Les Éduens rallient progressivement l'insurrection générale (avril-juin 52 av. J.-C.)
Depuis le début de l'année 52 av. J.-C., différents événements éveillèrent un doute chez César, quant à la fidélité des Éduens, les plus anciens alliés des Romains en Gaule. En l'espace de quelques mois, les Éduens perdirent une grande partie de leur influence en Gaule en raison de leur fidélité à Rome, puisque leurs alliés traditionnels - Bituriges, Sénons et Parises - prirent parti pour Vercingetorix. Les Éduens se trouvaient donc de plus en plus isolés et soumis aux pressions des Gaulois coalisés et des Romains.
En avril 52 av. J.-C., César profita donc des tensions politiques qui agitaient cette cité pour y intervenir. Il arbitra le contentieux existant entre deux prétendants à la magistrature suprême, Cotos et Convictolitavis, et prit finalement parti pour ce dernier. Les partisans de Cotos ne furent aucunement maltraités, comme le démontrent les responsabilités confiées par la suite à Viridomaros. César crut donc avoir pacifié les Éduens, en ayant placé à leur tête Convictolitavis, qui lui était dés lors redevable, et en ne maltraitant pas les partisans de Cotos, de manière à éviter que des injustices ne les poussassent à rejoindre les rangs de Vercingetorix.
Les efforts de César furent vains. De son propre aveu, peu après avoir mis Convictolitavis à la tête des Éduens, ce dernier fut corrompu par les Arvernes. Convictolitavis partagea les sommes perçues avec de nobles éduens qu'il convainquit de prendre part à l'insurrection. Ce chef était convaincu que la fidélité des Éduens à Rome retardait l'inévitable victoire des Gaulois. Il savait que l'engagement des Éduens dans les rangs de l'insurrection déciderait leurs derniers alliés, mais également les peuples encore indécis, à y prendre part à leur tour (Guerre des Gaules, VII, 37). Notons enfin que leur potentiel de nuisance était immense :
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Bien que diminués, les Éduens possédaient encore quelques alliés (Ambarres et Bellovaques), mais aussi des peuples clients (Ambivarètes, Aulerques Brannovices, Blanoviens, Boïens et Ségusiaves). La configuration de ces cités faisait que tout replis stratégique de l'armée romaine vers la Gaule transalpine, ou toute possibilité de fuite ou de venue de renforts, ne pouvaient se faire sans emprunter leur territoire ;
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Les Éduens et, dans une moindre mesure, les Boïens, leurs obligés, assuraient les approvisionnements de l'armée romaine en campagne. Ce furent ces seuls approvisionnements qui permettaient à César de faire face à la stratégie de la terre brûlée de Vercingetorix. En outre, les Romains gardaient, sur le territoire des Éduens, les deniers publics et les provisions de l'armée en campagne ;
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Enfin, les Romains gardaient, sur le territoire des Éduens, un grand nombre d'otages, grâce auxquels César s'assurait de la fidélité de nombreux Gaulois.
César, Guerre des Gaules, VII, 37 :"Tandis que ces choses se passent près de Gergovie, l'Éduen Convictolitavis qui, comme on l'a vu, devait sa magistrature à César, séduit par l'argent des Arvernes, a des entrevues avec plusieurs jeunes gens, à la tête desquels étaient Litaviccos et ses frères, issus d'une illustre famille. Il partage avec eux la somme qu'il a reçue, et les exhorte à se souvenir qu'ils sont nés libres et faits pour commander. La cité des Éduens retarde seule le triomphe infaillible des Gaulois ; son influence retient les autres nations ; s'ils changent de parti, les Romains ne tiendront point dans la Gaule ; il a quelque obligation à César, qui d'ailleurs n'a été que juste envers lui : mais il doit bien plus à la liberté commune ; car pourquoi les Éduens viendraient-ils discuter leur droit et leurs lois devant César, plutôt que les Romains devant les Éduens ? Le discours du magistrat et l'appât du gain ont bientôt gagné ces jeunes gens ; ils offrent même de se mettre à la tête de l'entreprise, et on ne songe plus qu'aux moyens de l'exécuter ; car on ne se flattait pas que la nation se laisserait entraîner légèrement à la guerre. On arrêta que Litaviccos prendrait le commandement des dix mille hommes que l'on enverrait à César ; il se chargerait de les conduire, et les frères se rendraient en avant auprès de César. Ils réglèrent ensuite la manière d'agir pour tout le reste."
Plutarque, Vies parallèles des hommes illustres : Vie de César, XXVI :"Il eût paru incroyable qu'un simple courrier fût venu en un temps beaucoup plus long du lieu d'où il était parti, et ils le voyaient, arrivé en peu de jours avec toute son armée, piller et ravager leur pays, détruire leurs places fortes, et recevoir ceux qui venaient se rendre à lui ; mais quand les Éduens, qui jusqu'alors s'étaient appelés les frères des Romains, et en avaient été traités avec la plus grande distinction, se révoltèrent aussi et entrèrent dans la ligue commune, le découragement se jeta dans ses troupes."