Patrice Lajoye, Epona, in Histoire Antique 9, 2003
Ce n'est qu'en 1843 que L. Lersch, un Allemand, prend conscience que la déesse Epona n'est pas latine mais celte. En effet, la répartition des inscriptions qui lui sont consacrées ont été trouvées en majorité sur des territoires celtes et seulement quelques-unes à Rome. Epona est donc une divinité étrangère assimilée par Rome tout comme Mithra ou Cybèle. Si les inscriptions sont assez rares (63 connues), les représentations d'Epona sont en revanche nombreuses, on en retrouve dans toute la partie nord du bassin méditerranéen (de la Grèce à l'Espagne en passant par la Dacie, la Norique, la Germanie, la Gaule, la Grande-Bretagne...).
Mais comment une déesse aussi modeste dans son panthéon d'origine a t-elle pu s'introduire dans Rome?
A partir de la conquête de la Gaule par les Romains, des Gaulois ont été incorporés dans les troupes auxiliaires de l'armée romaine. Ces Gaulois, excellents cavaliers, ont donc introduit leur déesse fétiche dans toutes les provinces parcourues par leurs légions. Mais le culte d'Epona ne semble pas avoir été introduit à Rome par l'intermédiaire de la Gaule mais par les territoires celtes orientaux. En effet, en Gaule, Epona est représentée en cavalière alors que dans les provinces du Danube on la voit assise sur un trône, un tabouret sous les pieds, encadrée par deux ou quatre chevaux. Or, c'est cette dernière représentation que l'on trouve à Rome, notamment dans les casernes du Latran abritant les cavaliers barbares composant la garde de l'Empereur et recrutés généralement en Rhétie, Germanie, Pannonie, Norique.
Epona a donc été adorée surtout par des militaires, son culte se localise souvent dans des écuries où l'on place sa statue en bronze ou en céramique ou encore son portrait peint. Ces représentations sont le plus souvent assez petites et modestes et attestent un culte humble et populaire. Quelques autels dédiés à Epona et un calendrier permettent de penser que des fêtes locales, aux dates variables selon les régions, lui étaient consacrées.
Epona, seulement une déesse des chevaux?
Beaucoup de monuments représentent Epona tenant une corne d'abondance ou un panier de fruits. Ses attributs et sa longue robe la rapprochent aussi des déesses mères gauloises. Certains lui ont aussi donné un rôle en rapport avec la mort, elle serait l'accompagnatrice des âmes. En effet, le cheval est souvent considéré comme l'introducteur de l'âme du défunt dans l'au-delà. Epona va disparaître avec le triomphe du christianisme. St Eloi, patron des forgerons, deviendra le protecteur des chevaux. On peut aussi revoir une survivance d'Epona sur les chapiteaux romans représentant la "Fuite en Egypte" : la vierge y est représentée à cheval, en amazone, un tabouret sous les pieds, tout comme l'Epona gauloise.
"Consacré à l'auguste déesse Epona. Connonius fils d'Icotasgus, a fait don (de ce) temple avec tous ses ornements, à ses frais, de bon gré, comme il se doit."
"Consacré à l'auguste déesse Epona. Marcellus fils de Maturus, dans cet endroit, a remis à ses (frais), pour s'acquitter de son voeu, comme il se doit."
Budapest (AE 2009, 1111) EPON(A)E R[EG(INAE)] [...] SEP(TIMIVS) EXO[VNO]MARVS [
Budapest (TitAq-01, 52) [E]PON(A)E [A]VCVST(A)E [SACR]VM [
En Italie
Guidizzolo (AE 1892, 83) ] XIII XII XI [X] VIIII VIII VII VI V IIII III PR[ID(IE)] X[V] XIIII XIII XII XI X VIIII VIII VII VI V IIII III PRID(IE) [II]I IDVS [I]V[L(IAS)] APOLLI[NAR(IA)] X K(ALENDAS) AVG(VSTAS) NEPTVN[AL(IA)] IDIBVS AV[G(VSTIS)] DIANA(E) X K(ALENDAS) SEPTEM(BRES) VOL<C=K>ANALIA III IDVS DECEM(BRES) SEPTIMONTIV(M) XVI K(ALENDAS) IANVAR(IAS) SATVRNALIA XV K(ALENDAS) IA[N]VAR(IAS) EPON(A)E
Au Monténégro.
Duklja (AE 1933, 76) I(OVI) O(PTIMO) M(AXIMO) EPONAE RE[G(INAE)] GENIO LOCI C(AIVS) OCRATIVS LACON B(ENE)F(ICIARIVS) CO(N)S(VLARIS) LEG(IONIS) I ADIVTR(ICIS) V(OTVM) S(OLVIT) L(IBENS) M(ERITO) CRISPINO ET AELIANO CO(N)S(VLIBVS)
En Roumanie.
Alba Iulia (CIL 03, 7750) EPON(A)E REGIN[AE] SANC[TAE] C(AIVS) [[...]] [[S[...]]] LEG(ATVS) AVG(VSTI) PR(O) PR(AETORE) CO(N)S(VLARIS) DAC(IARVM) III [...] [......] [.]V[...]NVS [...]SALE [...]IENTI[
Alba Iulia (IDR-03-05-01, 69) EPONAE(?)] REGINAE [...] SACRVM [...]ON(IVS) [
Alba Iulia (IDR-03-05-01, 71) EPON(A)E SANCT(A)E PRO SALVTE C(AI) IVLI SEPTIMI CASTINI LEG(ATI) AVG(VSTI) PR(O) PR(AETORE) III DACIAR(VM) LIBELLA SVPERI(V)MENTARIVS EIVS [VOTVM S]OLVIT
Alsó-Ilosva (CIL 03, 788) EPO[NAE] ALA I [TVN]GR(ORVM) FRO[NTON(IANA)] CVI P[RAEEST] C(AIVS) IVL(IVS) APIGIANVS PRAEF(ECTVS) EQ(VITVM) [V(OTVM) S(OLVIT?)] L(IBENS) M(ERITO)
"En l'honneur de la maison divine (et à la) déesse Epona, Luccius Sollius (...)"
Soleure (CIL 13, 5170) DEAE EPONAE MAPILIVS RESTIO M[IL(ES)] [L]EG(IONIS) XXII ANTONI[NI]ANAE P(RIMIGENIAE) P(IAE) F(IDELIS) IMMV[N][I]S CO(N)S(VLARIS) CVRAS A[GE]NS VICO SALOD[VR(O)] [D(IE)] XIII KAL(ENDAS) SEPTEMB[R(ES)] D(OMINO) N(OSTRO) ANTONINO [AVG(VSTO)] II ET SACERDO[TE] II CO(N)S(VLIBVS) V(OTVM) S(OLVIT) L(IBENS) M(ERITO)
A la déesse Epona, Mapilius Restio, soldat de la XXIIème légion d'Antonin, la plus ancienne, la plus dévouée, la plus fidèle, Immunis étant consul, pour la santé de l'arpenteur du vicus de Soleure, au jour du 13 des kalendes de septembre, Antonin (...)