP. XIII M. IVLIVS REGIS DONNI F. COTTIVS PRAeFECTVS CIVITATVM QVAe SVBSCRIPTAe SVNT SEGOVIORVM SEGVSINORVM BELACORVM CATVRIGVM MEDVLLORVM TEBAVIORVM ADANATIVM SAVINCATIVM ECDINIORVM VEAMINIORVM VENISANORVM IEMERIORVM VESVBIANORVM QVARIATVM ET CIVITATES QVAe SVB EO PRAeFECTO FVERVNT
Autre signe d'amitié, Cottius entrepris la percée d'une large route traversant son territoire, l'actuelle route du Mont-Cenis, axe de communication qui sera le plus emprunté des Alpes. Cette région des Alpes porte depuis le nom du roi Cottius, les Alpes Cottiennes.
Strabon, Géographie, IV, 1, 3: "L'autre route qui, par le pays des Vocontiens et le territoire dit de Cottius, [mène aussi à la frontière d'Italie], se confond avec la précédente depuis Nimes jusqu'à Ugernum et à Taruscon, puis, elle traverse le Druentias, passe par Cavallion , et mesure déjà 63 milles depuis Nimes, quand elle atteint, à la frontière du pays des Vocontiens, le point où commence la montée des Alpes; de ce point-là, maintenant, au bourg d'Ebrodunum, situé à l'autre frontière des Vocontiens, du côté du royaume de Cottius, la distance est de 99 milles; enfin l'on en compte autant pour le reste de la route qui, passant par le bourg de Brigantium, le bourg de Scingomagus et le col des Alpes, s'arrête à Ocelum, point extrême du territoire de Cottius. Mais, dès Scingomagus, on est en Italie, et la distance de ce bourg à Ocelum est de 28 milles"
L'amitié entre Rome et le Royaume de Cottius ne cessa pas. En 44 ap. J.-C., l'Empereur Claude augmenta les Etats de Cottius et lui rendit le titre de roi qui lui avait été retiré vers 8 av. J.-C. Il est peu probable qu'il s'agisse du même roi Cottius, en effet, Dion Cassius dit que le titre de roi lui fut alors donné pour " la première fois ". Il ne s'agit donc probablement pas du même Cottius que du temps d'Auguste, ce qui a fait songé aux l'historiens, l'existence d'un roi Cottius II hypothétique.
Dion Cassius, Histoire Romaine, LX, 24: "Il [l'empereur Claude] augmenta les États que M. Julius Cottius tenait de son père, auprès des Alpes appelées de son nom Cottiennes, avec le titre de roi, qu'il lui donna alors pour la première fois."
En 64 ap. J.-C, (66 ap. J.-C. selon Eusèbe) à la mort de Marcus Julius Cottius II (?), sous le règne de Néron, le royaume fut transformé en province procuratorienne - Alpae cottiae - gouvernée par un chevalier. Les habitants reçurent le droit latin, comme l'atteste Pline.
Pline, Histoire Naturelle, III, 24, 3: "Il y a en outre des populations jouissant du droit latin, telles que les Octoduriens, les Centrons limitrophes, les cités Cottiennes, les Caturiges ; et, issus des Caturiges, Ies Vagiennes-Ligures et ceux qui sont appelés Montagnards, et plusieurs peuplades Chevelues sur les confins de la mer de Ligurie."
Suétone, Vie des douze Césars, vie de Néron, XVIII: "Il réduisit en province romaine le royaume de Pont que lui céda le roi Polémon, et les Alpes après la mort de Cottius."
Aurelius victor, Les Césars, V: "Ce fut alors qu'avec l'assentiment du roi Polémon, il réduisit en province romaine le Pont, appelé depuis cette circonstance Pont Polémoniaque : il en fut de même des Alpes Cottiennes après la mort du roi Cottius.
Eusèbe Pamphile, in Chroniques, Saint-Jérôme, II: "Olymp. 211, 2, an de R. 817, de J.-C. 66. Deux provinces seulement sont formées sous Néron, le Pont Polémoniaque et les Alpes Cotties, après la mort du roi Cottius.